Qui gouverne l’Église ?

Le Forum Catholique

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Abbé Néri -  2013-03-17 20:01:36

Qui gouverne l’Église ?

Les changements récents à la tête visible de l’Église ont fait rejaillir de manière confuse et contradictoire sa relation au Saint Esprit.

Il me semble que ce passage du cardinal Journet dans son traité de l’Église sur la manière comme l’Esprit Saint gouverne celle-ci, peut contribuer en nourrissant notre réflexion à clarifier le débat.

Il la régit suivant une providence spéciale

Personnalité suprême et transcendante de l’Église, l’Esprit Saint la gouverne selon les lois d’une providence toute spéciale.

Les sociétés temporelles, la communauté humaine, n’échappent certes pas à la providence divine.

- C’est elle qui incline les hommes à se rassembler en vertu d’un désir qu’il fait sortir du fond de notre nature
- Et dont il nous demande de prolonger l’élan par notre libre détermination.

Mais cette communauté naturelle vise un bien commun naturel, engagé profondément dans le flux du temps et qui n’est pas appelé à subsister comme tel à la fin de l’histoire.

Dieu gouverne les communautés humaines en acceptant de voir l’impulsion divine qui les pousse vers leur fin naturelle tenue en échec ou déviée par la volonté de ses créatures libres.

De telle sorte que d’aucune de ses communautés, fût-ce de la plus parfaite, on ne saurait dire que Dieu en est le suprême sujet responsable.

Pour l’Église il n’en est pas de même.

C’est Dieu même qui va la former, la soutenir, la vivifier.

Elle existera "pour que nous ne soyons plus des enfants ballottés et emportés à tout vent de doctrine, au gré de l’imposture des hommes et de leur astuce à fourvoyer dans l’erreur; mais pour que, vivant selon la vérité et dans la charité, nous grandissions de toutes manières en Celui qui est la Tête, le Christ" (Eph., IV, 14-15).

Le lien par excellence qui unira ses membres :

- ne sera pas la simple convergence, vers un bien temporel, des volontés humaines;

- il sera la convergence vers le royaume de Dieu des cœurs divinisés par les vertus infuses et les dons du Saint Esprit,

- il sera l’effet d’une charité qui est comme une extension de la charité même du Christ, et comme une similitude de l’unité liant entre elles les trois personnes divines:

"Je ne prie pas pour eux seulement, mais pour ceux-là aussi qui, grâce à leur parole, croiront en moi. Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi, qu’eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie que tu m’as envoyé" (Jean, XVII, 20-21).

L’Église se réalise sans doute dans l’histoire, mais c’est l’éternité qu’elle porte en elle.

Elle est l’œuvre d’une providence unique :

- qui a son origine première dans la Déité, dans l’Esprit Saint,

- et qui s’exerce en passant à travers la nature humaine, l’intelligence, la volonté, la liberté créées du Christ:

"Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez... Et moi je suis avec vous pour toujours, jusqu’à la fin du monde" (Mt., XXVIII, 18, 20).

Cette providence souffrira sans doute d’être tenue en échec :

- dans tel ou tel homme,

- voire dans tel ou tel groupe ethnique

Et alors elle trouvera d’autres issues, elle s’étendra à d’autres hommes, à d’autres groupes ethniques, chez qui peut-être elle apparaîtra sous des modes nouveaux; mais elle ne souffrira jamais d’être frustrée de son effet propre, qui est de conduire le Corps du Christ, en le gardant dans la vérité et l’amour, vers le royaume de gloire.

Cette providence souffrira encore d’être gênée :

- par les dispositions imparfaites,

- par l’insuffisante générosité de ces hommes et de ces groupes ethniques dans lesquels elle réussit pourtant à se manifester,

En sorte que, selon les lieux et les époques :

- la charité de l’Église pourra être plus ou moins ardente,

- son message plus ou moins prêché,

- sa personnalité collective tout entière plus ou moins rayonnante.

Mais jamais ne manquera à l’Église cette charité parfaite qui fait d’elle vraiment l’Épouse du Christ. Et jamais ne se glissera, dans le message essentiel qu’elle a la mission de prêcher, l’imposture ou l’erreur.

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