Le Forum Catholique

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images/icones/carnet.gif  ( 653318 )2012:année maçonnique par Jean Kinzler (2012-12-08 12:27:21) 

Le retour aux affaires des socialistes, après dix ans d'absence, est une excellente nouvelle pour les obédiences maçonniques, au premier rang desquelles le Grand Orient de France, qui entendent bien peser à nouveau sur le débat politique. Mais discrètement... Décryptage.

«Nous voulons refonder l'école de la République. Et nous voulons refonder la République par l'école!» En cette soirée du 16 novembre, debout derrière le pupitre de l'orateur, dans le grand temple Groussier du Grand Orient de France (GO), au siège parisien de l'obédience, rue Cadet (Paris IXe), Vincent Peillon, le ministre de l'Éducation nationale, sait que l'assistance, composée essentiellement de francs-maçons, lui est acquise. Sans notes, ce philosophe de formation plaide durant une trentaine de minutes pour le retour d'un pouvoir spirituel républicain - celui de la connaissance et d'une certaine «morale laïque» - dont les enseignants seraient les messagers. «L'école doit surmonter la crise de l'avenir et celle de l'identité nationale», lance le ministre avec fougue. Dans le temple, les frères et soeurs écoutent avec ferveur ce discours d'un «profane» qui leur va droit au coeur. Sans être franc-maçon, Vincent Peillon a beaucoup écrit sur la pensée de Ferdinand Buisson, le bras droit du frère Jules Ferry, père de l'instruction publique en France, et sur Pierre Leroux, un franc-maçon défenseur d'un socialisme fraternel et spiritualiste dans les années 1848-1870. «Peillon partage nos valeurs, c'est un maçon sans tablier», se réjouit l'un des invités de cette soirée.


Vincent Peillon, invité du Grand Orient, le 16 novembre 2012. Crédits photo : JEAN-ERICK PASQUIER
Après le ministre, d'autres orateurs, dont deux anciens Grands Maîtres du GO, Patrick Kessel et Jean-Michel Quillardet, entonnent des couplets lyriques sur les mérites de la laïcité, se félicitant du nouveau souffle venu de la Rue de Grenelle depuis le mois de mai. En tant qu'inspecteur de l'Éducation nationale, Alain Seksig, lui-même affilié au GO, plaide de son côté pour une formation des enseignants à la laïcité. «Monsieur le ministre, ne cédez pas sur les principes», lance pour finir le Grand Maître actuel du GO, José Gulino, avant de clore la séance, ravi de cette conférence exceptionnelle.Vincent Peillon n'est pas la seule personnalité de gauche à s'afficher ainsi au GO, redevenue l'obédience phare de la maçonnerie française ces derniers mois. Le GO attend notamment la visite rue Cadet, le 9 décembre, de Claude Bartolone, le président de l'Assemblée nationale. Les propos de celui qui se présente comme un profane - mais que beaucoup de frères voient comme un de leurs soutiens - seront probablement appréciés. Petit détail révélateur: lors de son élection au perchoir en juin dernier, une trentaine de députés «initiés» ont été mobilisés dans les dernières heures. En coulisses, le fabiusien Philippe Guglielmi, élu de Romainville, patron de la fédération PS de Seine-Saint-Denis, terre d'élection de Bartolone, et ancien Grand Maître du GO (de 1997 à 1999), a manœuvré pour favoriser l'élection de son ami. «Je ne démens pas», s'amuse ce colosse affable quand on l'interroge sur cet épisode.

Le Grand Orient, marqué à gauche, retrouve des couleurs
La gauche revenue au pouvoir, les francs-maçons pavoisent. Pour Philippe Guglielmi, pas de doute, l'heure est à la reconquête. «Nous avons loupé pas mal de rendez-vous ces dernières années, sur les thèmes de la laïcité et de la lutte contre l'extrême droite, il est temps de réagir», confie-t-il. Élu Grand Maître du GO en septembre, pour un court mandat d'un an, José Gulino, un solide socialiste du Pas-de-Calais, est sur cette ligne. Il ne fait pas mystère de sa volonté de peser sur la scène politique quel que soit le sujet, du mariage gay au projet de loi bancaire, de la réforme de l'État à celle des institutions. Il veut même envoyer des «cahiers de doléances» républicaines aux élus.

«Concrètement, le GO marque des points», constate Patrice Hernu, animateur du club inter-obédientiel Dialogue et Démocratie française, qui a vainement tenté d'organiser des débats avec tous les candidats durant la campagne présidentielle. Le GO a réussi à les torpiller, préférant faire venir les candidats rue Cadet...

