non justement et vous détaillez des faits qui contredisent votre "continuité"

Le Forum Catholique

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Luc Perrin -  2013-11-08 01:48:25

non justement et vous détaillez des faits qui contredisent votre "continuité"

Je conteste que Bugnini ait été un élément essentiel de la Commission sous Pie XII : il était le secrétaire, au sens propre du terme. Vous avez omis le Père Bea sj déjà impliqué pour son édition nouvelle du Psautier.

Je maintiens que le Memoria de 1947 a eu comme co-auteurs Antonelli et Loew (que j'avais oublié à ce stade) mais il me semble que le premier l'emporte ; de toute façon, peu importe car le tandem Loew-Antonelli diverge justement d'avec Bugnini après 1960.

On ne peut se fier entièrement et uniquement à une seule source : le plaidoyer pro-domo rédigé par Mgr Bugnini ; déjà l'édition Martimort a corrigé beaucoup et ajouté énormément. Le travail fait à partir du Journal, hélas en partie détruit par ... un Bugniniste (!) du cardinal Antonelli, permet d'équilibrer les points de vue.

Comme vous le dîtes, ce qui va dans mon sens, Bugnini a reçu une responsabilité majeure à partir de 1964 au sein du Consilium par le fait de la folle confiance aveugle de Paul VI. C'est après le vote de la constitution sur la liturgie, dans laquelle il a joué un rôle mineur, ayant été marginalisé entre 1962 et début 1964.
Les Mémoires toujours inédits du Père Bouyer montrent que ce Consilium lui-même fut plus divisé qu'on ne le dit mais que Bugnini a manoeuvré tout le monde, y compris le cardinal Lercaro, y compris dom Gut qui s'en désolait, y compris Paul VI qui mit des années à s'en rendre compte pas avant 1974 pour notre malheur à tous.

Il est parfaitement faux d'établir une continuité mécanique entre 1947-1960 et 1964-1974.
Il est également faux de prétendre que les réformateurs avaient tous les mêmes idées et mêmes projets. C'est oublier le clivage Antonelli-Loew (hélas décédé brutalement en 1962) contre Bugnini.
C'est oublier que le cardinal Larraona en 1962, mécontent du schéma pré-conciliaire mis en oeuvre par Bugnini, avait demandé à Antonelli-Loew de rédiger des amendements : le décès du P. Loew a réduit à presque néant cette ultime tentative qui montrait la défiance installée entre les anciens membres de la Commission de Pie XII.
En 1962, déjà le Père Bouyer fait part de son désaccord avec la tendance bugniniste à l'oeuvre au C.P.L. futur C.N.P.L. : toujours le même clivage au sein des réformateurs. Joseph Ratzinger, comme cardinal, est l'héritier du groupe Antonelli-Loew-Bouyer et de Guardini et pas du tout en phase avec la lignée Bugnini qui a les faveurs du pape actuel plutôt.

Certes tous sont d'accord contre Mgr Gromier et pour poursuivre les réformes lancées sous saint Pie X mais le groupe vaincu Antonelli-Loew-Bouyer etc. voulait rester dans le développement organique au maximum ; le groupe vainqueur Bugnini et ses disciples (très influents toujours) voulait une rupture.
S'ajoute à ce clivage fondamental, une différence radicale de contexte : l'idée qu'on peut tout expérimenter, que les rubriques sont haïssables, que l'autorité est inutile en liturgie, que la Tradition est un poids mort à supprimer, tout cela prévaut en 1964-1974 mais pas du tout en 1947-1960.

Enfin rappelons le témoignage, peu suspect traditionalisme de Mgr Elchinger, évêque-coadjuteur de Strasbourg, quelques semaines avant l'ouverture du Concile en 1962 : il rencontre le pape Jean XXIII qui s'accorde avec lui pour une "réforme de la liturgie". Oui dit le bon pape Jean, on pourrait supprimer ... le dernier évangile !
Voilà la pensée réformatrice du pape Jean ... plus traditionaliste que Mgr Lefebvre à la même époque.

A trop vouloir lire l'histoire à rebours, en commençant en 2013 pour comprendre 1951, on se trompe lourdement. Les divergences, à mon sens, l'emportent sur les convergences qui existent aussi, je ne l'ai jamais nié. La proportion est toutefois déterminante : une dose homéopathique et une dose massive n'ont pas le même effet sur l'organisme ; même si c'est un cocktail de substances identiques. Dans le 1er cas, on peut guérir, dans le second mourir ou rester avec de grosses séquelles.

nb. la section compétente de la SC des Rites fut tenue à l'écart par la volonté du pape Pie XII qui savait l'hostilité viscérale des bureaux à toute réforme et leur compétence restreinte en la matière.
C'est bien pourquoi le Mémoire envisageait une oeuvre distincte.
La défiance a persisté et Paul VI a créé de même le Consilium (1964) contre la SC des Rites toujours présidée par le cardinal Larraona, d'autant plus que celui-ci s'étant signalé très fortement aux côtés de la Minorité, il n'avait plus les faveurs du pape après la mort de Jean XXIII qui, lui, estimait le Cardinal clarétain. Là encore le contexte n'est pas le même 1947/1964.

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