Justement non.

Le Forum Catholique

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Rémi -  2017-03-11 13:32:49

Justement non.

Donapaleu a expliqué une chose, et moi j'en ai expliqué une autre. On est bien avancés, avec ça.



Je suis d'ailleurs particulièrement bien placé pour savoir ce qu'a expliqué notre ami liseur puisqu'il l'a fait dans ce fil en m'apportant aimablement la contradiction et les lumières de sa propre réflexion sans toutefois me convaincre. C'est justement à cet échange que je fais allusion lorsque je réponds à Donapaleu que "j'en reviens à ce que je soutenais" , échange auquel de votre côté vous n'avez pas apporté de réflexion qui vous soit propre, ni d'ailleurs aucune, et je trouve donc un peu cavalier que vous prétendiez tout à coup balayer d'un revers de main mes arguments sans même les rappeler, ni les examiner vous-même, ni bien entendu les réfuter aucunement. Car pour ce faire il ne suffit pas d'écrire "Donapaleu a expliqué, Donapaleu a dit" , cela d'autant moins lorsqu'il concluait que lui et moi sommes d'accord sur les principes ...


Certes ce bon compagnon liseur du FC est aussi médecin ce qui donne un jour particulièrement intéressant à son point de vue, mais outre qu'il n'est pas "directement impliqué dans ce genre de problématique" sa qualité que nous respectons tous ne saurait suffire à assurer son autorité ici, car la question est d'ordre moral et non médical. Or sur ce plan il ne suffit pas que tel ou tel médecin ait dit ceci ou cela, car nous pourrions toujours convoquer le docteur Jacques qui nous expliquera que l'avortement n'est pas un problème, qu'il faut "laisser partir" les petits vieux et débrancher les comateux (pour libérer des lits et du matériel, peut-être, tenez ... mais je reviendrai sur le faux argument "utilitaire" ) et alors peut-être viendra-t-on nous dire que le Dr. Jacques a expliqué, que le Dr. Jacques a dit ...

Eh bien vous le concevez, en ces matières nous n'avons que faire de l'argument "Jacques à dit" , ou faux argument d'autorité, et puisqu'il s'agit d'une question de morale nous sommes tous fondés à l'examiner en raison, moi y compris ne vous déplaise.


D'abord je vois que vous m'avez mal lu, puisque moi même j'admets qu'il puisse y avoir une différence de degré de complexité entre la nutrition, l'hydratation et la respiration assistées ("hormis peut-être la complexité de l'appareillage" écrivais-je) et que mon raisonnement ne porte pas sur ce point, mais sur la nature de ces soins, que j'estime essentiellement identiques: ils ne visent pas une amélioration de l'état de la personne, encore moins une guérison, ils ne sont pas thérapeutique et en cela ne sauraient constituer un acharnement thérapeutique, ils visent simplement, nutrition, hydratation, respiration, le maintien en vie du patient: leur nature est semblable.

Ce sont des soins médicaux de base, tous trois nécessaires à la vie du patient et les interrompre conduit aussitôt à la mort. Tout particulièrement l'interruption de la respiration.

L'acharnement thérapeutique, vous le savez certainement pourtant, est une toute autre chose. Il s'agit d'un traitement médical (et l'on ne voit pas que la respiration, pas plus que la nutrition et l'hydratation, constitue un traitement médical) dont l'administration est sans proportion avec le résultat escompté. Typiquement, je le disais et c'est un exemple qui parle à tout le monde, une énième et douloureuse chimiothérapie pour un patient clairement mourant. Cette thérapie ne lui apportera a peu près rien, hormis un terrible et affreux sursis de quelques semaines, de quelques jours. C'est à bon droit que l'Eglise réprouve ces pratiques et recommande la cessation des soins inutiles, sans rapport avec leurs effets, et leur remplacement par les palliatifs à la douleur.


Or les patients sous respiration artificielle ne sont habituellement pas mourants, quand bien même ils sont dans le coma. De même Vincent Lambert n'est pas mourant, quand bien même il ne peut s'alimenter et s'hydrater seul et naturellement.

Et bien entendu, coupez le respirateur, supprimez l'alimentation ou l'hydratation, et le patient mourra. Dans les trois cas nous avons donc affaire à des soins de même nature , basiques et essentiels à la vie, tout l'inverse des thérapies acharnées, soins de base dont l'Eglise exige qu'ils soient prodigués pour l'alimentation et l'hydratation, ce qui me permet de déduire qu'il doit en aller de même pour la respiration, soin essentiellement semblable à ces deux autres quand bien même il serait plus complexe ou coûteux à administrer.


J'en viens donc à présent à "l'argument utilitaire" , l'argument du fric tout simplement, que pour ma part, pardonnez-moi, je trouve franchement odieux sous la plume d'un chrétien. Oui, maintenir la vie de personnes dans le coma a un coût pour la société, quelle que soit la complexité de leur appareillage. Débrancher Vincent Lambert, le laisser mourir de faim et de soif, libérerait un lit, une chambre, du personnel, du temps et de l'argent. Pourtant tous nous voulons que Vincent vive. Il en va tout simplement de même pour les personnes sous respirateur, à moins de vouloir leur mort par asphyxie, et il me semble d'ailleurs que vous bottez un peu en touche devant l'exemple tout à fait emblématique que vous donne Cath.o .

Par ailleurs l'argument du manque d'appareillage, outre qu'il n'est qu'un faible prétexte, des appareils il suffit d'en fabriquer (de même qu'il faut par exemple construire des prisons, plutôt que de prétexter le manque de place pour laisser des condamnés dehors, si l'on me permet le rapprochement) se retourne très facilement: s'il y a pénurie, s'il faut choisir, trier entre les patients, mieux vaut qu'une personne certes dans le coma mais autrement en bonne santé bénéficie du respirateur, elle sera toujours en vie demain, dans un an, dans dix ans, elle, plutôt que le blessé ou le malade qui risque bien plus de mourir incessamment en dépit de l'appareil !

A moins de commencer à considérer que certaines vies valent plus que d'autres d'être vécues, et que la personne dans le coma, en raison de son état, a moins de droits à un respirateur ou d'autres soins de base (un fauteuil et des activités adaptées pour M. Lambert par exemple, qui lui sont refusés) qu'une personne blessée, malade, mais lucide. Or bien sûr je ne doute pas que comme nous tous ici vous considériez qu'aucune vie ne vaut plus ou moins qu'une autre, fut-elle en apparence la plus misérable, la plus vaine, et l'on a tous en tête ce vocable terrible de "légume".


Je reviendrai une autre fois sur l'idée des "décrets divins" que vous évoquez et dont je trouve qu'ils ont bon dos lorsque ce sont des médecins qui doivent les discerner et les mettre en oeuvre, c'est à dire trier entre qui doit vivre, et qui doit manifestement mourir par "décret divin" ...
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