Naturellement, ce retour en grâce n'a pas la même force qu'en 1981, lors de l'élection de François Mitterrand. À l'époque, les piliers de l'équipe Mitterrand - de Charles Hernu à Pierre Joxe - étaient des «frères trois points» et le Grand Maître du GO, Roger Leray, appelait les ministres directement au téléphone pour donner ses consignes. «Cette ère est révolue et l'influence politique des francs-maçons, après avoir atteint des sommets sous la IIIe République, n'a cessé de décliner», estime l'historien Roger Dachez, président de l'Institut maçonnique de France. L'abandon du projet du grand service public unifié de l'éducation, après les manifestations monstres en faveur de l'école libre en 1984, a douché les frères. François Mitterrand, formé chez les pères maristes, n'a finalement guère donné suite aux injonctions des obédiences.

Jacques Chirac, petit-fils d'un Vénérable d'une loge du GO, était plus sensible aux idées défendues chez les maçons. Son successeur Nicolas Sarkozy a, quant à lui, soufflé le chaud et le froid à l'égard des frères: ses envolées de campagne en 2007, citant des figures historiques de la République, ont été en partie inspirées par Alain Bauer, ancien Grand Maître du GO de 2000 à 2003 ; en revanche, ses discours de Latran (2008), de Grenoble (2010) et ceux de la dernière présidentielle empruntaient davantage au registre catholique de son conseiller Patrick Buisson. «Nous avions de bons contacts avec Sarkozy grâce à Bauer, mais le retour des thèmes de la droite dure ne pouvait que nous déplaire», résume Jean-Michel Quillardet.


Claude Bartelone, un ami des frères. Crédits photo : Sébastien SORIANO/LE FIGARO/Sébastien SORIANO/LE FIGARO
Avec Hollande, les francs-maçons se sentent plus à l'aise. «C'est vrai, nous reprenons un peu d'air», confie l'ancien ministre socialiste de l'Emploi Jean Le Garrec, frère du GO et président du Cercle Ramadier, qui fédère près de 1500 francs-maçons de gauche. Animateur de l'Alliance villes emploi, qui regroupe des élus sur ce thème, Le Garrec a récemment fait la tournée de ministres amis - Michel Sapin, Marylise Lebranchu, Benoît Hamon - et il en est ressorti confiant: «Nous comprenons que la crise est profonde, qu'il faut changer nos manières de penser, c'est pourquoi nous voulons nourrir cette réflexion, sur l'État ou l'économie», dit-il, confiant dans les capacités de François Hollande.

Le président peut compter, en retour, sur l'appui du GO et de la majorité de ses 52.000 membres. Alors que Ségolène Royal ou Martine Aubry, jugées distantes, agaçaient dans les loges, Hollande rassure. Le candidat du PS était d'ailleurs venu «plancher» rue Cadet le 22 novembre 2011. Une visite très appréciée. La présence de nombreux frères et soeurs dans l'entourage du président renforce ce climat favorable. Durant sa campagne, Hollande était secondé par des fidèles, dont certains, comme Jean-Marie Cambacérès, énarque de la promotion Voltaire, ou François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon, sont des frères. Son actuel conseiller politique, Aquilino Morelle, aurait été initié au GO, une rumeur que ce dernier balaie avec amusement: «Je n'ai jamais été initié, si ce n'est par quelques jeunes femmes, il y a déjà malheureusement trop longtemps...» Christophe Chantepy, le directeur de cabinet de son premier ministre Jean-Marc-Ayrault, fait également partie des frères. Sollicité sur le sujet, il n'a pas réagi.

Une demi-douzaine de ministres sont maçons, sans l'avouer
Parmi les membres du gouvernement, une bonne douzaine sont présumés francs-maçons, mais seule une petite moitié d'entre eux l'avouent à demi-mot. Quelques-uns ne répondent pas, comme Marylise Lebranchu, Stéphane Le Foll ou Alain Vidalies. D'autres démentent formellement, tels le ministre du Travail Michel Sapin, bien qu'il soit en phase avec les idéaux des loges, ainsi que Benoît Hamon, George Pau-Langevin ou Michèle Delaunay. De son côté, Frédéric Cuvillier, ministre délégué aux Transports, proche du GO, explique qu'il «ne peut pas répondre» aux questions sur le sujet. Initié de longue date, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, se contente d'un «no comment» diplomatique, ne souhaitant pas s'exprimer sur ses «convictions personnelles». Même réponse de Victorin Lurel, ministre délégué à l'Outre-Mer, membre du GO. Quant à Jérôme Cahuzac, qui reconnaît participer à des «tenues» et dont plusieurs sources au GO attestent son appartenance à cette obédience, il répond joliment, dans une formule très maçonnique: «La courtoisie, et même l'esprit de chevalerie, oblige à ne pas démentir ni à confirmer.»

