Même quand on parle de certains qui ne nous "parlent" pas particulièrement. On peut alors au moins leur tirer son chapeau avant de passer outre.

Un exemple qui ne m'inspirerait pas, à première vue: la bienheureuse Kateri Tekakwita, vierge Iroquoise. Ce serait comme le contraire de sainte Thérèse, héraut de la sainteté des devoirs ordinaires. Dans sa biographie, on rapporte les pénitences qu'elle s'infligeait et qui surprenaient même les missionnaires jésuites, lesquels apparemment ne s'attendaient pas qu'elle prendrait au mot les récits qu'ils faisaient à leurs convertis de la vie des saints. Certaines choses sont vraiment pénibles à lire et on ne peut s'empêcher de penser à du masochisme. Mais il faut alors réfléchir à la valeur du message que cette vie porte: amour du Christ pour partager sa croix; horreur du péché démontrée par ce désir d'en retrancher toutes les approches. Culturellement, on réalise aussi qu'elle était issue de la nation amérindienne qui fit mourir les martyrs canadiens dans des tortures atroces, et qu'elle voulait réparer pour ses compatriotes; qu'elle était elle-même promise au martyre de par sa conversion et que ses pénitences étaient comme un entraînement; enfin, que la culture dont elle était issue valorisait le mépris de la douleur physique, autant qu'elle était raffinée dans les tourments infligés aux ennmemis. Alors, on comprend le sens, et on retient l'esprit plutôt que l'exemple. Toute l'histoire de la spiritualité chrétienne est traversée par le fil de la réinterprétation. La Règle de saint Benoît pourrait sembler assez dure; elle se présente pourtant comme un adoucissment par rapport aux exploits extravagants et fous de maints Pères du désert. Mais saint Benoît, plutôt que de parler d'une adaptation raisonnable, dit qu'il tient compte de la faiblesse de ses contemporains.