2 Août 1987 : sermon de Dom Gérard

Le Forum Catholique

Imprimer le Fil Complet

Meneau -  2019-08-26 01:55:42

2 Août 1987 : sermon de Dom Gérard



Sermon de Dom Gérard du 2 août 1987 au sujet des sacres



Chers amis, devant l'amoncellement de lettres et de communications téléphoniques demandant des renseignements précis sur « l'affaire du sacre », sachant combien l'opinion est agitée par les fausses nouvelles, les surenchères, les débats passionnés, nous avions promis de vous donner quelques éclaircissements sur les relations entre Mgr Lefebvre et le Vatican. Ayant, il y a quarante-huit heures, téléphoné à Mgr Lefebvre lui-même, je vais tâcher de résumer sa pensée sans la déformer. II est exact que Mgr Lefebvre a envisagé - non décidé - de sacrer des évêques.



1 - QU'EST-CE QUE LE SCHISME?



Mgr Lefebvre refuse formellement l'idée d'un schisme. Parce que le schisme est un grand péché. C'est une déchirure qui blesse l'unité d'amour et de direction dans l'Eglise.

« Le schisme, dit saint Thomas d'Aquin, est une sorte de rébellion, faite de mépris obstiné des préceptes de l'Eglise et d'un refus de se soumettre à ses décisions » (IIa, IIae, q. 39, a, l ad 2).

Et Cajetan précise : c< La désobéissance n'est pas un schisme tant qu'elle ne comporte pas une révolte contre la fonction du pape ou de l'Eglise » . Notez bien, il ne s'agit pas de s'opposer à des paroles ou à des agissements du pape, mais bien de se révolter contre sa fonction en tant que telle. Prenons un exemple : si un enfant refuse d'aller à l'école à la rentrée des classes, c'est de la désobéissance ; si il dit à son père : vous n'êtes plus mon père mais un étranger pour moi ; je ne vous écoute plus, et ne vous obéirai plus jamais, c'est un schisme.



2 - Y A-T-IL UN DANGER DE SCHISME ?



Il y aurait un danger de schisme si les évêques sacrés par Mgr Lefebvre se constituaient en chefs d'Eglises autonomes (ou autocéphales, comme le disent les Orthodoxes). Mais dans le cas qui nous occupe, les évêques n'auraient comme fonction que d'assurer la continuité du sacerdoce fidèle, de continuer de communiquer la vie divine par les ordinations sacerdotales et les confirmations.

Notez bien, il s'agit d'un vrai sacre épiscopal conférant tous les pouvoirs d'ordre et de juridiction. Mais l'évêque ainsi sacré n'userait que de son pouvoir d'ordre, se bornant à ordonner des prêtres et à confirmer des enfants. Sans « mission canonique », il ne peut exercer un quelconque pouvoir de juridiction particulière. Consacré sans la permission du pape, il se gardera de devenir le pasteur d'un diocèse parallèle ; il refusera, sous peine de devenir schismatique, de se constituer le chef d'une autre Eglise. Il n'y a qu'une seule Eglise catholique, apostolique et romaine. Pour rien au monde, par conséquent, il n'usurpera une juridiction comme l'ont fait les Orthodoxes.



3 - MAIS SI LE PAPE EXCOMMUNIE Mgr LEFEBVRE ?



Nous répondrons : il serait étonnant que tant d'évêques et de prêtres ouvertement hérétiques dans le monde ne soient pas inquiétés et que le seul évêque qui garde la foi et les sacrements soit excommunié !

D'autre part, pour être excommunié, stipule le Droit Canon, il faut avoir commis un péché grave contre la foi ou les mœurs. Or Mgr Lefebvre, prélat dont on s'accorde à reconnaître la sainteté de vie, a plus de quatre-vingt ans : peut-on penser qu'il choisisse pour perpétrer un si grand péché le moment où il va paraître devant Dieu ?



Donc, chers amis, gardez votre sérénité. Ne lisez pas, ou du moins ne croyez pas les journaux ou la télévision. L'information (aujourd'hui désinformation) est devenue la sorcière du monde moderne. Comme dans les contes de jadis, cette sorcière jette des sorts, elle jette des malédictions, impose des slogans, déroute les esprits, déforme la vérité. Chers amis, au lieu de vous laisser impressionner par ces media, que vous détestez au fond de vous, attendez patiemment que Mgr Lefebvre s'explique lui-même quand il aura jugé bon de le faire, peut-être cet automne.



4 - POURQUOI Mgr LEFEBVRE A-T-IL SOUDAINEMENT PARLÉ

DE L'ÉVENTUALITÉ D'UN SACRE?



