Vaste question cher Regnum Galliae.
D'abord, le rite parisien tel qu'il existe en 1570 et comme les autes rites français (Lyon est un peu à part), est avant tout le rite romain que Charlemagne a étendu dans son empire au détriment de l'antique liturgie gallicane. De façon générale, le propre des messes est le même. En revanche, les prières au bas de l'autel ou celles de l'offertoire varient un peu par rapport au romain : tout cela se développe au Moyen-Âge. Les couleurs liturgiques sont différentes (blanc pour l'Avent, rouge pour le temps de la septagésime jusqu'au premier dimanche de carême et le temps après la Pentecôte, noir pour la quinzaine de la Passion, violet ou vert pour les fêtes des confesseurs...). Sur certains aspects, Paris a conservé des éléments romains antiques que Rome a simplifiés (le missel de saint Pie V provient du rite de la Curie et non de celui des grandes basiliques romaines), par exemple le chant de l'épître et de l'évangile à l'ambon.
Après la promulgation du bréviaire et du missel de saint Pie V, la question s'est posée d'adopter le rite désormais codifié pour toute l'église latine. Les chanoines de la cathédrale s'y sont unanimement opposés, s'estimant fondés à conserver les vénérables usages du diocèse.
En 1585 est publiée une nouvelle édition du missel, romanisée dans la forme (police latine et non plus gothique, ritus servandus et rubriques générales sur le modèle du missel de 1570...) mais pas sur le fond : les rites sont inchangés.
Mais, trente ans plus tard, on adopte une version révisée qui calque complètement le rite de la messe basse sur la messe romaine mais maintient l'essentiel des cérémonies de la grand-messe parisienne. Les légères différences au niveau du propre disparaissent, ainsi que les très nombreuses proses qu'on chantait après l'Alleluia (pour ne garder que celles qu'on connait aujurd'hui) et les lectures propres des messes fériales du mercredi et du vendredi. Les couleurs litirgiques sont maintenues.
Par la suite, sous les archiépiscopats de François de Harlay, Louis-Antoine de Noailles et Charles-Gaspard de Vintimille, on entre dans l'ère des liturgies néo-gallicanes qui, pour le coup sont novatrices. Ce sont elles que dom Guéranger brocarde. On supprime toutes les antiennes qui ne sont pas tirées de la bible, on compose de nouvelles hymnes et proses dans un beau latin classique, de nouvelles oraisons. L'unité est rompue avec le reste du monde latin, puisqu'on entend construire une liturgie nationale. Par exemple, le 3e dimanche de l'Avent n'est plus Gaudete mais Rorate (qui est le 4e à Rome), et c'est à peu près pareil pour toutes les messes.
La plupart des diocèses français adoptent au cours du XVIIIe des liturgies sur ce modèle.
Au XIXe siècle, le paysage liturgique français est particulièrement désordonné du fait du développement des nouvelles liturgies avant la Révolution, du traumatisme de cette dernière et de la départementalisation de la carte des diocèses.
Ainsi entre les années 1830 et la fin du siècle, tout le monde adopte le rite romain (et le rite romano-lyonnais pour Lyon). Pour Paris, cela se fait en 1875.
il est possible que, si on en était resté à la liturgie de 1585 ou à celle de 1615, les antiques traditions de la ville, qu'on a jetées avec l'eau du bain, se seraient plus facilement maintenues.
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