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"Les démolisseurs de l'Église" Imprimer
Auteur : Tardivel
Sujet : "Les démolisseurs de l'Église"
Date : 2006-11-13 01:03:11

"Les démolisseurs de l'Église"

"Ce qui empêche tout particulièrement l'attachement au Christ, c'est la recherche de nous-mêmes, la recherche de notre propre volonté. Une telle recherche de soi ne fait pas que détruire notre foi, elle peut nous l'enlever complètement.

"Commodien - un ascète chrétien qui vivait au milieu du 3ème siècle à Carthage - a laissé deux textes qui traitent de cette question: Instructiones et Carmen apologeticum. (...) Les documents de Commodien couvrent une période de plusieurs années après la cessation, en 251, des persécutions de Dèce (...). La persécution de Dèce, la septième dans l'histoire de l'Église, avait différé des autres car Dèce ne se contentait pas de condamner à mort mais faisait plus souvent encore appliquer la torture, voulant ainsi intimider les chrétiens. (...)

"Les écrits de Commodien nous brossent le tableau de la communauté carthaginoise après la persécution de Dèce. Trois catégories d'hommes s'y distinguaient. La première, c'était les simples fidèles - fideles - qui, au temps de la persécution, avaient réussi à fuir Carthage et à se réfugier quelque part. À la deuxième catégorie appartenaient les lapsi ou hommes déchus - les renégats - qui étaient nombreux. C'étaient ceux qui n'avaient pas résisté aux effroyables tortures. Commodien lui-même écrit en parlant de lui qu'il avait été un tel renégat, qu'il avait fait pénitence en tant que catéchumène et avait beaucoup de compassion pour les autres lapsi, les déchus, qui avaient fait pénitence. La troisième catégorie enfin c'étaient les martyrs - martyres - ceux qui avaient survécu aux tourments, car souvent Dèce n'avait pas voulu les mettre à mort, il avait préféré les torturer.

"(...) Le tableau de ceux qui avaient donné leur vie pour le Christ mais avaient survécu (les martyrs, qui à coup sûr, portaient les traces des tortures) devait parfois être bouleversant. (...) Ils pouvaient se sentir meilleurs que les fidèles, ceux qui avaient fui, parce que, eux, ils n'avaient pas fui. Ils pouvaient vraiment se sentir meilleurs que les renégats, les lapsi, qui avaient succombé, parce que, eux, les martyrs, avaient persévéré. C'est dans cette situation, comme on le sait à partir de l'histoire, que se produisit quelques années plus tard, à Carthage, le schisme de Felicissimus et Novatus. À la source des tensions qui surgirent alors dans la communauté carthaginoise, se situait l'attitude des martyrs qui revendiquaient leurs droits. Ce furent eux, les meilleurs, qui semèrent la confusion. Et on peut affirmer, catégoriquement, que les martyrs - justement ceux qui avaient donné leur vie pour le Christ - ont démoli l'Église de Carthage. Les meilleurs, ceux qui du moins se considéraient comme tels et qui, en même temps, avaient leurs propres plans et leur volonté propre, détruisaient l'Église du Christ. C'est vraiment bouleversant. Non pas les renégats, non pas les faibles, ceux qui avaient trahi le Christ, mais les martyrs détruisaient et démolissaient l'Église. (...)

"Ces martyrs sont pour nous un avertissement. Ce qui témoigne de ton réel attachement au Christ, ce n'est même pas ta disposition à donner ta vie pour lui, mais plutôt ton humilité et ton désir de remplir non pas ta volonté mais celle du Christ.

"Peut-on s'étonner, à la lumière des documents ici analysés, que Dieu contrecarre parfois notre volonté, si l'on sait que la recherche de notre propre volonté est la source du plus grand mal et de notre malheur? La foi est un attachement au Christ et, en tant que telle, elle est un commencement d'amour. Or tu ne peux t'attacher à lui par ta volonté que dans la proportion oû tu te détacheras de ta propre volonté. Ainsi Dieu, qui nous aime, doit contrarier nos desseins, souffler nos visions comme on souffle un château de cartes, si ce sont seulement nos visions humaines et nos desseins humains. En définitive, ce qui se dressera devant nous doit être autre que ce que nous imaginons, conformément au principe selon lequel chacun devient un saint différent de ce qu'il aurait voulu être."

Tadeusz Dajczer, "Méditations sur la foi à l'école de la sainte Famille", F-X de Guibert (collection "Les amis de Juan Diego"), 2006, p. 33-35.


La discussion

 "Les démolisseurs de l'Église", de Tardivel [2006-11-13 01:03:11]