Ce cher Fabrice Hadjadj a compris beaucoup de choses. J'en veux encore pour preuve son dernier article dans "Limite" dont je cite quelques extraits:
"La chaire, avec sa situation médiane, sa hauteur, son abat-voix, mais surtout la nef tout entière en guise de caisse de résonance, est un dispositif qui permet précisément d’être entendu sans recourir à une amplification électrique. L’amplification est garantie par l’ampleur ménagée entre les pierres, de sorte que la voix du prêtre fait corps avec l’église, réverbérée par ses murs, resservie par ses voûtes. Quoi de plus incarné ? L’architecture n’est plus un espace abstrait où l’on se case : elle fait chœur, accomplit le service de la parole, devient la peau du Baptiste qui appelle à la conversion.
Or le traditionaliste (qui est le contraire du traditionnel) maintient la chaire, mais à la manière d’une image virtuelle : il en méprise la réalité physique, et reste persuadé qu’il est impossible désormais de parler sans microphone (ce qui n’est pas faux dès lors qu’il veut emballer la Bonne Nouvelle dans le ton de l’intimisme sentimental ou du psychologisme susurrant). Au lieu de prendre son église pour porte-voix, il achète l’ampli 400 Watts avec module anti-larsen, les colonnes de diffusion directives de 30 à 120 Watts selon la taille, le micro col de cygne MEX-1SW-450 et le micro de surface cardioïde à condensateur MEL-P… La voix ne crie plus dans le désert : c’est un murmure dopé par des haut-parleurs. Elle a dorénavant moins besoin de l’Esprit-Saint que du réseau de l’EDF, de son énergie nucléaire, la même que consomme le supermarché d’à côté. Et comme l’amplification électroacoustique entre en concurrence avec l’amplification naturelle du lieu, créant des parasitages, exigeant un déphasage des enceintes pour lequel l’ingénieur s’arrache les cheveux, l’église apparaît comme un « lieu difficile », au point que le traditionaliste en vient à convoiter une salle de conférence, pour mieux être entendu.
Nombreux sont les débats sur la liturgie, mais les rubricaires ont eu tendance à filtrer le moustique et engloutir le chameau. Ils ont sauvé leurs dentelles, et laissé se perdre la dentellière. Attention à l’amict, et qu’importe si les ornements sont fabriqués en Chine, si les cierges méprisent les abeilles et que les hosties soient pressées par des machines allemandes – pourvu qu’elles soient bien fines et blanches ! Ils ont gardé les apparences, tout en se laissant envahir par la marchandisation."
http://revuelimite.fr/dnh-58-en-chaire-et-en-voix
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