Effectivement...

Le Forum Catholique

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Signo -  2018-04-15 22:58:16

Effectivement...

... on voit bien que le Concile en lui-même n'est responsable en rien de la situation actuelle: il n'a été que le déclencheur d'un effondrement dont l'origine réside dans une crise très profonde que le Concile entendait justement résoudre.

Il est en effet peu probable que le catholicisme d'avant Vatican II -avec son thomisme desséché, sa liturgie sclérosée, ses cadres rigides- était de nature à résister efficacement au mouvement moderne. Seul un retour à la Tradition, à la patristique, une redécouverte du coeur du christianisme aurait permit à l'Eglise de se rajeunir et de perpétuer la foi chrétienne dans un contexte de remise en cause permanente de ses fondements.
Pour résister au libéralisme, au rationalisme, au scientisme, au modernisme, il ne suffisait plus de rester claquemuré derrière d'épaisses murailles et de lancer à la face du monde quelques encycliques de combat rédigées sur un ton vindicatif. Un retour aux sources vives de la Tradition chrétienne était indispensable, retour qui autorisait une plus grande sérénité et donc quelques accommodements sur certains points secondaires avec la modernité. Mais comme le Concile de Trente, il est probable que Vatican II soit arrivé avec au moins un siècle de retard...

Mais pour ce qui est du kaspérisme, il me paraît évident que ces prélats d'Europe occidentale qui versent dans le progressisme font preuve d'un autisme aberrant: ils vivent -ou croient vivre- dans un monde qui n'existe plus. Leurs idées n'intéressent plus personne, et surtout pas la jeunesse. La manière dont ils constatent avec consternation que les jeunes générations de catholiques non seulement ne les suivent plus dans leur progressisme mais encore prennent des chemins opposés, a quelque chose de presque touchant. Ils parlent d'une résurgence d'une conception "maurrassienne" du catholicisme, alors que le phénomène -encore bien souvent gauche et maladroit- de retour des jeunes catholiques aux racines, à une certaine forme de tradition et à une spiritualité plus assumée est un phénomène totalement nouveau qui n'a strictement rien à voir avec les formes de catholicisme réactionnaire que l'on a pu observer en France au cours des deux derniers siècles. Comme ces progressistes, enfermés qu'ils sont dans les schémas mentaux des années 1970, sont incapables de "lire les signes des temps", ils interprètent ce phénomène avec une grille de lecture complètement dépassée.

La réalité est tout autre: en fait, le "projet moderne" (Rémi Brague), y compris dans sa version chrétienne (modernisme théologique du début du XXe siècle, progressisme catholique des années 1970) arrive en bout de course, et son échec apparaît de plus en plus clairement. Les différentes idéologies qui le caractérisent -scientisme, rationalisme, sécularisme, laïcisme, naturalisme, matérialisme- ont accouché d'un monde inhumain, en aboutissant à créer un homme déraciné, dont l'existence est privée de sens et de transcendance, dont la vie quotidienne, marquée par une coupure vis-à-vis du réel et de la nature, est sans goût, sans odeur ni saveur. le rationalisme a fait disparaître le rite qui est pourtant une donnée anthropologique fondamentale, et tué les cultures populaires (cultures régionales) en les réduisant à l'état de folklore sans lien avec la vie. C'est ainsi qu'en l'espace de quelques décennies a disparu un cadre de vie à taille humaine, certes imparfait mais au sein duquel l'individu pouvait avoir une existence "normale". Dans ces conditions, le retour de balancier dans le sens d'un désir de ré-enracinement est inévitable et même parfaitement logique.
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