§ I. De l’obsession
1633. 1° Le démon peut agir sur tous les sens extérieurs : a) Sur la vue, en apparaissant tantôt sous des formes repoussantes, pour effrayer les personnes et les détourner de la pratique des vertus, comme il le fit pour la Vble Mère Agnès de Langeac et bien d'autres ; tantôt sous des formes séduisantes, pour attirer au mal, comme il arriva souvent à S. Alphonse Rodriguez. b) Sur l'ouie, en faisant entendre des paroles ou des chants blasphématoires ou obscènes, comme on le lit dans la vie de la Bse Marguerite de Cortone ; ou en faisant du tapage pour effrayer comme il arrivait parfois à Ste Madeleine de Pazzi et au Bx Curé d'Ars. c) Sur le toucher, de deux façons, en infligeant des coups et des blessures, comme on le lit dans les bulles de canonisation de Ste Catherine de Sienne, de St François Xavier, et dans la Vie de Ste Thérèse, d'autrefois par des embrassements qui ont pour but de provoquer au mal, comme S. Alphonse Rodriguez le raconte de lui-même. Comme le remarque le P. Schram, il est des cas où ces apparitions sont de simples hallucinations produites par une surexcitation nerveuse ; même dans ce cas, ce sont de redoutables tentations.
1534. 2° Le démon agit aussi sur les sens intérieurs, l'imagination et la mémoire, et sur les passions, pour les exciter. Comme malgré soi, on est envahi par des images importunes, obsédantes, qui persistent malgré des efforts énergiques ; on se sent en proie aux bouillonnements de la colère, aux angoisses du désespoir, à des mouvements instinctifs d'antipathie, ou au contraire à des tendresses dangereuses et que rien ne semble justifier. Sans doute il est difficile parfois de décider s'il y a obsession véritable ; mais quand ces tentations sont à la fois soudaines, violentes, persistantes, et difficiles à expliquer par une cause naturelle, on peut y voir une action spéciale du démon. En cas de doute, il est bon de consulter un médecin chrétien, qui puisse examiner si ces phénomènes ne sont pas dus à un état morbide qu’une bonne hygiène peut atténuer.
1535. II. Conduite du directeur. Il doit joindre la prudence la plus avisée à la bonté la plus paternelle. a) Sans doute il ne croira pas, sans preuves sérieuses, à une véritable obsession. Mais, qu'il y ait obsession ou non, il doit avoir pitié des pénitents assaillis de tentations violentes et persistantes, et 1es soutenir par de sages conseils. Il leur rappellera en particulier ce que nous avons dit de la tentation, de la manière d'y résister, n° 992-918, et des rémèdes spéciaux contre la tentation diabolique, n° 223-224. b) Si, dans la violence de la tentation, des désordres se sont produits sans aucun consentement de la volonté, il rappellera qu'il n'y a pas de péché sans consentement. En cas de doute, il jugera qu'il n'y a pas eu faute, au moins grave, quand il s'agit d'une personne qui habituellement est bien disposée. c) Quand il s'agit de personnes ferventes, le directeur se demandera si ces tentations persistantes ne font pas partie des épreuves passives que nous avons décrites plus haut, n° 1426 ; et alors il donnera à ces personnes les conseils appropriés à leur état d'âme.
1536. d) Si l'obsession diabolique est moralement certaine ou très probable, on peut employer, d'une façon privée, les exorcismes prescrits par le Rituel Romain ou des formules abrégées ; dans ce cas, il est bon de ne pas prévenir la personne qu'on va l'exorciser, si on craint que cette déclaration ne trouble et n'exalte son imagination ; il suffit de l'avertir qu'on va réciter sur elle une prière approuvée par l'Eglise. Quant aux exorcismes solennels, on ne peut les employer qu'avec la permission de l'Ordinaire, et avec les précautions que nous allons signaler en parlant de la possession.
Source : Précis de Théologie Ascétique et Mystique de Tanquerey,
Desclée and Co, 1923
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde