Pas tout à fait d'accord

Le Forum Catholique

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Signo -  2019-07-31 19:43:27

Pas tout à fait d'accord

Si les rubriques de 1965 capitulent sur la question du "face au peuple", c'est pour tenter d'encadrer une pratique qui était déjà très répandue à l'époque et aussi parce que l'on était dans l'illusion que cela favorisait la participation des fidèles. Je ne vois pas ce qui empêcherait (mis à part les obstacles idéologiques habituels) de revenir à la Messe de St-Pie V sous sa forme de 1965, mais en restaurant l'orientation.

Ensuite il ne faut pas perdre de vue l'objectif: la finalité n'est pas de restaurer telle ou telle version du missel, mais de répondre à ces deux nécessités:

- restaurer la liturgie dans toute sa dimension traditionnelle;
- permettre au peuple d'avoir accès à cette richesse et de s'en nourrir.

Ensuite je suis curieux de savoir ce que vous entendez par "revenir purement et simplement à la tradition liturgique". J'espère que par là vous n'entendez pas le retour au missel de 1962, qui concentre tous les défauts modernisants de la forme extraordinaire, saupoudré d'une pincée de pastoralisme mal compris (exemple: la messe basse "dialoguée" pratiquée dans toutes les fraternités traditionalistes, et qui est une invention des années 1950...). Ensuite je suis curieux de lire votre démonstration prouvant que la liturgie de Fontgombault "n'est pas fidèle à la tradition liturgique". Vraiment très intéressant...

Ensuite pour tout ce qui est des caractéristiques du missel de 1965, on pourrait en discuter des heures, et je n'ai pas d'opinion tranchée sur bien de ces points.

Les prières au bas de l'autel... bon. Personnellement, je suis favorable à leur maintien pour la messe basse mais leur suppression pour la messe chantée (comme cela se fait dans la plupart des monastères attachés à l'usus antiquior).
Pour ce qui est des anciennes prières de l'Offertoire, je les préfère aux nouvelles, mais je n'en fais pas un absolu non plus, il y a des arguments des deux côtés.

Pour ce qui est du latin je suis d'accord avec vous sur le principe et d'ailleurs moi qui n'ai jamais appris le latin ni à l'école ni ailleurs je me sens toujours très à l'aise dans une liturgie intégralement en latin (même les lectures). Ceci dit, dans le contexte actuel, introduire une dose limitée de vernaculaire (les lectures, peut-être certaines oraisons) me paraît plus réaliste, du moins dans un contexte paroissial classique avec des fidèles qui ne sont pas à l'aise avec cette langue (il y en a beaucoup dans les paroisses diocésaines!).
En revanche, je suis assez hostile au fait de lire "en catimini" une traduction de l'Evangile juste avant le sermon. Pour moi ça n'a pas de sens: la solennité de la proclamation de la Parole de Dieu est justement là aussi pour aider le fidèle à s'imprégner de cette Parole et à en saisir la dimension surnaturelle. Si on lit la traduction comme si c'était n'importe quel texte, on manque totalement cet objectif essentiel. Donc il est préférable de chanter l'Evangile ou l'épître directement en français, recto tono, comme cela se fait dans les monastères durant les repas au réfectoire.

Pour ce qui est du Pater chanté en latin par tout le peuple sur la mélodie traditionnelle, je pense qu'on est vraiment là dans l'exemple d'une bonne innovation: cela permet de respecter l'identité de la liturgie tout en permettant au peuple de s'unir au célébrant. Cela se pratique dans ma paroisse VOM, avec beaucoup de profit pour les fidèles. Même chose à propos du Canon intégralement chanté (et non pas seulement lu) à haute voix par le prêtre, bien que j'apprécie aussi beaucoup le canon en silence.

Pour ce qui est du décalage entre la messe du prêtre et celle des fidèles, je ne peux tout simplement pas vous suivre, pour deux raisons:
- d'abord, cela revient à renoncer à l'adage lex orandi, lex credendi, puisqu'on a une célébration qui n'est pas conforme au principe théologique de base qui veut que la sainte liturgie est la prière du Corps Mystique unit au Christ-Tête, adressée au Père.
- ensuite, parce que ce décalage amène à des aberrations totales, comme le fait de s'asseoir pendant le Kyrie, le Gloria ou le Credo, ce qui parfaitement contraire à la Tradition qui exige la position debout pour ces parties de la Messe.

Il y a un décalage légitime (qui n'est en fait que la manifestation de la distinction entre sacerdoce ministériel et sacerdoce baptismal) entre les ministres et le peuple qui est déjà suffisamment souligné par le port des vêtements liturgiques, la séparation entre le cheour et la nef, le fait que certaines prières soient réservées au célébrant etc. Inutile d'en rajouter en créant la situation de deux messes parallèles, ce qui est le cas avec 1962 et qui n'est pas conforme à la Tradition liturgique.

Je précise au passage que ce n'est pas parce qu'une aberration a été pratiquée dans la liturgie catholique pendant plusieurs siècles qu'elle cesse d'être une aberration. Même si la célébration face au peuple devait rester pratique courante dans l'Eglise pendant les trois ou quatre siècles à venir (ce qu'à Dieu ne plaise!), cela n'en fera pas pour autant une pratique liturgique acceptable et conforme à la Tradition.
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