Plus étonnant, la radicale de gauche Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la Décentralisation, bien connue à la Grande Loge féminine de France (GLFF), esquive le sujet en nous déclarant d'abord qu'elle ne se sent «pas compétente pour répondre à cette question», avant de dire qu'elle ne souhaite pas s'exprimer! À l'inverse, Manuel Valls est l'un des rares à assumer son affiliation passée. Son entourage confirme son initiation au Grand Orient en 1988 et sa fréquentation des loges jusqu'en 1996. «Il a ensuite quitté la franc-maçonnerie, faute de temps et d'intérêt», précise l'un de ses conseillers.


Manuel Valls et Jean-Yves Le Drian, deux initiés du gouvernement. Crédits photo : Jean-Christophe MARMARA/Le Figaro
Mais l'importance de la maçonnerie ne se mesure pas seulement au nombre de ministres initiés, dont la liste ne peut être officielle ni exhaustive. C'est aussi une affaire de réseaux, d'hommes clés dans les ministères ou au Parlement. «L'influence des maçons se développe de manière diffuse, par capillarité, parce qu'on retrouve beaucoup de frères dans les cabinets ministériels, les administrations et les milieux politiques», estime Emmanuel Pierrat, avocat initié au GO et coauteur avec Laurent Kupferman de Ce que la France doit aux francs-maçons... et ce qu'elle ne leur doit pas (First éditions, 2012). Résultat: des connivences naissent dans les loges, des informations circulent et des petits services s'échangent. La solidarité obligée et le secret maçonnique (voir encadré page 40) que partagent les francs-maçons nourrissent, par conséquent, un certain copinage invisible, souvent au détriment de profanes, privés de ces clés d'influence. Bien introduit dans les cénacles de gauche, le GO possède, en ce domaine, quelques longueurs d'avance.

Les ministères de l'Intérieur et de la Défense, deux fiefs maçons
Rue de Grenelle, on l'a vu, Vincent Peillon est très inspiré par les idées défendues dans les loges. L'un de ses plus proches conseillers politiques, Marc Mancel, qui officie aux côtés de George Pau-Langevin, la ministre chargée de la Réussite éducative, serait membre du GO. Parmi d'autres «frères» influents à l'Éducation nationale, figure également l'ancien recteur Christian Forestier, qui fut directeur de cabinet de Jack Lang au ministère de 2000 à 2002. Administrateur général du Conservatoire national des arts et métiers et membre du Haut Conseil de l'Éducation, il coprésidait le comité de pilotage des rythmes scolaires instauré par Luc Chatel et il a été nommé en juillet parmi les quatre animateurs de la concertation sur l'école par Vincent Peillon.

Place Beauvau, Manuel Valls est en phase avec une administration où l'appartenance aux loges est réputée pouvoir accélérer les carrières. «Sous l'Empire, 90 % des commissaires de police étaient maçons. Cette proportion a diminué pour atteindre environ 10 % aujourd'hui», estime Alain Bauer, criminologue de profession et coauteur de nombreux ouvrages sur la maçonnerie. Lorsque Nicolas Sarkozy dirigeait le ministère de l'Intérieur, il avait justement recours aux «lumières» du frère Bauer, nommé en 2003 président du conseil d'orientation de l'Observatoire national de la délinquance. Claude Guéant, considéré comme plus proche de la Grande Loge nationale française (GLNF), obédience spiritualiste, n'a pas dérogé à cette règle Place Beauvau, s'appuyant quand il le fallait sur les réseaux maçonniques, notamment au sein des syndicats de policiers et de la préfecture de police de Paris.

Manuel Valls, épaulé par son conseiller Yves Colmou, autre initié au GO, peut compter sur son passé maçonnique pour conforter son assise. «Il n'en a pas besoin pour asseoir son autorité politique», avance l'un de ses conseillers. Mais l'un de ses meilleurs amis, croisé naguère chez les jeunes rocardiens, demeure Alain Bauer, auprès de qui il continue de puiser régulièrement quelques conseils. La nomination de Renaud Vedel, ancien bras droit du préfet de police de Paris Michel Gaudin, comme directeur adjoint de cabinet de Valls, ne serait pas sans rapport avec l'appui dont il a bénéficié de la part de Bauer. Ce dernier, en expert, résume: «La franc-maçonnerie a peu de pouvoir réel ; en revanche, elle a une grosse capacité de résistance. Elle peut faire échouer à peu près tout!»

