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S. Irénée et la Tradition
par Abbé Néri 2012-07-05 21:30:43
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Dans un intéressant article paru dans la Revue de l'histoire des religions sur l’interprétation d’un passage de l’Adversus haereses de saint Irénée, P. Nautin {Année 1957 - Volume 151} on peut glaner quelques éléments sur la « tradition apostolique » dont témoigne le saint docteur :

1).- La doctrine générale ď Irénée.

— On se rappellera d'abord l'importance particulière que l'universalité de l'Église avait aux yeux ď Irénée dans son argumentation contre les hérétiques.

C'est une idée naturelle à l'homme que la vérité est une dans le temps comme dans l'espace.

Partant de là, l'hérésiologie chrétienne, dès avant Irénée, s'était attachée à montrer que les hérésies sont toutes différentes les unes des autres : chacune renchérit sur la précédente et se sépare de la voisine. Cet émiettement, ces « variations » comme dira Bossuet, constituaient une preuve que tous ces groupes étaient dans l'erreur, Irénée a repris cet argument, et aux hérésies qui varient il oppose l'Église universelle qui professe la même foi toujours et partout.

Toujours, car elle « conserve » avec soin la tradition des apôtres sans rien y ajouter ni rien en retrancher. (Haer., IV, 33, 8 (1077 B), neque additamentum neque ablationem recipiens.)

Partout, car cette doctrine est la même dans toutes les églises.

Irénée a beaucoup insisté sur ce dernier point. Il répète fréquemment que l'Église est « répandue sur toute la terre » :
Et ecclesiae quidem praedicatio uera et firma, apud quam una et eadem salutis uia in universo mundo ostenditur.

Il faudrait relire ici le célèbre passage du livre I, où Irénée décrit cette Église « répandue dans le monde entier », qui est faite de toutes les églises d'Orient, d'Occident et du milieu du monde, qui parle des langues différentes mais n'a partout qu'un seul et même enseignement de la vérité (Haer., I, x, 1 (549 A).).

Il y a ainsi pour Irénée deux « notes » de la véritable Église : la perpétuité de la foi depuis les apôtres et l'unité de foi à travers le monde entier.

L'une et l'autre sont plusieurs fois réunies sous sa plume (Haer., I, x, 1 (549 A)), et ce sont encore elles que nous retrouvons dans notre passage, où le semper et ubique sont intentionnellement rapprochés : « in qua semper ab his qui sunt undique conseruata est ea quae est ab apostolis traditio ».

Replacée dans le contexte de la doctrine d'Irénée, cette phrase ne peut désigner que l'Église universelle.

2).- La pratique de cette époque :

— II convient ensuite de remarquer que le principe énoncé, à savoir, que toute église se réunit nécessairement à l'Église universelle, est bien celui qui guidait la pratique ecclésiastique dans les premiers siècles.

Quand on voulait prouver que tel évêque et les fidèles de son parti étaient tombés dans l'hérésie et ne constituaient plus la véritable église du lieu, que faisait-on ?

On en appelait « aux églises ». On invitait des évêques et des clercs d'autres églises à se réunir, ils questionnaient l'intéressé ou lui demandaient de souscrire à une formule dans laquelle ils avaient résumé leur foi ; si ses réponses offraient une prise à la critique ou s'il refusait de signer, il était convaincu d'être « en dehors de l'Église », et aussitôt, le siège étant censé vacant, on installait un autre évêque.

Pourquoi les procès d'hérésie étaient-ils toujours déférés ainsi à un concile ?

Pourquoi cet appel aux églises, cette convocation d'évêques et de clercs venant d'ailleurs, soit du voisinage, soit de plus loin, tous ceux qui voudront venir, sinon parce que le critère pratique de l'orthodoxie et de l'hérésie était l'accord ou le désaccord avec la foi de l'Église universelle, que ces évêques et ces clercs venaient représenter ?

Nous avons là l'illustration la plus claire du principe que nous avons retrouvé dans la phrase d'Irénée.

L'Église à laquelle se réunit nécessairement toute église à moins de perdre son nom (et qu'Irénée définit comme celle « in qua ab his qui sunt undique conseruata est ea quae est ab apostolis traditio »), c'était spontanément pour un homme de ce temps l'Église universelle.

Les commentateurs qui veulent rapporter notre phrase à l'église de Rome se trouvent naturellement très gênés par cet ab his qui sunt undique.

Les uns ont proposé purement et simplement de le supprimer ou de le corriger, et les autres se voient contraints de recourir à des solutions d'exception, sans réussir pour autant à se tirer complètement d'embarras, comme nous aurons l'occasion de le voir.

Mais il n'y a de difficulté que si l'on pose en principe que la phrase concerne l'église romaine. Tout devient limpide quand, renonçant à toute idée préconçue, on se soumet résolument au texte, à sa stylistique et au sens obvie de ses mots.

Quoi de plus simple, en effet, que cette proposition in qua semper ab his qui sunt undique conseruata est ea quae est ab apostolis traditio ? Quel lecteur non prévenu hésitera à traduire : « en qui toujours par les gens de partout a été conservée la tradition des apôtres », et à voir dans cette Église l'Église universelle ?"

Au-delà de la controverse sur l’attribution de la formule à l’Église universelle, on peut constater que : « le critère pratique de l'orthodoxie et de l'hérésie était l'accord ou le désaccord avec la foi de l'Église universelle » (dans l’espace et le temps)






C'est une idée naturelle à l'homme que la vérité est une dans le temps comme dans l'espace.

     

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 S. Irénée et la Tradition par Abbé Néri  (2012-07-05 21:30:43)
      Merci, monsieur l'abbé par InDominoSperavi  (2012-07-05 22:33:54)


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