St Thomas : Quodlibet 9

Le Forum Catholique

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Meneau -  2019-09-19 16:45:32

St Thomas : Quodlibet 9

Vous continuez à prétendre que St Thomas ne tient pas les canonisations pour infaillibles, moi je prétends le contraire. A titre donc purement documentaire pour ceux qui suivent encore ce fil, voici l'intégralité du Quodlibet 9, qu 8


Quodlibet 9, question 8

Ensuite, on s’interroge sur la gloire.

Question : Tous les saints qui ont été canonisés par l’Église sont-ils dans la gloire, ou certains sont-ils en enfer ?

Objection : Il semble que certains puissent être en enfer parmi ceux ceux qui ont été canonisés par l’Église.

1 - En effet, nul ne peut être sûr de l’état de quelqu’un, pas plus que de lui-même, car ce qui concerne l’homme, personne ne le connaît, sinon l’esprit de l’homme qui est en lui, comme il est dit en 1 Co 2, 11. Or, un homme ne peut être sûr qu’il est lui-même dans l’état du salut : Personne ne sait s’il est digne de haine ou d’amour (Qo 9, 1). À bien plus forte raison le pape ne le sait-il pas. Il peut donc se tromper en canonisant.

2 - Quiconque s’appuie sur un moyen faillible pour juger peut errer. Or, l’Église, pour canoniser les saints, s’appuie sur le témoignage humain, puisqu’elle enquête sur la vie et les miracles en recourant à des témoins. Puisque le témoignage de l’homme est faillible, il semble donc que l’Église, en canonisant des saints, puisse se tromper.

Cependant,

1 - Il ne peut exister d’erreur condamnable dans l’Église. Or, ce serait une erreur condamnable si on vénérait comme saint quelqu’un qui a été pécheur, car certains, connaissant ses péchés ou son hérésie, si cela se produisait, pourraient être conduits à l’erreur. L’Église ne peut donc pas errer en de telles choses.

2 - Augustin dit, dans une lettre à Jérôme, que, si l’on admet un mensonge dans l’Écriture canonique, notre foi chancellera, elle qui dépend de l’Écriture. Or, si nous sommes tenus de croire ce qui se trouve dans la Sainte Écriture, il en est de même de ce qui est décidé d’une manière générale par l’Église ; c’est pourquoi celui qui a une opinion contraire à la décision des conciles est jugé hérétique. Le jugement commun de l’Église ne peut donc être erroné. Et ainsi, la conclusion est la même qu’auparavant.

Réponse.

Une chose peut être jugée possible en la considérant en soi, qu’on découvre impossible si on la met en rapport avec quelque chose d’extrinsèque. Je dis donc qu’il est possible que le jugement de ceux qui sont à la tête de l’Église puisse errer sur n’importe quoi, si l’on considère uniquement leurs personnes. Mais si l’on considère la divine providence qui dirige son Église par son Esprit afin qu’elle n’erre pas, comme lui-même a promis, en Jn 16, 13, que l’Esprit qui allait venir enseignerait toute vérité, au sujet de ce qui est nécessaire au salut, s’entend, il est certain qu’il est impossible que le jugement de l’Église universelle se trompe sur ce qui se rapporte à la foi. Aussi faut-il plutôt s’en tenir à la décision du pape (à qui il revient de déterminer de la foi) qu’il exprime en jugement, plutôt qu’à l’opinion de tous les experts en Écritures, puisqu’on lit que Caïphe, bien que mauvais, cependant parce qu’il était pontife a prophétisé sans le savoir, Jn 11, 51. Dans les autres décisions qui se rapportent à des faits particuliers, comme lorsqu’il s’agit de possessions, de crimes ou de choses de ce genre, il est possible que le jugement de l’Église se trompe en raison de faux témoins.

La canonisation des saints est à mi-chemin entre ces deux choses. Toutefois, parce que l’honneur que nous manifestons aux saints est une certaine profession de foi par laquelle nous croyons à la gloire des saints, il faut croire pieusement que le jugement de l’Église ne peut se tromper même dans ces choses.

1 - Le pontife, à qui il appartient de canoniser les saints, peut être assuré de l’état de quelqu’un par l’enquête sur sa vie et par l’attestation de ses miracles, et surtout par l’inspiration de l’Esprit Saint, qui scrute tout, même les profondeurs de Dieu (1 Co 2, 10).

2 - La divine providence préserve l’Église afin qu’elle ne se trompe pas dans de telles choses à cause du témoignage faillible des hommes.



Chacun tirera ses propres conclusions.

Cordialement
Meneau
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