Le climat est similaire au ministère de la Défense, où les obédiences se livrent, traditionnellement, à des bagarres de prés carrés. «Difficile de nier l'influence maçonnique à l'hôtel de Brienne, siège du ministère», s'amuse l'initié Patrice Hernu, fils de l'ancien ministre de Mitterrand. L'arrivée de Jean-Yves Le Drian et de son directeur de cabinet Cédric Léwandowski, deux frères, au ministère a fait jaser dans les loges. Cédric Léwandowski possède un réseau étendu, constitué au fil de sa carrière: il a, entre autres, travaillé comme conseiller au groupe socialiste à l'Assemblée, chargé de mission auprès du frère député Christian Pierret, chef de cabinet du frère Jean-Jacques Queyranne à la mairie de Bron, assistant parlementaire puis collaborateur du ministre de la Défense Alain Richard, chef de cabinet du président d'EDF, le frère François Roussely, et membre du groupe de réflexion sur la recherche stratégique piloté en 2007 par le frère Alain Bauer. Un CV très maçonnique - que l'intéressé ne commente pas - qui explique en partie sa nomination comme bras droit de Jean-Yves Le Drian!

Le Grand Orient a repris le contrôle de la Fraternelle parlementaire
Le Grand Orient peut surtout se targuer d'avoir des relais très solides au Parlement. Historiquement contrôlée par le GO, la Fraternelle parlementaire, appelée Frapar, qui réunit 410 membres de toutes obédiences, dont 150 députés et sénateurs (les deux tiers sont à gauche), avait été récupérée en 2009 par la GLNF, obédience rivale, grâce à l'élection à sa présidence de Bernard Saugey, sénateur UMP de l'Isère. Sous sa houlette, la Frapar s'est un peu réveillée, déposant ses statuts officiels et multipliant les auditions transpartisanes, notamment sur la bioéthique ou la fin de vie. L'échéance triennale du mandat de Saugey et l'arrivée d'une majorité de gauche, au Sénat puis à l'Assemblée nationale, ont sonné la fin de l'ère UMP-GLNF. Le GO a tout fait pour récupérer la présidence de cette fraternelle très politique. Une bataille gagnée discrètement. Lors de l'assemblée générale, le 13 novembre, le député PS du Nord, Christian Bataille, membre du GO, qui avait déjà piloté la Frapar, a été élu président, avec cinq voix d'avance, face à Pascale Crozon, députée PS du Rhône.

Des intermédiaires aux confluents des loges et du PS
En coulisses, plusieurs ex-parlementaires ont fait basculer quelques voix. Parmi eux, le septuagénaire Guy Lengagne, membre du GO, officiellement à la retraite à Boulogne-sur-Mer. «Cela m'embêtait un peu vis-à-vis d'une femme éminente, mais je me suis activé pour Bataille», reconnaît l'ex-ministre de la Mer de Mitterrand. Plus vaillant que jamais, l'ancien sénateur centriste Henri Caillavet, qui file sur ses 99 ans, a aussi écrit au même moment à ses collègues de la Frapar pour les inciter à reprendre le combat. «Nous vivons des instants quasi révolutionnaires, a plaidé le nonagénaire. Nous changeons de société. (...) Sans doute, la Fraternelle organisera des débats pour tenter, malgré les oppositions philosophiques et politiques, un texte recueillant autant que faire se peut un grand nombre de nos amis. Je songe à l'énergie, aux injustices sociales et la nécessité de revenir à une plus juste égalité.» Un vrai programme de travail...

Par ailleurs, la composition du nouveau bureau de la Frapar a donné lieu à de savants dosages, afin qu'y figurent les députés socialistes Pascale Crozon, Pascal Terrasse, Olivier Dussopt, Brigitte Bourguignon, Odile Saugues, le sénateur socialiste Claude Domeizel et la sénatrice PS Michèle André. Des petits strapontins ont tout de même été laissés à deux sénateurs UMP, Sophie Joissains, élue des Bouches-du-Rhône, et Christophe-André Frassa, représentant les Français de l'étranger.

Un autre initié discret figure dans l'organigramme de cette fraternelle: il s'agit d'Alain Simon, au titre du collège des hauts fonctionnaires. Cet homme méconnu est au carrefour de plusieurs sphères de la gauche et de la franc-maçonnerie: ancien des cabinets ministériels de Pierre Mauroy et Christian Pierret, secrétaire adjoint du groupe socialiste à l'Assemblée nationale de 1995 à 1997, actuellement contrôleur général à Bercy, Alain Simon est membre du Cercle Ramadier. Il est surtout l'un des 35 membres du Conseil de l'Ordre du GO, autrement dit son comité de pilotage. Beaucoup d'initiés de la rue Cadet prédisent qu'il sera candidat en septembre 2013 pour succéder comme Grand Maître à José Gulino. Proche du pouvoir, Alain Simon peut d'ores et déjà compter sur quelques poids lourds du GO pour son élection.

