Cabotin de luxe...

Le Forum Catholique

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Sabaoth -  2017-12-05 17:37:48

Cabotin de luxe...

Lamentations universelles sur la mort de Jean d'Ormesson. Rarement un écrivain aura été aussi surfait. Ses livres sont pour la plupart d'interminables et assommants bavardages amphigourés de bombastiques références culturelles ; çà et là, les éléments d'une philosophie de divan de curé flottent comme des yeux de gras dans le bouillon. Essayez ! Très vite, après dix pages d'héroïque patience, d'Ormesson vous tombera des mains.

Cet obstiné plastronneur fut un dandy universel et amphibien, soucieux avant tout de séduire : à La ville (Paris, naturellement), à la campagne (Bourgogne, Val de Loire... plus bas ça fait plouc), aux tables gourmandes, dans les galeries, au fond des coulisses : nul ne pouvait prétendre échapper à son oeil bleu turlupin : chiens, chats, domestiques, courtisans, politiciens, Personnages Historiques, Passé, Présent et Avenir, salut ! plateaux télé et bien sûr, bien sûr... les phaaaames ! Je sens qu'il a dû passer la moitié de sa vie à regarder sa silhouette passer dans les vitrines et l'autre moitié à disserter sur les Reflets de Lui-Même en pied.
Un seul personnage l'intriguait : Dieu ! Pensez donc : Quelqu'un de plus célèbre et de plus Omniscient que Jean d'O.

Chose qui ne trompe pas : Macron a reconnu en lui l'un de ses aïeux à tête de bouquet de fleurs : le bon et chic Jeannot représenterait la quintessence de l'esprit français... dans son acception la plus dramatique (celle qui fait perdre les empires) : le Badinage, la Légèreté, la Pirouette... Bref, le Vent qui se prend pour l'Esprit. Un seul de ses titres peut résumer toute son oeuvre : Presque rien sur presque tout. Autant dire : "Tout ça pour ça", en quarante volumes.

Parmi ses citations les plus prudhommesques, relevons :
«J'ai beaucoup ri. J'ai ri du monde et des autres et de moi. Rien n'est très important. Tout est tragique. Tout ce que nous aimons mourra. Et je mourrai moi aussi. La vie est belle» (C'était bien, éd. Gallimard, 2003). En gros : Je me suis bien marré et puis basta.

«C'est quand il y a quelque chose au-dessus de la vie que la vie devient belle.»
Envie métaphysique de savoir ce que l'oracle appelle "quelque chose au-dessus de la vie" : Jean d'O. peut-être ?

«Toute mort est un mystère parce que toute vie est un mystère.»
(Voyez comme on danse, éd. Robert Laffont, 2001) ; je propose la pirouette à l'envers, vérifiez, ça marche aussi : "Toute vie est un mystère, parce que toute mort est un mystère". Brrr.

«Personne ne sait jamais ce qu'on gagne avec une naissance. On n'y gagne que des espérances, des illusions et des rêves. Il faut attendre la mort pour savoir enfin ce qu'on perd.» (Le vagabond qui passe sous une ombrelle trouée, éd. Gallimard, 1981). Résumé pour les ignares : "En naissant on n'a rien, en mourant on perd tout". Fortiche.

Une petite dernière, pour la route : «L'argent tombe sur le monde, comme une vérole sur le pauvre peuple, bien après la pensée, bien après l'émotion, le cri, le rire, la parole, et après l'écriture.» (Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit, éd. Robert Laffont, 2013). Sans vouloir être désobligeant, je pense que l'argent est tombé sur Jean d'O avant sa pensée, etc.

Laissons là, pour ne point lasser, cet laborieux La Bruyère, et prenons les paris : dans cinq ans PLUS PERSONNE ne lira une ligne de ce courtisan du Monde.

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