L'avis de la Commission théologique internationale

Le Forum Catholique

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Fenestri -  2020-01-23 10:55:31

L'avis de la Commission théologique internationale

Quelques pistes de réflexions tirées de l'introduction du document, à compléter donc avec la version complète :

[3] L’idée des limbes, que l’Église a employée pendant des siècles pour désigner le sort des enfants qui meurent sans baptême, n’a pas de fondement clair dans la Révélation, même si elle a été longtemps utilisée dans l’enseignement théologique traditionnel. De plus, penser que les enfants qui meurent sans baptême sont privés de la vision béatifique, ce qui a depuis si longtemps été considéré comme la doctrine commune de l’Église, suscite de nombreux problèmes pastoraux, à tel point que beaucoup de pasteurs d’âmes ont réclamé une réflexion plus approfondie sur les voies du salut. Cette nécessaire reconsidération des enjeux théologiques ne peut faire l’impasse sur les conséquences tragiques du péché originel. Le péché originel implique un état de séparation d’avec le Christ, et cela exclut assurément la possibilité de la vision de Dieu pour ceux qui meurent en cet état.

[4] Premièrement, dans sa réflexion sur la question du sort des enfants qui meurent sans baptême, la communauté ecclésiale doit garder à l’esprit le fait que Dieu est à proprement parler le « sujet » plutôt que l’objet de la théologie. La première tâche de la théologie consiste donc à écouter la Parole de Dieu. La théologie écoute la Parole de Dieu exprimée dans les Écritures afin de la communiquer avec amour à tous les hommes. Cependant, en ce qui concerne le salut de ceux qui meurent sans baptême, la Parole de Dieu dit peu de choses, voire rien. La discrétion de l’Écriture sur ce sujet doit donc être interprétée à la lumière des textes qui concernent le dessein universel de salut et les voies de salut. En bref, le problème qui se pose aussi bien à la théologie qu’à la pastorale est celui de sauvegarder et de réconcilier deux séries d’affirmations bibliques : celles qui ont trait à la volonté salvifique universelle de Dieu[3] et celles qui touchent à la nécessité du baptême comme voie pour être libéré du péché et conformé au Christ[4].

[5] Deuxièmement, en tenant compte du principe « lex orandi lex credendi », la communauté chrétienne remarque qu’il n’est pas fait mention des limbes dans la liturgie. De fait, la liturgie comporte une fête des saints Innocents qui sont vénérés comme martyrs, bien qu’ils ne fussent pas baptisés, parce qu’ils furent tués « à cause du Christ[5] ». Un développement liturgique important intervint même par l’introduction de funérailles pour les enfants morts sans baptême. Nous ne prions pas pour ceux qui sont damnés. Le Missel romain de 1970 a introduit une messe de funérailles pour les enfants non baptisés que leurs parents avaient l’intention de présenter au baptême. L’Église confie donc à la divine miséricorde ces enfants qui meurent sans être baptisés. Dans son Instruction sur le baptême des petits enfants de 1980, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a de nouveau affirmé : « Quant aux petits enfants décédés sans avoir reçu le baptême, l’Église ne peut que les confier à la miséricorde de Dieu, comme elle fait dans le rite des funérailles établi pour eux[6]. » Le Catéchisme de l’Église catholique ajoute que « la grande miséricorde de Dieu qui veut que tous les hommes soient sauvés (voir 1 Tm 2, 4), et la tendresse de Jésus envers les enfants, qui lui a fait dire “Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez pas” (Mc 10, 14), nous permettent d’espérer qu’il y ait un chemin de salut pour les enfants morts sans baptême[7] ».

[6] Troisièmement, l’Église ne peut manquer d’encourager l’espérance d’un salut pour les enfants qui meurent sans le baptême par le fait même qu’elle « prie pour que personne ne se perde[8] » et qu’elle prie dans l’espérance que « tous les hommes soient sauvés[9] ». Sur la base d’une anthropologie de la solidarité[10], affermie par une compréhension ecclésiale de la personnalité corporative, elle connaît l’aide que peut apporter la foi des croyants. L’Évangile de saint Marc décrit de fait une occasion où la foi de certains a été efficace pour le salut d’un autre[11]. Ainsi, alors même qu’elle sait que la voie normale pour obtenir le salut dans le Christ est le baptême in re, l’Église espère qu’il puisse y avoir d’autres voies pour obtenir la même fin. Puisque « par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme », et puisque le Christ est mort pour tous, et encore parce que tous sont en fait « appelés à une unique et même destinée, qui est divine », l’Église croit que « l’Esprit Saint offre à tous, d’une façon que Dieu connaît, la possibilité d’être associés au mystère pascal[12] ».

[7] Enfin, dans sa réflexion théologique sur le salut des petits enfants qui meurent sans baptême, l’Église respecte la hiérarchie des vérités et commence par réaffirmer clairement la primauté du Christ et de sa grâce qui l’emporte sur Adam et le péché. Jésus-Christ, dans son existence pour nous et dans la puissance rédemptrice de son sacrifice, est mort et ressuscité pour tous. Par toute sa vie et son enseignement, il a révélé la paternité de Dieu et son amour universel. La nécessité du baptême est de foi ; pourtant, la tradition et les documents du Magistère qui ont réaffirmé cette nécessité ont besoin d’être interprétés. D’une part, s’il est vrai que la volonté salvifique universelle de Dieu ne s’oppose pas à la nécessité du baptême, il est également vrai que les petits enfants n’opposent aucun obstacle volontaire à la voie de la grâce rédemptrice. D’autre part, le baptême est conféré aux petits enfants qui sont exempts de péchés personnels, non seulement pour les libérer du péché originel, mais encore pour les insérer dans la communion de salut qu’est l’Église, au moyen de la communion à la mort et à la résurrection du Christ[13]. La grâce est entièrement gratuite parce qu’elle est toujours un pur don de Dieu. La damnation, toutefois, est méritée parce qu’elle est la conséquence du libre choix de l’homme[14]. L’enfant qui meurt avec le baptême est sauvé par la grâce du Christ et par l’intercession de l’Église, même sans sa coopération. On peut se demander si l’enfant qui meurt sans baptême, mais pour lequel l’Église exprime dans sa prière le désir qu’il soit sauvé, peut être privé de la vision de Dieu, même sans sa coopération.

L'ESPERANCE DU SALUT POUR LES ENFANTS QUI MEURENT SANS BAPTÊME - SITE DU VATICAN
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