En attendant cette montée en puissance d'Alain Simon, d'autres intermédiaires s'activent. Alain Bauer ayant perdu le rôle de relais entre les francs-maçons et le pouvoir qu'il tenait sous Sarkozy, c'est Philippe Guglielmi, patron des socialistes de Seine-Saint-Denis, qui officie, en concurrence avec le profane Jean Glavany. Il a fait entrer au PS l'ancien Grand Maître Guy Arcizet, en poste jusqu'à septembre dernier. Ami de Claude Bartolone et lui-même membre de la Fraternelle parlementaire - en tant qu'ancien suppléant d'Elisabeth Guigou -, Guglielmi a surveillé de près l'élection de Christian Bataille. Avec un autre ancien Grand Maître, Patrick Kessel, il avait aussi préparé la venue de François Hollande rue Cadet en novembre 2011. Les déclarations faites sur place par le candidat socialiste en faveur de la constitutionnalisation de la loi de 1905 n'ont guère surpris Guglielmi et ses camarades: ils les avaient en partie téléguidées... Cependant, cette promesse est loin d'être tenue.

La constitutionnalisation de la loi de 1905 pose problème
La franc-maçonnerie a des alliés. Mais elle n'a pas tous les pouvoirs. Reçus secrètement en octobre par le secrétaire général de l'Élysée Pierre-René Lemas, grâce à l'entremise de Jean Glavany, José Gulino et quelques dignitaires du GO se sont vu rétorquer que la constitutionnalisation de la loi de 1905 se heurtait à deux obstacles. Juridique d'abord: il est délicat d'inscrire dans la constitution un texte qui coule dans le marbre la séparation des Églises et de l'État et prévoit des exceptions comme le concordat d'Alsace-Moselle. Politique ensuite: remettre en cause le concordat reviendrait à froisser nombre d'électeurs et d'élus dans les régions concernées.

Or l'Élysée redoute déjà que les scrutins territoriaux de 2014 soient une bérézina pour la gauche au pouvoir... «Il faut aider le président de la République à comprendre qu'on peut contourner ces obstacles», plaide Gérard Contremoulin, un frère socialiste du GO, anciennement proche du frère Jean-Luc Mélenchon, ardent défenseur du projet. Cependant, le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a expliqué, lors de l'inauguration de la grande mosquée de Strasbourg, le 27 septembre, que le gouvernement restait attaché au régime concordataire. Bref: le projet de constitutionnalisation de la loi de 1905 aura bien du mal à voir le jour, même si José Gulino continue d'y croire urbi et orbi.

En revanche, les loges se sentent revigorées par d'autres batailles en cours. Celui du «mariage pour tous» en fait partie. Promotrices - au nom de l'égalité - de cette ouverture de droits pour les couples du même sexe, certaines obédiences sont prêtes à soutenir le projet de loi sur le sujet. Quitte à faire un peu de surenchère. Les déclarations du cardinal André Vingt-Trois, début novembre, traitant le mariage gay de «supercherie» ont notamment déclenché les foudres du GO.

Les tentations hégémoniques du GO agacent ses alliés
En voyage à l'étranger, José Gulino a dicté aussitôt un communiqué dénonçant «les positions arriérées et obscurantistes» et «les amalgames violents et haineux» du président de la Conférence des évêques de France. Effet boomerang: ce communiqué très anticlérical a d'abord chagriné... les autres obédiences maçonniques, qui espéraient un peu plus de concertation! «Le GO a une tentation hégémonique, que ses entrées dans le monde politique renforcent très nettement en ce moment», se lamente-t-on dans plusieurs obédiences. «Les religions ont le droit d'exprimer leurs points de vue. Et nous aussi, mais pas dans l'anathème», précise de son côté Catherine Jeannin-Naltet, la Grande Maîtresse de la GLFF. Une fois ces querelles dissipées, il est probable que les frères et soeurs les plus militants descendront dans la rue pour renforcer le camp des défenseurs du mariage gay.Ils devraient aussi se mobiliser pour soutenir les projets sur l'accompagnement médicalisé de la fin de vie, afin d'aller plus loin que les dispositions strictes prévues par la loi Leonetti de 2005. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a confié une mission sur le sujet au Pr Didier Sicard, ancien président du Comité consultatif national d'éthique. Favorables à cette évolution, les loges du GO, de la GLFF et du Droit humain ont déjà planché sur cette question. «Nous avons transmis notre texte sur l'exception d'euthanasie au Pr Sicard et aux parlementaires», explique Jacques Samouelian, le président du Droit humain, satisfait des premières réactions positives. Les frères de la Grande Loge de France (GLDF) ont également fait part de leurs réflexions à qui de droit. Ces obédiences sont moins tapageuses que le GO, mais presque aussi efficaces... -
Quelles sont les principales obédiences de la franc-maçonnerie française et comment se positionnent-elles politiquement ? Voici quelques éléments de réponse.

