Quelques références au Magistère ne sont pas inutiles.

Le Forum Catholique

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Scrutator Sapientiæ -  2013-12-25 22:00:02

Quelques références au Magistère ne sont pas inutiles.

Bonsoir et joyeux Noel, Dodom.

1. Le texte intitulé "Celui qui est tué dans l’hérésie ou dans le schisme peut-il être considéré un martyr ?" ne comporte presque aucune référence explicite au Magistère de l'Eglise catholique ; compte tenu des questions abordées, quelques références ne sont peut-être pas inutiles, ce qui ne signifie pas, je le dis prudemment, que je considère que ces références contredisent le texte qui figure sur le site internet concerné.

2. Voici ces quelques références, extraites du Catéchisme de l'Eglise catholique :

A. " Hors de l’Église point de salut

846 Comment faut-il entendre cette affirmation souvent répétée par les Pères de l’Église ? Formulée de façon positive, elle signifie que tout salut vient du Christ-Tête par l’Église qui est son Corps :

Appuyé sur la Sainte Écriture et sur la Tradition, le Concile enseigne que cette Église en marche sur la terre est nécessaire au salut. Seul, en effet, le Christ est médiateur et voie de salut : or, il nous devient présent en son Corps qui est l’Église ; et en nous enseignant expressément la nécessité de la foi et du Baptême, c’est la nécessité de l’Église elle-même, dans laquelle les hommes entrent par la porte du Baptême, qu’il nous a confirmée en même temps. C’est pourquoi ceux qui refuseraient soit d’entrer dans l’Église catholique, soit d’y persévérer, alors qu’ils la sauraient fondée de Dieu par Jésus-Christ comme nécessaire, ceux-là ne pourraient être sauvés (LG 14).

847 Cette affirmation ne vise pas ceux qui, sans leur faute, ignorent le Christ et son Église :

En effet, ceux qui, sans faute de leur part, ignorent l’Évangile du Christ et son Église, mais cherchent pourtant Dieu d’un cœur sincère et s’efforcent, sous l’influence de sa grâce, d’agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, ceux-là peuvent arriver au salut éternel (LG 16 ; cf. DS 3866-3872).

848 " Bien que Dieu puisse par des voies connues de lui seul amener à la foi ‘sans laquelle il est impossible de plaire à Dieu’ (He 11, 6) des hommes qui, sans faute de leur part, ignorent l’Évangile, l’Église a le devoir en même temps que le droit sacré d’évangéliser " (AG 7) tous les hommes. "

B. " Rendre témoignage à la vérité

2471 Devant Pilate le Christ proclame qu’il est " venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité " (Jn 18, 37). Le chrétien n’a pas à " rougir de rendre témoignage au Seigneur " (2 Tm 1, 8). Dans les situations qui demandent l’attestation de la foi, le chrétien doit la professer sans équivoque, à l’exemple de S. Paul en face de ses juges. Il lui faut garder " une conscience irréprochable devant Dieu et devant les hommes " (Ac 24, 16).

2472 Le devoir des chrétiens de prendre part à la vie de l’Église les pousse à agir comme témoins de l’Evangile et des obligations qui en découlent. Ce témoignage est transmission de la foi en paroles et en actes. Le témoignage est un acte de justice qui établit ou fait connaître la vérité (cf. Mt 18, 16) :

Tous les chrétiens, partout où ils vivent, sont tenus de manifester ... par l’exemple de leur vie et le témoignage de leur parole, l’homme nouveau qu’ils ont revêtu par le baptême, et la force du Saint-Esprit qui les a fortifiés au moyen de la confirmation (AG 11).

2473 Le martyre est le suprême témoignage rendu à la vérité de la foi ; il désigne un témoigne qui va jusqu’à la mort. Le martyr rend témoignage au Christ, mort et ressuscité, auquel il est uni par la charité. Il rend témoignage à la vérité de la foi et de la doctrine chrétienne. Il supporte la mort par un acte de force. " Laissez-moi devenir la pâture des bêtes. C’est par elles qu’il me sera donné d’arriver à Dieu " (Ignace d’Antioche, Rom. 4, 1).

