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"Débat sur le Concile Vatican II" Imprimer
Auteur : Cristo
Sujet : "Débat sur le Concile Vatican II"
Date : 2010-12-24 14:26:16

texte intéressant. A verser au débat.




Débat sur le Concile Vatican II

Vient de paraître en Italie, il y a quelques jours, le dernier ouvrage du Professeur Roberto de Mattei, Il Concilio Vaticano II. Una storia mai scritta(Le Concile Vatican II, une histoire jamais écrite), éditions Lindau. Ce livre a suscité un large débat dans lequel sont intervenus des apologètes de renom tels que Francesco Agnoli, Mario Palmaro, Alessandro Gnocchi, Corrado Gnerre, qui se sont exprimés en faveur des thèses du Prof. de Mattei, alors que l’historien progressiste de l’école de Bologne, Alberto Melloni, et le sociologue modéré Massimo Introvigne se sont exprimés contre.Le Prof. de Mattei est intervenu dans le débat avec un article, publié dans le quotidien “Libero” le 12 décembre, que nous reproduisons ci-dessous.

Quarante-cinq ans sont passés depuis la conclusion du Concile Vatican II, le vingtième dans l’histoire de l’Eglise, mais les problèmes qu’il a entraînés sont encore présents et actuels. Un premier problème dont on discute est celui du rapport entre la « lettre » (les textes) et l’« esprit » du Concile, respectivement opposés entre les deux écoles de la continuité et de la discontinuité. Le différend, cependant, risque de se réduire à un dialogue de sourds. Les documents promulgués par les suprêmes autorités ecclésiastiques n’ont pas, en effet, la même valeur du point de vue théologique. Si Benoît XVI exprime ses opinions dans une interview, comme cela s’est passé lors de la parution de son dernier livre Lumière du monde, il est évident qu’il faut les accueillir avec le plus grand respect, car celui qui parle est, de toute manière, le Vicaire du Christ. Il est également évident qu’entre l’interview et la définition d’un dogme il y une différence d’autorité qui n’engage pas, au même niveau, le respect des fidèles. C’est ce qui arrive aussi pour un Concile tel que le Vatican II qui, en tant que réunion solennelle des évêques unis au Pape, a proposé des enseignements authentiques certainement pleins d’autorité. Mais seulement ceux qui ignorent la théologie pourraient accorder un degré d’“infaillibilité” à ces enseignements. Même parmi les catholiques, pas tous savent que l’infaillibilité papale est utilisé très rarement et s’applique seulement à la foi et à la morale.

Si le Concile a l’autorité que le Pape qui le convoque et le dirige veut lui donner, tous les discours de Jean XXIII et de Paul VI, avant, durant et après le Concile Vatican II, en soulignent la dimension, non pas dogmatique, mais pastorale. Ce même but pastoral, étranger à toute définition dogmatique, est attribué aux documents conciliaires par Benoît XVI, dont l’“herméneutique de la continuité” est très mal interprétée par beaucoup de catholiques, tant progressistes que conservateurs. L’affirmation même selon laquelle le Concile Vatican II doit être considéré comme en continuité avec le Magistère de l’Eglise présuppose évidemment l’existence dans les documents conciliaires de passages douteux ou ambigus, ayant besoin d’une interprétation. Pour Benoît XVI, le critère d’interprétation de ces passages ne peut qu’être la Tradition de l’Eglise, comme il l’a maintes fois affirmé lui-même. Si, par contre, comme l’estiment les promoteurs du site web Vive le Concile, on admettait que le Concile Vatican II était le critère herméneutique pour relire la Tradition, il faudrait donner, paradoxalement, une force interprétative à ce qui a besoin d’être interprété. Interpréter la Tradition à la lumière du Concile Vatican II, et non pas l’inverse, ne serait possible que si l’on acceptait la position d’Alberigo (auteur d’une œuvre monumentale Storia del Vaticano II, en 5 volumes), qui donne une valeur interprétative non pas aux textes, mais à l’esprit du Concile. Mais ceci, bien entendu, n’est pas la position de Benoît XVI, qui critique l’herméneutique de la discontinuité, justement pour la suprématie qu’elle accorde à l’esprit sur les textes. Mgr Gherardini, professeur émérite d’ecclésiologie à l’Université du Latran, dans son livre Le Concile Oecuménique Vatican II, un débat à ouvrir (2009), a bien développé le bon critère de l’herméneutique théologique. Soit l’on estime, comme Gherardini, que les propositions du Concile Vatican II, non liées à des définitions précédentes, ne sont ni infaillibles ni irréformables et donc même pas contraignantes, soit l’on accorde au Concile une autorité telle qu’elle éclipse les vingt autres assises précédentes de l’Eglise, les abrogeant ou les remplaçant. Sur ce dernier point, il paraît qu’il n’y a pas de différence entre les historiens de l’école de Bologne, comme le prof. Alberto Melloni, et les sociologues, comme Massimo Introvigne, qui semblent donner une valeur d’infaillibilité au Concile Vatican II.

