La construction de l’homme intérieur (Accompagnement spirituel)

Le Forum Catholique

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Véronique (Lala) -  2011-10-06 14:06:04

La construction de l’homme intérieur (Accompagnement spirituel)

I – La construction de l’homme intérieur

Puisque toute la vie chrétienne est notre configuration à Jésus, le sens de notre cheminement est notre identification à lui dans la plénitude de son mystère. La forme la plus profonde et la plus dynamisante de l’indentification est celle qui a pour objet le commandement de l’amour. En nous donnant l’ordre d’aimer, Jésus nous fait le don de la capacité de nous donner. Toute l’originalité de la vie chrétienne tient à la reprise du donné humain dans l’ordre de la charité. La vie de foi nous laisse tout entiers dans notre condition humaine ordinaire, mais elle nous ouvre, par le dynamisme de la charité, au mystère de Dieu par la médiation de nos proches. Le cheminement dans la foi ne nous dispense en rien d’une approche humaine de notre expérience à un plan pratique et théorique.

L’esquisse que nous allons proposer ne préjuge en rien d’une théorie psychologique de la constitution de la personnalité et de sa structure. L’approche de la théologie spirituelle ne remplace ni ne concurrence une approche humaine correctement centrée. Il s’agit plutôt de dégager et de mettre en lumière le mystère de l’origine et de l’horizon que les préoccupations de la vie quotidienne tendent habituellement à voiler. Une approche proprement psychologique centre notre histoire personnelle sur l’identification à nos parents. Sans méconnaître cette donnée qui nous constitue en notre filiation, l’expérience spirituelle fait apparaître un fond plus originaire qui tient à notre filiation divine adoptive en Jésus. Par la foi et le baptême, Jésus vient à nous pour nous habiter et assumer les actes de notre vie. Il est plus intérieur à nous-mêmes que nous-mêmes et il fait de son propre cœur le centre de notre vie. Tout tient dans la plénitude du mystère de Jésus en tant que Fils unique du Père, Homme parfait, notre Frère aîné.

La mouvement de fond de Jésus en notre vie est de nous attirer vers le Père. Toute la vie de Jésus, en tant que Fils de la tendresse du Père (Col 1, 13), est passion d’amour pour le Père. Que nous en ayons conscience ou non, notre vie profonde se joue dans notre relation à Dieu le Père de par notre disponibilité à son appel, un instant après l’autre. En son fond, la relation spirituelle en toutes ses composantes est l’expérience partagée de la paternité de Dieu. Rien n’est plus urgent aujourd’hui que tout ce qui peut contribuer à la reconnaissance de notre filiation. Or nous ne pouvons recevoir et découvrir notre filiation qu’en vivant et en nous développant dans un milieu fraternel. Jésus vient à nous comme le frère aîné d’une multitude de frères. Il se donne à nous dans la communauté de ses disciples : l’Église. Il est à la fois la Tête du corps mystique et la totalité de ce corps. Par la foi, et le baptême qui l’enracine dans la plénitude de l’Église, nous recevons notre identité la plus personnelle en nous reconnaissant membres du Corps mystique du Christ. La vie sacramentelle fait de l’histoire de l’Église notre mémoire la plus profonde, source de tous nos actes.

Pour recevoir la vie de Jésus que l’Église nous transmet, nous devons travailler à construire une cellule du Corps mystique du Christ. En nous, l’homme intérieur tend à sa maturité en contribuant à construire le Corps mystique jusqu’à sa plénitude (Ep 4, 13). La réalité de référence de l’accompagnement est d’amener une personne à se situer au plein cœur de l’Église.

Jésus ressuscité est l’Agneau conduisant tout le troupeau vers la source des eaux vives qui est Dieu le Père (Ap 7, 17 ; Jr 2, 13). En donnant sa vie pour nous, il devient notre chef et notre pasteur. Aujourd’hui, notre identification à Jésus dans son ministère de Berger se réalise dans notre obéissance à celui qui tient lieu et place de Jésus comme berger dans notre communauté de vie, dans notre Église locale et dans l’Église en sa catholicité. C’est par l’humilité et l’obéissance que nous recevons la plénitude de la lumière du Verbe dans l’enseignement de l’Église. Notre relation de confiance et d’obéissance, envers celui qui exerce le ministère de Pierre, nous plonge au plein cœur de la communion des saints et nous donne notre juste relation avec tous les membres du Corps mystique, sur la terre comme au ciel. La pratique de l’accompagnement, comme l’exercice de tous les charismes et ministères, suppose la communion avec l’Église en sa catholicité.

La seule arme du Ressuscité est la vérité : le glaive à double tranchant (He 4, 12 ; Ap 1, 16 ; 2, 12). Aujourd’hui, le berger est pour nous celui qui témoigne de l’Évangile comme loi de vie. L’accompagnateur ne peut aider une personne à reconnaître la loi de vie enseignée par l’Église que dans la mesure où il est lui-même assujetti à cette loi. La forme la plus élaborée de l’identification est celle qui nous tourne vers la parole de l’ordre, le commandement, et qui fait de nous des sujets responsables et créateurs. En fait, tout le mystère de la construction de l’homme intérieur, qui est notre naissance à la vérité, se joue dans notre travail aujourd’hui pour la construction de l’Église. La relation spirituelle est un maillon dans un immense tissu vivifiant. Le fond de notre vie filiale consiste à faire mémoire des bienfaits de Dieu dans l’histoire du salut. Le secret de notre personnalité est notre mémoire filiale qui nous permet, à travers nos parents et notre milieu de vie, de nous recevoir sans cesse de Dieu dans le mystère de l’Église.


Père Jean-Claude SAGNE
Accompagnement spirituel & vie d’oraison
Éditions des Béatitudes
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