selon st. thomas

Le Forum Catholique

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John L -  2013-04-08 01:53:15

selon st. thomas

Il repond (Compendium theologiae livre 1 ch. 183):

"A celui qui peut être corrigé on inflige une peine temporelle pour sa correction ou amendement. Si, donc quelqu’un ne peut être corrigé, mais que sa volonté reste obstinément affermie dans le péché, comme on l’a dit des damnés (chapitre 174 et 175), sa peine ne peut avoir de terme final."

Dans son commentaire sur les sentences de Pierre Lombard (livre IV d. 46 q. 1 a. 3 co.) il dit:

1. Il semble qu’une peine éternelle ne soit pas infligée aux pécheurs en vertu de la justice divine. En effet, la peine ne doit pas dépasser la faute. Dt 25, 5 : Les plaies seront à la mesure de la faute. Or, la faute est temporelle. La peine ne doit donc pas être éternelle.
3. Une peine n’est infligée par un juste juge qu’en vue de la correction ; aussi est-il dit dans Éthique, II, que les peines sont des remèdes. Or, que des impies soient punis pour l’éternité, cela ne sert pas à les corriger, pas davantage que d’autres maux, puisqu’alors, il n’y en aura pas d’autres qui pourront être corrigés à l’avenir. Une peine éternelle n’est donc pas infligée selon la justice divine.

