Assise, ce n'est pas du relativisme, mais cela y conduit souvent.

Le Forum Catholique

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Scrutator Sapientiæ -  2019-10-24 08:09:05

Assise, ce n'est pas du relativisme, mais cela y conduit souvent.

Bonjour Jean-Paul PARFU,

Assise, ce n'est pas du relativisme, ni du syncrétisme, mais c'est de la conciliation, du concordisme, de la pactisation ou du partenariat,

- d'une part entre la religion chrétienne et les religions non chrétiennes, dans le domaine des valeurs situées au croisement entre la morale et de la religion,

- d'autre part entre la vision néo-catholique post-conciliaire et la vision mondialiste, onusienne, pluraliste et/ou postmoderne, dans le domaine de la vision relative à ces valeurs.

Assise, ce n'est donc pas du relativisme, mais cela y conduit souvent, même si, bien entendu, Assise ne conduit pas complètement, ou pas directement, au "relativisme intégral".

En effet, nous sommes ici en présence d'un événement qui a donné une espèce de légitimité à la conception d'après laquelle toutes les religions ont, en acte, presque les mêmes valeurs morales, sur un plan "anthropologal", voire une espèce de reconnaissance à la conviction selon laquelle toutes les religions ont, en acte, presque la même valeur religieuse, sur le plan théologal.

Ce qui est assez cocasse, c'est que cet inclusivisme a été mis en avant et en valeur par un pape qui s'est voulu, par ailleurs, porteur d'une position néo-catholique post-conciliaire "médiane", située à égale distance de l'intégrisme et du progressisme, ou, en l'occurrence, à égale distance de l'exclusivisme et du relativisme.

Or, il faut le savoir, l'inclusivisme et le relativisme ou, si l'on préfère, le néo-modernisme "soft" et le néo-modernisme "hard", communient, à l'origine, aux mêmes sources : l'un et l'autre disent non à l'aristotélico-thomisme, non à l'ecclésiologie controversiste, et non à la christologie exclusiviste ante-conciliaires.

En fait, avec Assise 1986, Jean-Paul II a probablement voulu faire d'une pierre plusieurs coups :

- d'une part, Assise 1986, c'est 16 ans après Kyoto 1970 (de même que Unitatis redintegratio, en 1964, c'est 16 ans après Amsterdam, en 1948...), or ce n'est pas à vous que j'apprendrai que, pour les hommes d'Eglise néo-catholiques post-conciliaires, il est très important que l'Eglise ne reste presque jamais "en arrière", "en retard", face à certaines évolutions ou orientations en provenance de l'extérieur ;

- d'autre part, Assise 1986, c'est quelques années après la publication, dès le début des années 1980, d'articles et d'ouvrages de John Hick et de Paul Knitter

a) qui sont allés encore plus loin que Daniélou, de Lubac, et même Karl Rahner, en direction de ce que l'on pourrait appeler une approche pluraliste, ou diversitaire, sinon relativiste, des religions et des traditions croyantes non chrétiennes,

et

b) qui ne sont pas restés sans influence à l'intérieur de l'Eglise catholique, chez certains dominicains et chez certains jésuites ;

- enfin, Assise 1986 est aussi le reflet des convictions philosophiques et théologiques personnelles de Karol Wojtyla / Jean-Paul II, alors que ces convictions philosophiques et théologiques, plus partisanes qu'opposées à l'intersubjectivisme et au phénoménologisme, sont vraiment propices à une approche plus bienveillante que vigilante, face au dialogue interreligieux et aux religions non chrétiennes.

Quoi qu'il en soit, un peu plus de trente ans après, nous sommes en présence des conséquences de l'imposition, plus ou moins en douceur, à l'ensemble de l'Eglise, d'une vision des choses qui, en d'autres temps pas si lointains, aurait été considérée comme apostate ou hérétique, ou, au minimum, comme gravement propice à l'apostasie ou à l'hérésie.

Bonne journée.

Scrutator.
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