Selon Y. Chiron, il y a eu procès civil mais pas de canonisation formelle...

Le Forum Catholique

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Chicoutimi -  2021-02-15 03:15:25

Selon Y. Chiron, il y a eu procès civil mais pas de canonisation formelle...

Je ne dis pas ça pour vous contredire (car peut-être avez-vous d'autres éléments sur cette affaire, et cela m'intéresserait grandement), mais uniquement parce qu'il serait bien de préciser les choses sur cette affaire.

Dans son ''Enquête sur les béatifications et les canonisations'', Yves Chiron évoque la figure du petit Simon de Trente dans un chapitre sur ''les causes difficiles''. À moins qu'il ne fasse erreur, Y. Chiron affirme qu'il n'y a pas eu de procès de canonisation pour le petit Simon (mais confirme qu'il y a eu un procès civil dont le pape lui-même fut, en quelque sorte, impliqué):


''Les circonstances dans lesquelles avait été retrouvé le cadavre du petit Simon (près de la maison d'un juif et le soir de Pâques) firent s'élever aussitôt l'accusation de ''crime rituel''. (...)

Aussi dans le procès vit-on intervenir, d'un côté, le duc Sigismond pour arrêter puis autoriser le procès et, d'un autre, le pape Sixte IV qui nomma un commissaire, en la personne de l'évêque de Vintimille, pour s'assurer de la bonne observance des décrets papaux (l'assassinat par meurtre rituel intéresse la foi et aurait pu relever de l'Inquisition). Finalement, c'est un procès civil qui eut lieu, mené par le podestat. Sous la torture, neuf juifs arrêtés avouèrent le meurtre et fournirent des détails macabres (...). Le procès n'était pas terminé qu'un livre était déjà consacré à l'assassinat du petit Simon (il s'agit d'ailleurs, du premier livre imprimé à Trente). (...)

Le titre de ''saint'' n'était point usurpé, même s'il ne fut pas accordé par l'Église au terme d'un procès de canonisation formelle. Les étapes du culte dont a bénéficié le petit Simon peuvent être résumées ainsi:

- Alors que, dès le lendemain de sa mort, la population de Trente tenait le petit Simon pour un martyr, en 1475, Sixte IV interdisait de lui vouer un culte tant que la preuve de son martyre n'aurait pas été établie (le pape ne faisait que suivre les normes, bien établies, en matière de reconnaissance du martyre).

- Aucun procès de canonisation ne fut entamé mais un culte local se répandit. Culte dont l'authenticité sembla être confirmée par de nombreux miracles obtenus à l'intercession de ''saint Simon''. L'inscription de celui-ci dans le Martyrologe romain, en 1584, en fut la reconnaissance évidente.

- En 1588, Sixte V accorda un office et une messe propres à saint Simon, avec le titre de saint...

(...) Saint Simon de Trente est ainsi resté, pendant des siècles, un saint dont le culte était vivace et très populaire (...) Mais comme aucun procès de canonisation n'a été mené au moment de sa mort ou plus tard, son culte aurait pu faire l'objet, de la part de la Congrégation des Rites, d'une ''Confirmation de culte''. Un cas analogue au sien l'a obtenu: Lorenzino Sossio, tué en 1485, à l'âge de cinq ans, par des juifs, était vénéré lui aussi comme martyr. Le 5 septembre 1867, la Congrégation des Rites prit un décret confirmant ce culte immémorial. Ce qui fait qu'aujourd'hui encore, Lorenzino Sossio a droit aux titres de bienheureux et de martyr. Il en est autrement du petit Simon.

(...)

Dès 1963, Mgr Gottardi avait interrogé la Congrégation des Rites sur la légitimité du culte rendu à saint Simon. En même temps, il demandait à un historien spécialisé sur ces questions, le père dominicain Eckert, d'étudier les actes du procès de 1475. Fort de leurs conclusions (pas de canonisation formelle avait indiqué la Congrégation, pas de meurtre rituel disait l'historien), l'évêque rendit publique, le 28 octobre 1965, une ''notification''. En application des dispositions prévues au code de droit canon, il décidait d'interdire le culte ''au petit Simon de Trente'' (qui, du coup, perdait son titre de saint). Le canon 1284 du code de droit canon alors en vigueur stipulait que les évêques doivent faire cesser le culte à des reliques ''dont on n'est pas certain de l'autheniticité''. Mgr Gottardi fit aussi fermer la chapelle et transféra la châsse-reliquaire dans un lieu inconnu. (...)''



Source: Yves Chiron, Enquête sur les béatifications et les canonisations, Éditions Perrin, Collection Tempus, 2011, pages 298-303
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