GRAND ORIENT DE FRANCE

José Gulino. Crédits photo : Richard RAY/NICE MATIN/MAXPPP/Richard RAY/NICE MATIN/MAXPPP
• Prend cette dénomination en 1773.

• 52.000 membres, à 99 % masculins ; mixte depuis 2010.

• Obédience dite «libérale et non dogmatique», qui ne fait pas référence au Grand Architecte de l'Univers.

• Grand Maître: José Gulino, ancien directeur des services du conseil général du Pas-de-Calais.

• Positions politiques: Traditionnellement ancré à gauche, héritier de combats anticléricaux, le GO est la principale obédience française et la plus «engagée» dans le camp «progressiste». Elle affiche des positions marquées en faveur de l'égalité, des droits sociaux, de la liberté de penser et de la laïcité. La plupart de ses Grands Maîtres successifs ont été membres du PS ou dans sa mouvance. Elle interdit à ses membres d'appartenir au Front national. Durant la campagne présidentielle de 2012, le GO a «auditionné» certains candidats «républicains» dont François Hollande, Jean-Luc Mélenchon (initié au GO), Eva Joly ou François Bayrou. Quelques ministres actuels, des membres de cabinets ou des parlementaires de gauche en sont proches. Revendiquant le rôle d'aiguillon et de laboratoire d'idées à gauche, le GO a défendu l'interdiction du port de la burqa, prône la constitutionnalisation de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l'Etat, défend le mariage pour tous et souhaite faire évoluer les textes sur la fin de vie.

GRANDE LOGE DE FRANCE

Marc Henry. Crédits photo : BRUNO SOUILLARD/LA PROVENCE/MAXPPP
• Prend cette dénomination en 1894.

• 33.000 membres, exclusivement masculins.

• Obédience spiritualiste, qui fait référence au principe du Grand Architecte de l'Univers sans obligation de croire en Dieu.

• Grand Maître: Marc Henry, retraité

• Positions politiques: Les règles de la GLDF lui interdisent de s'occuper de «controverse touchant à des questions politiques ou religieuses». Elle se consacre à la démarche philosophique et spirituelle de ses membres en vue «d'améliorer l'homme». Ses débats internes ne donnent lieu à aucun vote de résolution. La GLDF, qui profite actuellement de l'éclatement de la GLNF, dispose de bons relais dans tous les partis, mais reste discrète.

Elle met cependant en avant son rôle de «conservatoire de valeurs», notamment celles de la République. Son Grand Maître jusqu'en juin dernier, Alain-Noël Dubart, était membre de l'UMP, mais ses relations avec le ministre de l'Intérieur de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant, se sont détériorées en 2011 et 2012. Bien qu'elle soit masculine, la GLDF prône aussi le progrès en matière de droits des femmes, l'un de ses anciens Grands Maîtres, le gynécologue Pierre Simon, ayant été l'un des promoteurs des lois sur la contraception en 1967 et sur l'IVG en 1974. Elle invite des personnalités extérieures à venir débattre avec ses membres, que ce soit sur la mondialisation avec Emmanuel Faber (Danone), l'éthique des médias avec Edwy Plenel, l'éducation avec Rama Yade, ou les devises de la République, thème de son deuxième dîner annuel, le 22 septembre dernier, en présence de Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel, de l'écrivain Régis Debray, de la ministre George Pau-Langevin ou du président socialiste de la commission des lois au Sénat, Jean-Pierre Sueur.

GRANDE LOGE NATIONALE FRANÇAISE

Jean-Pierre Servel. Crédits photo : FELIX GOLESI/NICE MATIN/MAXPPP/FELIX GOLESI/NICE MATIN/MAXPPP
• Née en 1913.

• Environ 23.000 membres, exclusivement masculins.

• Obédience qui fait ouvertement référence à Dieu et à la Bible,mais qui a perdu en 2012 la reconnaissance historique des loges anglo-saxonnes et européennes, dites «régulières».

• Grand Maître: Jean-Pierre Servel (depuis le 1er décembre).

• Positions politiques: Officiellement, l'obédience se consacre exclusivement aux recherches philosophiques, ésotériques et symboliques. Elle interdit tout débat politique en interne. Elle avait refusé d'appeler à voter contre Jean-Marie Le Pen en 2002. Néanmoins, la GLNF est classée plutôt à droite. Elle est fréquentée par de nombreux élus de droite, des chefs d'entreprises, des avocats, des militaires et des policiers. Sa montée en puissance jusqu'à 45.000 membres ces dernières années s'est accompagnée d'une grave crise interne, le Grand Maître François Stifani étant de plus en plus critiqué pour ses errements autocratiques. Stifani a notamment écrit début 2009 à Nicolas Sarkozy pour lui dire qu'il pouvait compter sur la GLNF pour «soutenir» son action. Les luttes intestines ont fini par provoquer une véritable hémorragie: ses effectifs auraient fondu à moins de 25.000 frères. Le nouveau Grand Maître, Jean-Pierre Servel, a été intronisé lors d'une assemblée générale le 1er décembre.

FÉDÉRATION FRANÇAISE DU DROIT HUMAIN

Jacques Samouelian. Crédits photo : Julien MUGUET/IP3 PRESS/MAXPPP/Julien MUGUET/IP3 PRESS/MAXPPP
• Née en 1893.

• 17.000 membres, dont deux tiers de femmes ; mixte depuis l'origine.

• Obédience non dogmatique, avec ou sans référence au Grand Architecte de l'Univers.

• Président: Jacques Samouelian, pédopsychiatre dansles Alpes-de-Haute-Provence.

• Positions politiques: Plutôt orienté traditionnellement à gauche, le Droit humain défend des valeurs humanistes et revendique un rôle de réflexion, voire de propositions sur certains sujets de société, que ce soit sur l'égalité hommes-femmes, la laïcité, la grande pauvreté, la procréation, la dépendance, les retraites ou l'école. L'obédience fait travailler ses membres durant plusieurs mois. Ils adoptent des propositions, transmises aux élus et responsables politiques, comme récemment en faveur de «l'exception d'euthanasie». Peu de ses membres sont connus, hormis, par exemple, la sénatrice socialiste Michèle André, vice-présidente de la Fraternelle parlementaire.

GRANDE LOGE FÉMININE DE FRANCE

Catherine Jeannin-Naltet. Crédits photo : BRIGITTE DELABARDE/GLFF
• Née en 1945.

• 14.000 membres, exclusivement féminins.

• Obédience spiritualiste, qui fait référence au Grand Architecte de l'Univers.

• Grande Maîtresse: Catherine Jeannin-Naltet, juriste d'affaires retraitée.

• Positions politiques: Refusant toute «instrumentalisation», et s'interdisant toute «immixtion» dans les «controverses politiques ou confessionnelles», la GLFF met en avant son indépendance et la liberté de penser de ses membres. Mais cette obédience féminine mène des combats progressistes, notamment en faveur des droits des femmes. Ses initiatrices ont promu autrefois le planning familial, le droit à la contraception et à l'avortement. La GLFF a défendu la loi interdisant le port de la burqa dans l'espace public. Elle vient de saluer l'action de la ministre de la Santé, qui a fait voter un amendement permettant le remboursement de la contraception pour les jeunes filles de 15 à 18 ans et le remboursement à 100 % de l'IVG pour toutes les femmes dès 2013. La GLFF a de bons contacts avec des personnalités de gauche, comme les ministres Marisol Touraine, Marylise Lebranchu, Najat Vallaud-Belkacem ou Anne-Marie Escoffier, cette dernière étant membre de cette obédience.

GRANDE LOGE DE L'ALLIANCE MAÇONNIQUE FRANÇAISE

Alain Juillet. Crédits photo : Marc OLLIVIER/OUEST FRANCE/MAXPPP/Marc OLLIVIER/OUEST FRANCE/MAXPP
• Fondée en avril 2012.

• 12.000 membres.

• Obédience spiritualiste traditionnelle, qui fait référence au Grand Architecte de l'Univers.

• Grand Maître: Alain Juillet, avocat et ancien directeur du renseignement à la DGSE.

• Positions politiques: A l'image de la GLNF dont elle est une dissidence, la GL-AMF refuse toute prise de position politique ou sociétale. Elle «travaille» à l'élévation spirituelle de ses membres, en faisant référence à Dieu et à la Bible. Son Grand Maître, Alain Juillet, ancien numéro deux de la DGSE et ex-responsable de l'intelligence économique à Matignon, fut l'un des opposants les plus virulents à François Stifani avant de partir fonder cette nouvelle obédience, loin du «pathétique mélodrame» de la GLNF. Son principal objectif à court terme est de consolider son organisation, en attendant une éventuelle reconnaissance des loges «régulières» anglo-saxonnes et européennes. Le calendrier politique ne l'intéresse guère. L'un de ses nouveaux membres, issu de la GLNF, est Bernard Saugey, sénateur UMP de l'Isère, qui présidait, jusqu'en novembre, la Fraternelle parlementaire.

