De quel livre est tiré l’extrait qui suit ? Et quel est l’auteur qui exprime à travers ces lignes son admiration pour les idées jansénistes ?

Le passage en gras est de mon fait

« Deux prêtres, deux hommes de foi et de génie : un flamand, Cornélius Jansen, évêque d’Ypres, un béarnais, Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran. En vingt ans de travaux acharnés, ils restaurèrent dans toute sa puissance la doctrine catholique originelle édifiée par saint Paul et par saint Augustin que, depuis saint Thomas d’Aquin, on s’était employé à affadir, à compromettre et à détourner de son sens.
« C’est en 1640 et 1641 que fut successivement publié à Louvain d’abord puis à Paris ensuite, l’Augustinus, énorme ouvrage qui constituait la synthèse de leurs études mais signé du seul Jansen, devenu Jansenius pour la circonstance (…) Ils avaient composé une véritable « bombe théologique » comme l’appellera Sainte-Beuve – dont l’explosion dévasta tout sur son passage à commencer par la Compagnie de Jésus qui avait vainement tenté d’en empêcher l’impression. (…)
« Autour de Duvergier de Hauranne et du couvent de Port Royal dont il était le directeur de conscience, se formait un mouvement religieux où se retrouvaient les plus grands et les meilleurs esprits du moment. Il n’était que temps pour les disciples d’Ignace de Loyola de réagir. Ils s’y employèrent sans scrupule – est-il besoin de le dire – mais aussi avec un acharnement sans exemple. Le combat, marqué par des pauses successives, se prolongea jusqu’à la Révolution française selon les historiens officiels. En vérité, sous des formes différentes, il se poursuit toujours et on le retrouve, à bien des égards, dans les conflits qui résultent de nos jours des déviations de Vatican II.
« Les Jésuites, au XVIIe siècle, ne soupçonnaient certes pas l’aventure dans laquelle ils s’engageaient. Leur démarche, au départ, fut des plus classiques. Ils voulurent « marginaliser » le mouvement pour mieux l’abattre, en le faisant passer pour hérétique sur le plan religieux – simple avatar du protestantisme – et subversif sur le plan politique – ultime sursaut de la Fronde. (…)
« Les Lettres à un Provincial, écrites dans un style éblouissant, où l’art de la polémique le disputait à la profondeur de l’analyse et à la puissance de la foi, défendaient, justifiaient, exaltaient l’Augustinus et dénonçaient les manœuvres et les perversions des Jésuites, en un mot les clouaient au pilori. Il y a, dans ces lettres, une humeur vengeresse et pourtant allègre qui a traversé les siècles et que l’on ne peut découvrir, même aujourd’hui, sans émotion. C’est la première campagne de presse des temps modernes et les Jésuites ne devaient jamais sans relever. « Pascal les a tué » constatera placidement Sainte-Beuve. (…)
« Le Jansénisme est une tentative de restauration de la doctrine catholique dans toute sa puissance et dans toute sa vigueur originelles. A ce titre d’ailleurs, il est à l’abri de l’injure du temps et demeure toujours d’actualité.
« Nul n’a pu le convaincre d’hérésie car il prend doctrine à sa source même. Il voulait armer l’Eglise pour faire face à la crise des temps modernes dont il avait pressenti les menaces avec une singulière acuité. Pour ce faire, il entendait privilégier la formation théologique des laïcs et introduire dans son enseignement les conquêtes les plus récentes de la Science et de la Raison, évitant ainsi qu’elles fussent captées par l’athéisme. Ce pourquoi Descartes et Leibnitz furent soutenus par Port Royal (1) et ce pourquoi – dans leurs Petites Ecoles – les Solitaires mirent au point les méthodes modernes de la pédagogie. Mais l’Eglise d’alors n’était plus assez forte pour saisir l’arme qu’ils lui tendaient. En la rejetant, en condamnant ceux qui la lui forgeaient, elle se résignait à une inéluctable déchéance fondée sur une compromission chaque jour plus accentuée. Avec un Monde dans lequel elle cherche à se perdre pour éviter de se retrouver. »

(1) « L’Eglise en tira rapidement les conséquences. Le Chapitre de l’Oratoire tenu en 1684 proclama « L’assemblée défend d’enseigner toute doctrine qui pourrait être suspecte de sentiments jansénistes pour la théologie et des opinions de Descartes pour la Philosophie… » (Note de l’auteur)

Je décerne une palme académique à celui qui aura été capable de répondre aux deux questions posées plus haut !