Cette mesure extrême ne peut avoir pour mobile que de très hautes raisons. La raison essentielle, c'est qu'une rupture dramatique s'est fait jour dans le Magistère de l'Eglise. Cette rupture, hélas ! entérinée par les hommes du Vatican est apparue dans les réponses qui ont été données aux « dubia » (objections) que Mgr Lefebvre a présentées au cardinal Ratzinger, il y a deux ans, concernant la déclaration conciliaire Dignitatis humanae et les conséquences dramatiques qu'elle a entraînées. Résumons en deux mots : la nouvelle doctrine consiste à laisser l'erreur pulluler sous prétexte de liberté, en refusant d'annoncer les droits souverains du Seigneur Jésus sur les sociétés. Or cette négation de fait de la Royauté du Christ s'accompagne de la reconnaissance d'un « espace d'autonomie n en faveur de toutes les religions, leur permettant de développer et de répandre leurs erreurs. Non seulement, donc, le Vatican cesse d'affirmer l'unique médiation du Christ entre Dieu et les hommes, mais il interdit aux Etats (même aux Etats catholiques) de frayer un chemin à l'évangélisation. Comme si d'autres voies de salut existaient en dehors du Christ. Comme si le Christ n'avait pas déclaré : « Qui n'amasse pas avec moi dissipe ! ».Jusqu'ici l'Eglise n'a eu de cesse d'affirmer les droits souverains de Dieu et de son Christ sur toute la société. C'est son unique raison d'être. Son audace s'appuyait sur un dogme irrécusable que deux paroles résument : l'affirmation solennelle de Jésus en réponse à Pilate : « Tu l'as dit : je suis roi » et l'injonction de saint Paul qui en est la conséquence : « 11 faut qu'Il règne ». Pendant des siècles l'Eglise a rappelé aux pouvoirs temporels leur devoir de la protéger et de l'aider à répandre son message, sa doctrine, ses sacrements, qui sont pour le Christ le moyen de régner sur le monde et de sauver les âmes.

Eh bien, cela, c'est fini. Maintenant les hommes du Vatican envoient des nonces dans tous les pays pour dire aux gouvernements, même catholiques : il faut donner un « espace d'autonomie » à toutes les religions. Même celles qui veulent renverser la royauté de Jésus-Christ ? Oui, même celles-là.



5 - ALORS C'EST « L'AUTODESTRUCTION » DE L'ÉGLISE

DONT PARLAIT PAUL VI?



Disons que ce sont les plus hauts dignitaires de l'Eglise eux-mêmes qui semblent travailler à supprimer, abolir le rempart qu'elle avait édifié au cours des siècles contre les poisons de l'erreur et du vice. Ils encouragent ce que Léon XIII appelait « la liberté de l'erreur, la liberté de perdition ». Ils donnent une voix, une représentation, une aire d'extension à ceux qui disent: « Nous ne voulons pas que le Christ règne sur nous ».

L'Eglise abolissant le système de défense de son propre organisme s'est mise pour ainsi dire elle-même en état d'immuno-déficience, dont vous connaissez le syndrome fatal. Tout le monde en parle. Je tairai son nom.



Voici entre mille, un exemple frappant que donne Mgr Lefebvre : celui de la Colombie. « Si la Colombie était en 1966 un pays encore à 95 % catholique, c'est grâce à l'Etat, qui a empêché par sa Constitution la propagation des sectes protestantes : aide inappréciable à l'Eglise catholique ! En protégeant la foi des citoyens, ces lois et ces chefs d'Etat auront contribué à mener au ciel des millions d'individus, qui auront la vie éternelle grâce à ces lois et ne l'auraient pas eue sans cela ! - Or maintenant en Colombie c'est terminé !

Cette loi fondamentale a été supprimée sur les instances du Vatican, en application de la « liberté religieuse » de Vatican II ! Alors actuellement les sectes pullulent ; et ces pauvres gens simples sont désarmés face à la propagande de sectes protestantes pourries d'argent et de moyens, qui viennent et reviennent sans cesse endoctriner les analphabètes.

Je n'invente rien, Eh bien cela, n'est-ce pas une véritable oppression des consciences, protestante et maçonnique ? Voilà où aboutit la prétendue liberté religieuse du Concile ! ».

Dans le même ordre d'idées, nos frères qui fondent un monastère au Brésil nous ont écrit dernièrement que des sectes protestantes venues d'Amérique du Nord avaient acheté toute une vallée, où sévissent leurs prédicants, et que c'est toute une population sans défense qui passe au protestantisme.

Voilà pourquoi Mgr Lefebvre est allé à Rome déposer aux pieds du Saint Père le livre « Ils L'ont découronné ». Il a dit au cardinal Ratzinger : « Voici la doctrine de l'Eglise ; si vous êtes d'accord, alors il faut lutter contre les erreurs qui s'y opposent. Sinon, nous ne pouvons plus vous faire confiance ».

Chers amis, gardons notre calme et notre sérénité. Si nous prions, si nous restons fermement attachés, à la Tradition de l'Eglise, nous sommes sûrs de ne pas être trompés, et nous connaîtrons, même au milieu des tempêtes, la joie de l'âme et la tranquillité de l'esprit.


Source

Cordialement
Meneau
http://www.leforumcatholique.org/message.php?num=873454