Par Vincent Nouzillefigaro
images/icones/2a.gif  ( 653326 )le figaro est malin par jejomau (2012-12-08 15:09:37) 
[en réponse à 653318]

il oublie de parler des consanguinités étranges qui lient l'UMP au PS.

A titre d'exemple, quand l'adjoint au maire de Bordeaux dit soutenir les manifestants en faveur du vrai mariage... Le maire A. Juppé (qui a un "vrai problème") lui, soutient officiellement "Gaylib" ICI , association dite de "Droite" qui pourtant soutient la marxiste Christianne Taubira et sa loi "socialiste" : ICI
en appelant à manifester aux côtés des associations LGBT le 16 décembre...

Tellement étrange qu'on comprend immédiatement qu'il ne s'agit plus d'un combat lié à la politique entre Gauche et Droite mais des anti-christs infiltrés autant chez les uns que chez les autres... contre leur peuple encore chrétien.

Je ne sais pas si Copé peut arriver à dormir tranquillement...
images/icones/nul.gif  ( 653328 )Ras le bol de ces réseaux! par Caius (2012-12-08 16:07:01) 
[en réponse à 653318]

Qui bafouent la République, qu'ils sont censés défendre, la France est malade des réseaux maçonnique, du piston généralisé, de nuls qui accèdent à des places importantes du fait même de leur appartenance.
Il faut le dire ce ne sont rien d'autre que des réseaux mafieux qui sont protégés par une justice totalement invisible lorsqu'il s'agit de frères. A quand comme en Italie et en GB l'obligation faite aux juges de décliner leur appartenance? Il y a aurait beaucoup de surprises en France si on le faisait. Où est la démocratie quand face au juge vous n'êtes pas égal?
Pas un secteur, pas une entreprise où leurs magouilles ne soient pas visibles. D'ailleurs tous les rastignac de la terre sont franc- macs, un bon indice d'appartenance quand vous voyez un type progresser dans la hiérarchie avec des compétences inexistantes ou un CV nul vous avez 99% de chances pourqu'il soit franc-maçon! Cela j'ai pu le constater un bon millier de fois.
Ne parlons pas des dégats spirituels de la FM là il faudrait 1000 pages pour en parler!
images/icones/1y2.gif  ( 653332 )Ils gouvernent la France par Jean-Paul PARFU (2012-12-08 17:47:46) 
[en réponse à 653328]

depuis 140 ans !
images/icones/1v.gif  ( 653334 )Nuance, ils syphonent la France! par Caius (2012-12-08 17:55:35) 
[en réponse à 653332]

Ne vous fiez pas à leur visée idéologique y'a qu'un truc qui les intéresse c'est d'occuper des positions de pouvoir pour en profiter!
Des opportunistes de la pire espèce!
images/icones/1y2.gif  ( 653335 )Il y a dans les loges par Jean-Paul PARFU (2012-12-08 18:26:27) 
[en réponse à 653334]

2/3 d'opportunistes et d'affairistes et 1/3 de zinzins maléfiques !
images/icones/1b.gif  ( 653342 )Des paumés! Mais des paumés dangereux par Caius (2012-12-08 19:21:19) 
[en réponse à 653335]

En effet, Jean-paul, là, vous avez raison, des férus d'occultisme complètement barges, des types assez troubles qui ont tous un point commun: leur haine des religions en général et du catholicisme en particulier
images/icones/fleche2.gif  ( 653344 )Ils veulent soi-disant par Jean-Paul PARFU (2012-12-08 19:27:24) 
[en réponse à 653342]

tout reconstruire !

Ils nient l'ordre surnaturel et veulent absolument détruire l'ordre naturel, dans la mesure où ces deux ordres ne sont pas purement humains.

Ils n'admettent rien en dehors de l'homme et de sa volonté propre et appellent cela humanisme !
images/icones/heho.gif  ( 653453 )Le GO pour le mariage gay ! par Cristo (2012-12-09 20:47:09) 
[en réponse à 653318]

L'auteur de l'article ne s'encombre même plus avec l'intox du "mariage pourtousse" ("tonton, pourquoi tu tousses ?") qui sonne un peu comme "mariage partouze" d'ailleurs : amis de la poésie, je vous dis bonsoir en ajoutant que la réponse au GO et autres fils de la Veuve, c'est de marcher fraternellement le 13 janvier à Paname !