2474 Avec le plus grand soin, l’Église a recueilli les souvenirs de ceux qui sont allés jusqu’au bout pour attester leur foi. Ce sont les actes des Martyrs. Ils constituent les archives de la Vérité écrites en lettres de sang :

Rien ne me servira des charmes du monde ni des royaumes de ce siècle. Il est meilleur pour moi de mourir [pour m’unir] au Christ Jésus, que de régner sur les extrémités de la terre. C’est Lui que je cherche, qui est mort pour nous ; Lui que je veux, qui est ressuscité pour nous. Mon enfantement approche .... (S. Ignace d’Antioche, Rom. 6, 1-2).

Je te bénis pour m’avoir jugé digne de ce jour et de cette heure, digne d’être compté au nombre de tes martyrs ... Tu as gardé ta promesse, Dieu de la fidélité et de la vérité. Pour cette grâce et pour toute chose, je te loue, je te bénis, je te glorifie par l’éternel et céleste Grand Prêtre, Jésus-Christ, ton enfant bien-aimé. Par lui, qui est avec Toi et l’Esprit, gloire te soit rendue, maintenant et dans les siècles à venir. Amen (S. Polycarpe, mart. 14, 2-3). "

3. J'ajoute ici ces paragraphes, extraits de Veritatis Splendor (vous savez, la lettre encyclique de Jean-Paul II, publiée en 1993, et qui a été "commémorée" cette année, notamment dans chacun des diocèses de France, dans un silence assourdissant) :

" 89. La foi a aussi un contenu moral : elle est source et exigence d'un engagement cohérent de la vie ; elle comporte et perfectionne l'accueil et l'observance des commandements divins. Comme l'écrit l'évangéliste Jean, « Dieu est Lumière, en lui point de ténèbres. Si nous disons que nous sommes en communion avec lui alors que nous marchons dans les ténèbres, nous mentons, nous ne faisons pas la vérité... A ceci nous savons que nous le connaissons : si nous gardons ses commandements. Qui dit : " Je le connais ", alors qu'il ne garde pas ses commandements, est un menteur, et la vérité n'est pas en lui. Mais celui qui garde sa parole, c'est en lui vraiment que l'amour de Dieu est accompli. A cela nous savons que nous sommes en lui. Celui qui prétend demeurer en lui doit se conduire à son tour comme celui-là s'est conduit » (1 Jn 1, 5-6 ; 2, 3-6).

Par la vie morale, la foi devient « confession », non seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes : elle se fait témoignage. « Vous êtes la lumière du monde — a dit Jésus. Une ville ne se peut cacher, qui est sise au sommet d'un mont. Et l'on n'allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais bien sur le lampadaire, où elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. Ainsi votre lumière doit-elle briller devant les hommes afin qu'ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux » (Mt 5, 14-16). Ces œuvres sont surtout celles de la charité (cf. Mt 25, 31-46) et de la liberté authentique qui se manifeste et vit par le don de soi. Jusqu'au don total de soi, comme l'a fait Jésus qui, sur la Croix, « a aimé l'Eglise et s'est livré pour elle » (Ep 5, 25). Le témoignage du Christ est source, modèle et appui pour le témoignage du disciple, appelé à prendre la même route : « Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix chaque jour, et qu'il me suive » (Lc 9, 23). La charité, selon les exigences du radicalisme évangélique, peut amener le croyant au témoignage suprême du martyre. Et cela, toujours en suivant l'exemple de Jésus qui meurt sur la Croix : « Cherchez à imiter Dieu, comme des enfants bien-aimés — écrit Paul aux chrétiens d'Ephè- se —, et suivez la voie de l'amour, à l'exemple du Christ qui nous a aimés et s'est livré pour nous, s'offrant à Dieu en sacrifice d'agréable odeur » (Ep 5, 1-2).

Le martyre, exaltation de la sainteté inviolable de la Loi de Dieu

90. Le rapport entre la foi et la morale resplendit de tout son éclat dans le respect inconditionnel dû aux exigences absolues de la dignité personnelle de tout homme, exigences soutenues par les normes morales interdisant sans exception tous les actes intrinsèquement mauvais. L'universalité et l'immutabilité de la norme morale manifestent et protègent en même temps la dignité personnelle, c'est-à-dire l'inviolabilité de l'homme sur qui brille la splendeur de Dieu (cf. Gn 9, 5-6).

Le fait du martyre chrétien, qui a toujours accompagné et accompagne encore la vie de l'Eglise, confirme de manière particulièrement éloquente le caractère inacceptable des théories éthiques, qui nient l'existence de normes morales déterminées et valables sans exception.

91. Dans l'Ancienne Alliance, nous rencontrons déjà d'admirables témoignages d'une fidélité à la Loi sainte de Dieu, poussée jusqu'à l'acceptation volontaire de la mort. L'histoire de Suzanne est exemplaire à cet égard : aux deux juges iniques qui menaçaient de la faire mourir si elle avait refusé de céder à leur passion impure, elle répondit : « Me voici traquée de toutes parts : si je cède, c'est pour moi la mort, si je résiste, je ne vous échapperai pas. Mais mieux vaut pour moi tomber innocente entre vos mains que de pécher à la face du Seigneur ! » (Dn 13, 22-23). Suzanne, qui préférait « tomber innocente » entre les mains des juges témoigne non seulement de sa foi et de sa confiance en Dieu, mais aussi de son obéissance à la vérité et à l'absolu de l'ordre moral : par sa disponibilité au martyre, elle proclame qu'il n'est pas juste de faire ce que la Loi de Dieu qualifie comme mal pour en retirer un bien quel qu'il soit. Elle choisit pour elle-même la « meilleure part » : un témoignage tout à fait limpide, sans aucun compromis, rendu à la vérité sur le bien et au Dieu d'Israël ; elle montre ainsi, par ses actes, la sainteté de Dieu.

Au seuil du Nouveau Testament, Jean Baptiste, se refusant à taire la Loi du Seigneur et à se compromettre avec le mal, « a donné sa vie pour la justice et la vérité » 142, et il fut ainsi précurseur du Messie jusque dans le martyre (cf. Mc 6, 17-29). C'est pourquoi « il est enfermé dans l'obscurité d'un cachot, lui qui était venu rendre témoignage à la lumière et qui avait mérité d'être appelé flambeau ardent de la lumière par la Lumière elle-même qui est le Christ 1. Par son propre sang est baptisé celui à qui fut donné de baptiser le Rédempteur du monde » 143.

Dans la Nouvelle Alliance, on rencontre de nombreux témoignages de disciples du Christ — à commencer par le diacre Etienne (cf. Ac 6, 8 à 7, 60) et par l'Apôtre Jacques (cf. Ac 12, 1-2) — qui sont morts martyrs pour confesser leur foi et leur amour du Maître et pour ne pas le renier. Ils ont ainsi suivi le Seigneur Jésus qui, devant Caïphe et Pilate, « a rendu son beau témoignage » (1 Tm 6, 13), confirmant la vérité de son message par le don de sa vie. D'autres innombrables martyrs acceptèrent la persécution et la mort plutôt que d'accomplir le geste idolâtrique de brûler de l'encens devant la statue de l'empereur (cf. Ap 13, 7-10). Ils allèrent jusqu'à refuser de simuler ce culte, donnant ainsi l'exemple du devoir de s'abstenir même d'un seul acte concret contraire à l'amour de Dieu et au témoignage de la foi. Dans l'obéissance, comme le Christ lui-même, ils confièrent et remirent leur vie au Père, à celui qui pouvait les sauver de la mort (cf. He 5, 7).

L'Eglise propose l'exemple de nombreux saints et saintes qui ont rendu témoignage à la vérité morale et l'ont défendue jusqu'au martyre, préférant la mort à un seul péché mortel. En les élevant aux honneurs des autels, l'Eglise a canonisé leur témoignage et déclaré vrai leur jugement, selon lequel l'amour de Dieu implique obligatoirement le respect de ses commandements, même dans les circonstances les plus graves, et le refus de les transgresser, même dans l'intention de sauver sa propre vie.

92. Dans le martyre vécu comme l'affirmation de l'inviolabilité de l'ordre moral, resplendissent en même temps la sainteté de la Loi de Dieu et l'intangibilité de la dignité personnelle de l'homme, créé à l'image et à la ressemblance de Dieu : il n'est jamais permis d'avilir ou de contredire cette dignité, même avec une intention bonne, quelles que soient les difficultés. Jésus nous en avertit avec la plus grande sévérité : « Que sert à l'homme de gagner le monde entier, s'il ruine sa propre viC ? » (Mc 8, 36).

