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" Moins on sera 'catho' et plus on sera 'chrétien'. ''
par Scrutator Sapientiæ 2017-02-11 09:01:41
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Bonjour Jean-Paul PARFU,

Il me semble vraiment que ma vision des choses, selon laquelle l'année 1945 représente une deuxième fondation ou rupture anthropologique, axiologique, civilisationnelle, comportementale, qui explique davantage ou, en tout cas, au moins autant, ce qui est arrivé par la suite, dans l'Eglise catholique (mais aussi dans l'Education nationale, cf. le plan Langevin-Wallon) que l'année 1789, complète votre propre vision sans la contredire.

Mais la "décivilisation", postérieure à la fin de la seconde guerre mondiale, dont j'ai déjà parlé, concerne l'ensemble du monde occidental, en tout cas l'ensemble de l'Europe occidentale, or le triptyque républicain, même s'il n'est pas "franco-français", n'a pas, ailleurs, l'importance et l'influence qu'il a en France.

Quant à la "colonisation" de l'Eglise catholique par des idées venues d'ailleurs, que certains ont fait passer, à juste titre ou non, pour des idées que l'on trouve chez certains Pères de l'Eglise, elle pointe le bout de son nez dans les années 1930, mais ne commence à poser des problèmes et à ne susciter une reprise en main officielle, sinon vraiment effective, qu'à partir de 1945 (plus précisément, à partir de 1942, en ce qui concerne le Père Chenu).

La question est aussi de savoir qui a mis dans la tête des clercs que "moins on est culturellement et formellement catholique, et plus on est spirituellement et vitalement chrétien", or, dans ce deuxième ordre d'idées, je suis bien obligé de mettre en cause une mystique, plus ou moins inspirée par un ouvrage : la mystique du "levain dans la pâte", qui a fait son apparition d'une manière elle-aussi postérieure à la fin de la seconde guerre mondiale.

Vous allez me trouver provocateur, mais j'affirme que si les clercs étaient, à ce point-là, attachés à la vraie liberté, à la véritable égalité, à la vraie fraternité,

- ils aimeraient et feraient aimer la liberté de l'esprit, au point d'accepter que les catholiques soient libres, à l'égard de ce que certains appellent "l'esprit du Concile", "l'esprit d'Assise", "l'esprit de l'Evangile" ou "l'esprit de Tibhirine", or ils ont bien du mal à l'accepter cette liberté de l'esprit ;

- ils aimeraient et feraient aimer l'égalité dans le discernement, au point d'accepter que les catholiques considèrent non seulement les mérites, mais aussi les limites de la stratégie globale qui est celle du christianisme catholique contemporain, lequel est essentiellement conciliateur ad extra, or ils ont bien du mal à accepter cette égalité dans le discernement ;

- ils aimeraient et feraient aimer la véritable fraternité, et non le consensualisme fraternitaire, croire-ensembliste et vivre-ensembliste, qui fonctionne à l'artificiel et au superficiel, et qui relève de la dictature de l'opinion, pour ne pas dire de l'émotion, or ils ont bien du mal à accepter de distinguer entre la véritable fraternité et la convivialité massifiée postmoderne.

Je suis en train de vous dire, encore une fois, d'une manière provocatrice, que si nous en sommes là où nous en sommes, c'est parce que nous sommes en présence de clercs catholiques qui chérissent bien moins la liberté, l'égalité, la fraternité, notamment dans le sens qui figure ci-dessus, qu'ils ne le disent souvent ou ne semblent souvent le dire.

Depuis 1945, nous sommes en présence de clercs catholiques qui auront été, successivement (pas tous, bien sûr), "communisants", au sens d'anti anti-communistes, puis "socialisants", au sens de "droits-de-l'hommiste de centre-gauche et de centre-ville", puis "sociétalisants", d'une manière qui n'est pas médiatiquement ni mondialistement incorrecte.

Or, il me semble vraiment que les principes généraux de la Révolution de 1789, au sens strict du terme, ne sont ni d'inspiration communiste, ni d'inspiration socialiste, ni d'inspiration sociétaliste, dans l'acception la plus objective de chacun de ces termes.

De quels principes généraux s'agit-il ? Entre autres : de l'anthropocentrisme, de l'individualisme, de l'utilitarisme.

Je suis prêt à reconnaître que ces principes sont tellement généraux qu'ils se sont prêtés à des concrétisations ou, au contraire, à des falsifications, qui ont débouché sur ce que nous connaissons, voire subissons, aujourd'hui, mais si les mots ont un sens, je ne vois pas en quoi les mots utilisés par les révolutionnaires DE 1789, les plus importants et les plus influents, EN 1789, légitiment par avance, d'une manière explicite et spécifique, le communisme, le socialisme, ou le "sociétalisme" qui se sont manifestés par la suite, aux XX° et au XXI° siècles.

Je suis convaincu que nous sommes en présence de clercs essentiellement conciliateurs ad extra, donc plutôt portées sur le suivisme, qui sont prêts à recourir à tous les sophismes imaginables pour justifier ce positionnement "fluvial" ou "liquide", et qui, par ailleurs, ne disposent pas d'une aptitude ou d'une aspiration à la réflexion personnelle susceptible de leur permettre d'entrer davantage en vigilance puis en résistance, face à l'esprit du monde.

Vous parlez du problème de l'Eglise de France comme s'il s'agissait avant tout ou seulement d'un problème d'adhésion idéologique à 1789.

Je ne dis pas que vous avez tort, mais moi je vous parle du problème de l'Eglise de France en ce qu'il s'agit notamment d'un problème de positionnement relationnel, de conformisation axiologique, à l'égard d'un monde contemporain dont l'idéologie effective ou officielle complète, mais aussi contredit, à plusieurs titres, les principes de 1789 au sens strict du terme.

Je vous remercie pour cet échange et vous souhaite une bonne journée.

Scrutator.

     

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