Cher Scrutator,
Dieu, que cette synthèse du courant dominant dans l'Eglise de François, est bien trouvée!
François pousse l'"inclusivisme périphériste" jusqu'à la caricature.
On peut néanmoins préciser d'où viennent ces tendances dans le christianisme. Selon moi, il est un peu pauvre de dire qu'il vient d'"idées chrétiennes devenues folles".
1. Tout d'abord, le christianisme est par nature "inclusiviste" parce qu'il est récapitulatif. Si "tout est récapitulé dans le Christ" qui "attire tout à Lui", pourquoi ne pas faire entrer les périphéries dans l'orbite de Celui dont l'attraction n'a pas forcément besoin d'être plus consciente que ne l'est Son identification aux pauvres et aux petits dans Mathieu XXV?
D'où la tendance du christianisme à sauver les gens malgré eux.
2. Le christianisme est naturellement "altérophile". Par "naturellement", j'entends que c'est sa pente naturelle. Celle-ci vient de l'injonction du christ à nous aimer les uns les autres, que les chrétiens interprètent de manière extensive, vers l'extérieur (au détriment de l'intériorité de l'amour fraternel au sein de la communauté), universelle, catholique (avec ou sans déviance de l'universalisme).
Mais l'"altérophilie" cherche aussi à prévenir la surprise de l'identification divine à ceux que l'on ne savait pas.
Si "le Moi divin du Christ", c'est l'autre, autant courir après l'autre avec empressement pour ne pas être pris en défaut. L'Evangile est plein du risque que les chrétiens se perdent alors qu'ils avaient cru servir le Seigneur, Qui pourra leur dire: "Je ne te connais pas", "Tu ne m'as pas reconnu", "tu t'es trompé, "tu n'es qu'un serviteur inutile"."
La course après l'autre est une recherche de sécurité dans le salut et une tentative de prévenir le risque de se perdre de bone foi.
3. Nous sommes inclusivistes par paresse intellectuelle et à titre préventif, en espérant que ceux que nous aurons sauvés malgré eux plaideront pour nous dans le Royaume des cieux. Notre altérophilie est aussi paresseuse, et le raisonement suivant, que nous déroulons sans le savoir, en marque la déviance:
-Le Christ a dit qu'Il n'était pas venu pour les bien-portants ni pour les justes, mais pour les malades et les pécheurs. Ayant rencontré le Christ, le chrétien incline à penser qu'il est justifié et guéri. Il est juste et bien-portant, il n'a donc plus besoin de la médecine du christ. Il doit la prodiguer à d'autres qui en ont plus besoin que lui.
-L'autre est toujours un malade qui s'ignore. Un malade et un damné. Heureusement que le chrétien est là pour le connecter au Sauveur! (Notre altérophilie débridée cache donc un mépris de l'autre qui n'est digne, ni de lui, ni de la charité.)
-La charité doit être empressée et pleine de délicatesse. Or il est délicat (et indélicat) de dire à un malade qu'il est malade. Donc on le lui tait par délicatesse.
-L'Evangile ne cessant de nous réserver des surprises, il est possible que le malade ne soit pas celui que l'on croit, mais nous-mêmes, avec notre poutre dans les yeux. De plus, le médecin Jésus dit qu'Il devient volontairement pour nous l'autre malade. Il ne nous demande pas de soigner le malade, mais seulement de le "visiter". Aussi nous sentons-nous toutes les raisons de taire sa maladie au présumé malade, et de l'inclure au bénéfice de la cure christique qu'est le salut des âmes.
Coment sortir de là? Est-il possible d'identifier en quoi, à chaque étape, ce raisonnement dévie et pèche? L'Evangile ne cessant de renverser la sécurité intérieure du serviteur inutile constament bousculé, de prévenir notre conscience contre les apparences trompeuses, de l'avertir que le processus important est caché, de favoriser "la découverte de l'inconscient"...?
Je ne suis plus très sûr de la citation, mais Jung ne disait-il pas que "Dieu est l'inconscient?"
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