Le martyre dénonce comme illusoire et fausse toute « signification humaine » que l'on prétendrait attribuer, même dans des conditions « exceptionnelles », à l'acte en soi moralement mauvais ; plus encore, il en dévoile clairement le véritCble visage, celui d'une violation de l'« humanité » de l'homme, plus en celui qui l'accomplit qu'en celui qui le subit 144. Le martyre est donc aussi l'exaltation de l'« humanité » parfaite et de la « vie » véritable de la personne, comme en témoigne aint Ignace d'Antioche quand il s'adresse aux chrétiens de Rome, le lieu de son martyre : « Pardonnez-moi, frères ; ne m'empêchez pas de vivre, ne veuillez pas que je meure... Laissez-moi recevoir la pure lumière ; quand je serai arrivé là, je serai un h mme. Permettez-moi d'être un imitateur de la passion de mon Dieu » 145.

93. Le martyre est enfin signe éclatant de la sainteté de l'Eglise : la fidélité à la Loi sainte de Dieu, à laquelle il est rendu témoignage au prix de la mort, est une proclamatCon solennelle et un engagement missionnaire usque ad sanguinem pour que la splendeur de la vérité morale ne soit pas obscurcie dans les mœurs et les mentalités des personnes et de la société. Un tel témoignage a une valeur extraordinaire en ce qu'il contribue, non seulement dans la société civile, mais aussi à l'intérieur des communautés ecclésiales elles-mêmes, à éviter que l'on ne sombre dans la crise la plus dangereuse qui puisse affecter l'homme : la confusion du bien et du mal qui rend impossible d'établir et de maintenir l'ordre moral des individus et des communautés. Les martyrs et, plus généralement, tous les saints de l'Eglise, par l'exemple éloquent et attirant d'une vie totalement transfigurée par la splendeur de la vérité morale, éclairent toutes les époques de l'histoire en y réveillant le sens moral. Rendant un témoignage sans réserve au bien, ils sont un vivant reproche pour ceux qui transgressent la loi (cf. Sg 2, 12) et ils donnent une constante actualité aux paroles du prophète : « Malheur à ceux qui appellent le mal bien et le bien mal, qui font des ténèbres la lumière et de la lumière les ténèbres, qui font de l'amer le doux et du doux l'amer » (Is 5, 20).

Si le martyre représente le sommet du témoignage rendu à la vérité morale, auquel relativement peu de personnes sont appelées, il n'en existe pas moins un témoignage cohérent que tous les chrétiens doivent être prêts à rendre chaque jour, même au prix de souffrances et de durs sacrifices. En effet, face aux nombreuses difficultés que la fidélité à l'ordre moral peut faire affronter même dans les circonstances les plus ordinaires, le chrétien est appelé, avec la grâce de Dieu implorée dans la prière, à un engagement parfois héroïque, soutenu par la vertu de force par laquelle — ainsi que l'enseigne saint Grégoire le Grand — il peut aller jusqu'à « aimer les difficultés de ce monde en vue des récompenses éternelles » 146.

94. Dans ce témoignage rendu au caractère absolu du bien moral, les chrétiens ne sont pas seuls : ils se trouvent confirmés par le sens moral des peuples et par les grandes traditions religieuses et sapientiales de l'Occident et de l'Orient, non sans une action intérieure et mystérieuse de l'Esprit de Dieu. Cette réflexion du poète latin Juvénal s'applique à tous : « Considère comme le plus grand des crimes de préférer sa propre vie à l'honneur et, pour l'amour de la vie physique, de perdre ses raisons de vivre » 147. La voix de la conscience a toujours rappelé sans ambiguïté qu'il y a des vérités et des valeurs morales pour lesquelles on doit être disposé à donner jusqu'à sa vie. Dans les paroles qui défendent les valeurs morales et surtout dans le sacrifice de la vie pour les valeurs morales, l'Eglise reconnaît le témoignage rendu à cette vérité qui, déjà présente dans la création, resplendit en plénitude sur le visage du Christ : « Chaque fois — écrit saint Justin — que les adeptes des doctrines stoïciennes ont 1 fait preuve de sagesse dans leur discours moral à cause de la semence du Verbe présente dans tout le genre humain, ils ont été, nous le savons, haïs et mis à mort » 148. "

Je vous souhaite une bonne nuit et vous dis à bientôt.

Scrutator.
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