Puisque la peine comporte une double quantité : selon l’intensité de la haine et selon la durée dans le temps, la quantité de la peine correspond à la quantité de la faute selon l’intensité de la haine, de sorte qu’à celui qui a péché plus gravement, une peine plus grave est infligée. Ainsi Ap 18, 7 dit : À la mesure de sa gloire et de ses plaisirs, donnez-lui tourments et malheurs ! Mais la durée de la peine ne correspond pas à la durée de la faute, comme le dit Augustin dans La cité de Dieu, XXI. En effet, l’adultère, qui est perpétré dans un moment du temps, n’est pas puni d’une peine momentanée selon les lois humaines, mais la durée de la peine concerne la disposition de celui qui pèche. En effet, parfois celui qui pèche dans une ville devient digne, par son péché même, d’être totalement écarté de la participation à la cité, soit par l’exil perpétuel, soit aussi par la mort. Mais, parfois, il n’est pas rendu digne d’être totalement exclu de la société des citoyens. Aussi, pour qu’il puisse être un membre convenable de la cité, sa peine est-elle remise ou abrégée, selon qu’il convient à sa correction, afin qu’il puisse vivre convenanblement et pacifiquement dans la cité. De même aussi, selon la justice divine, quelqu’un est rendu digne par son péché d’être complètement écarté de la participation à la cité de Dieu, ce qui se produit pour tout péché par lequel quelqu’un pèche contre la charité, qui est le lien unissant la cité mentionnée. C’est ainsi qu’en raison d’un péché mortel, qui est contraire à la charité, quelqu’un est éternellement exclu de la société des saints par une peine éternelle, car, comme le dit Augustin dans le livre déjà mentionné, « ainsi que les hommes sont écartés de cette cité mortelle par le supplice de la première mort, de même sont-ils écartés de cette cité immortelle par le supplice de la seconde mort ». Mais que la peine infligée par la cité de ce monde ne soit pas considérée comme perpétuelle, cela est accidentel, pour autant que l’homme ne vit pas éternellement ou pour autant que la cité elle-même disparaît. Si l’homme vivait éternellement, les peines de l’exil et de l’esclavage qui sont infligées par la loi humaine demeureraient donc pour lui à perpétuité. Mais, quant à ceux qui pèchent de manière à ne pas être rendus dignes d’être entièrement séparés de la participation à la cité sainte, comme c’est le cas de ceux qui pèchent véniellement, leur peine sera d’autant plus brève ou prolongée qu’ils pourront être plus ou moins purifiés, dans la mesure où leurs péchés ont plus ou moins adhéré à eux, ce qui est appliqué aux peines de ce monde et à celles du purgatoire selon la justice divine. On trouve aussi d’autres raisons invoquées par les saints pour lesquelles certains sont punis d’une peine éternelle pour un péché temporel. L’une est qu’ils ont péché contre le bien éternel lorsqu’ils ont méprisé la vie éternelle : c’est ce que dit Augustin dans le livre déjà mentionné : « Il est devenu digne d’un mal éternel parce qu’il a détruit en lui un bien qui pouvait être éternel. » Une autre raison est que l’homme a péché dans sa propre éternité ; aussi Grégoire dit-il dans les Dialogues, IV : « C’est une grande justice de la part de celui qui juge que ceux qui n’ont jamais voulu que le péché leur fasse défaut, que le supplice ne leur fasse jamais défaut. » Et si l’on objecte que certains qui pèchent mortellement se proposent d’améliorer leur vie un jour, et ainsi qu’ils ne seraient pas dignes d’un supplice éternel, semble-t-il, Grégoire parle de la volonté qui se manifeste par l’action. En effet, celui qui est tombé dans le péché mortel de sa propre volonté se place dans un état dont il ne peut être tiré que s’il est aidé par Dieu. Par le fait même qu’il veut pécher, il veut donc par conséquent rester éternellement dans le péché. En effet, l’homme est un esprit qui va, à savoir, dans le péché, et qui ne revient pas, par lui-même, comme si quelqu’un se jetait dans une fosse, dont il ne pourrait sortir qu’avec de l’aide ; on pourrait dire qu’il veut y rester éternellement, même s’il pensait autrement. Ou l’on peut dire et mieux, que par le fait même qu’il pèche mortellement, il a établi sa fin dans la créature ; et parce que toute sa vie est ordonnée à sa fin, il ordonne par le fait même sa vie à ce péché et il voudrait demeurer perpétuellement dans le péché, s’il le pouvait impunément. C’est ce que Grégoire dit dans les Morales, XXXIV, de Jb 41 : « Il estimera que la vieillesse est un abîme. Les impies ont péché avec une fin, parce qu’ils ont vécu avec la fin. Ils auraient voulu vivre sans fin afin de pouvoir demeurer sans fin dans l’iniquité, car ils désirent davantage pécher que vivre. » On peut aussi invoquer une autre raison pour laquelle la peine du péché mortel est éternelle, car on pèche par elle contre Dieu qui est infini. Puisqu’il ne peut y avoir de peine infinie en intensité, car la créature n’est pas capable d’une qualité infinie, il est nécessaire qu’elle soit infinie au moins par la durée. Il y a aussi une quatrième raison pour la même chose : la faute demeure pour l’éternité, puisque la faute ne peut être remise sans la grâce, que l’homme ne peut acquérir après la mort, et que la peine ne doit pas cesser aussi longtemps que la faute demeure.

1. Comme on l’a déjà dit, la peine ne doit pas être égale à la faute par la quantité de la durée, comme cela semble se produire aussi selon les lois humaines. Ou bien il faut dire, comme répond Grégoire, que bien que la faute soit temporelle en acte, elle est cependant éternelle par la volonté, comme on l’a déjà exposé.

3. Les peines qui sont infligées à ceux qui ne sont pas complètement chassés de la société de la cité sont ordonnées à leur correction ; mais les peines par lesquelles certains sont entièrement écartés de la société de la cité ne sont pas destinées à leur correction. Elles peuvent cependant servir à la correction et à la tranquillité de ceux qui demeurent (corr. remanet/remanent) dans la cité. Ainsi, la damnation éternelle des impies est destinée à la correction de ceux qui sont maintenant dans l’Église : en effet, les peines ne sont pas destinées seulement à la correction lorsqu’elles sont infligées, mais aussi lorsqu’elles sont déterminées.



Il y a un discussion en anglais de cette question ici:

The Justice and Goodness of Hell
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