Il y a pourtant un deuxième problème qui va au-delà de la discussion sur la continuité/discontinuité des textes conciliaires et ne concerne pas le domaine théologique, mais le domaine historique. C’est le sujet auquel j’ai voulu apporter une contribution dans mon récent livre, Il Concilio Vaticano II. Una storia mai scritta, publié par les éditions Lindau en décembre 2010. Dans cet ouvrage, je ne propose pas une lecture théologique des textes, au sens d’en évaluer la continuité ou la discontinuité avec la Tradition de l’Eglise, mais une reconstruction historique de ce qui se passa à Rome entre le 11 octobre 1962 et le 8 décembre 1965. Il s’agit d’un travail complémentaire à l’approche théologique et qui ne devrait donner du souci à personne. On ne comprend pas en effet les réactions préoccupées de ceux qui craignent que cette histoire puisse apporter de l’eau au moulin de l’herméneutique de la discontinuité. Faudrait-il alors renoncer à écrire l’histoire du Concile Vatican II ? Ou faudrait-il admettre que seule l’école de Bologne a le droit de l’écrire, elle qui a offert des contributions certes remarquables, mais idéologiquement tendancieuses ? Et si des éléments de discontinuité devaient émerger, sur le plan historique, pourquoi craindre leur divulgation ? Comment nier une discontinuité, non pas dans les contenus, mais dans le nouveau langage du Concile Vatican II ? Un langage fait non seulement de déclarations, mais aussi de gestes, de silences et d’omissions, qui peuvent révéler les tendances profondes d’un événement encore plus que le contenu des textes. L’histoire de l’inexplicable silence sur le communisme, par exemple, de la part d’un Concile qui aurait dû s’occuper des faits du monde, ne peut pas être ignorée.

L’historien qui se prépare à cette tâche ne peut pas isoler les textes du Concile Vatican II du contexte historique au sein duquel ils furent produits, car c’est justement du contexte qu’il s’occupe en tant qu’historien. De même, le Concile Vatican II ne peut pas être présenté comme un événement qui ne concerne que trois années de l’histoire de l’Eglise, sans en considérer les racines profondes et les conséquences également profondes qu’il eut dans l’Eglise et dans la société.

La prétention de séparer le Concile du post-Concile est aussi insoutenable que celle de séparer les textes conciliaires du contexte pastoral où ils furent écrits. Aucun historien sérieux et même aucune personne de bon sens ne pourrait accepter cette séparation artificielle qui naît d’un pur parti pris et non d’une sereine et objective évaluation des faits. Encore aujourd’hui, nous vivons les conséquences de la « Révolution conciliaire » qui anticipa et accompagna celle de Mai 68. Pourquoi le cacher ? L’Eglise, comme l’affirma Léon XIII, ouvrant aux chercheurs les Archives Secrètes du Vatican, « ne doit pas craindre la vérité ». (R. d. M.)

Source :
Correspondance européenne n. 227 du 20 décembre 2010

CE 227/01
lettre de diffusion de Correspondance européenne. Voir son site.


La discussion

 "Débat sur le Concile Vatican II", de Cristo [2010-12-24 14:26:16]
      Il y a eu "infaillibilisation" des point [...], de Scrutator Sapientiæ [2010-12-25 10:22:06]