Amoris Laetitia et la recherche d'une éthique universelle par Chicoutimi 2016-05-07 14:11:32 |
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C'est évident, l'exhortation apostolique Amoris Laetitia a fait couler beaucoup d'encre. Et c'est normal. Il y a de ces textes qui, non seulement en raison de leur longueur mais aussi - et surtout - en raison de leur contenu, stimulent la réflexion et suscitent des interrogations. Par exemple, même après 50 ans, il y a encore des analyses et des commentaires des textes du Concile Vatican II.
Ceci étant dit, les orientations d'Amoris Laetitia font en sorte que je m'ennuie beaucoup de la clarté de Saint Jean-Paul II. Je suis d'ailleurs convaincu que l'encyclique Veritatis Splendor constitue la clef de voûte du pontificat de Jean-Paul II, et qu'elle constitue la consécration de l'enseignement de l'Église en matière de morale, laquelle est fondée sur la loi naturelle.
Avec l'exhortation apostolique Amoris Laetitia, assistons-nous à la consécration d'une redéfinition de la loi naturelle ?
En effet, il y a un passage du document papal qui mérite une attention particulière et qui représente peut-être le coeur du problème de cette exhortation :
« Dans cette même ligne, s’est exprimée la Commission Théologique Internationale : « La loi naturelle ne saurait donc être présentée comme un ensemble déjà constitué de règles qui s’imposent a priori au sujet moral, mais elle est une source d’inspiration objective pour sa démarche, éminemment personnelle, de prise de décision. » (AL, n. 305)
"Pour expliciter le fondement éthique des droits de l’homme, certains ont cherché à élaborer une « éthique mondiale » dans le cadre d’un dialogue entre les cultures et les religions. L’ "éthique mondiale" désigne l’ensemble des valeurs obligatoires fondamentales qui forment depuis des siècles le trésor de l’expérience humaine. Elle se trouve dans toutes les grandes traditions religieuses et philosophiques. Ce projet, digne d’intérêt, est significatif du besoin actuel d’une éthique ayant une validité universelle et globale." (n. 6)
"En 1993, des représentants du Parlement des religions du monde ont rendu publique une Déclaration pour une éthique planétaire qui affirme qu’ "un consensus existe déjà parmi les religions, susceptible de fonder une éthique planétaire : un consensus minimal concernant des valeurs contraignantes, des normes irrévocables et des attitudes morales essentielles". Cette Déclaration contient quatre principes. Primo, "pas de nouvel ordre du monde sans une éthique mondiale". Secundo, "que toute personne humaine soit traitée humainement". La prise en compte de la dignité humaine est considérée comme une fin en soi. Ce principe reprend la "règle d’or" qui se trouve dans beaucoup de traditions religieuses. Tertio, la Déclaration énonce quatre directives morales irrévocables (non-violence et respect de la vie ; solidarité ; tolérance et vérité ; égalité de l’homme et de la femme). Quarto, au regard des problèmes de l’humanité, un changement des mentalités est nécessaire afin que chacun prenne conscience de sa responsabilité impérieuse. C’est le devoir des religions de cultiver cette responsabilité, de l’approfondir et de la transmettre aux générations suivantes." (Note de bas de page no 9).
"Le document de la CTI s'oppose donc à une conception figée, qui ferait de « la loi naturelle un ensemble déjà constitué de règles qui s'imposent a priori au sujet moral ». La loi naturelle n'est pas une norme fixée une fois pour toutes, de manière extérieure à l'individu : ce serait alors « une forme d'hétéronomie insupportable à la dignité de la personne humaine libre ». D'ailleurs, la Commission se garde bien de parler de « normes ». Et elle choisit, pour la définir, de présenter cette loi naturelle de manière dynamique, pour laisser toute sa place à la liberté humaine et à la conscience, "source d'inspiration objective pour la démarche de chacun, éminemment personnelle, de prise de décision". Une « source » qui fait notre commune humanité." (Isabelle De Gaulmyn, La Croix)
"Au point de départ de ces conceptions [erronées], on note l'influence plus ou moins masquée de courants de pensée qui en viennent à séparer la liberté humaine de sa relation nécessaire et constitutive à la vérité. Ainsi, on repousse la doctrine traditionnelle de la loi naturelle, de l'universalité et de la validité permanente de ses préceptes ; certains enseignements moraux de l'Eglise sont simplement déclarés inacceptables ; on estime que le Magistère lui-même ne peut intervenir en matière morale que pour « exhorter les consciences » et « pour proposer les valeurs » dont chacun s'inspirera ensuite, de manière autonome, dans ses décisions et dans ses choix de vie." (VS, n. 4)
"je voudrais réaffirmer que tous les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux ne doivent pas être tranchés par des interventions magistérielles." (AL, n. 3)
"Ce serait une très grave erreur que d'en conclure que la règle enseignée par l'Eglise est en elle-même seulement un " idéal " qui doit ensuite être adapté, proportionné, gradué, en fonction, dit-on, des possibilités concrètes de l'homme, selon un "équilibrage des divers biens en question." (VS, n. 103)
"D’autres formes d’union contredisent radicalement cet idéal, mais certaines le réalisent au moins en partie et par analogie." (AL, n. 292)
"La doctrine de l'Eglise et, en particulier, sa fermeté à défendre la validité universelle et permanente des préceptes qui interdisent les actes intrinsèquement mauvais est maintes fois comprise comme le signe d'une intolérable intransigeance, surtout dans les situations extrêmement complexes et conflictuelles de la vie morale de l'homme et de la société aujourd'hui, intransigeance qui contrasterait avec le caractère maternel de l'Eglise. Cette dernière, dit-on, manque de compréhension et de compassion. Mais, en réalité, le caractère maternel de l'Eglise ne peut jamais être séparé de la mission d'enseignement qu'elle doit toujours remplir en Epouse fidèle du Christ qui est la Vérité en personne : « Educatrice, elle ne se lasse pas de proclamer la norme morale... L'Eglise n'est ni l'auteur ni l'arbitre d'une telle norme. Par obéissance à la Vérité qui est le Christ, dont l'image se reflète dans la nature et dans la dignité de la personne humaine, l'Eglise interprète la norme morale et la propose à tous les hommes de bonne volonté, sans en cacher les exigences de radicalisme et de perfection." (VS, n. 95)
"Par conséquent, un Pasteur ne peut se sentir satisfait en appliquant seulement les lois morales à ceux qui vivent des situations ‘‘irrégulières’’, comme si elles étaient des pierres qui sont lancées à la vie des personnes. C’est le cas des cœurs fermés, qui se cachent ordinairement derrière les enseignements de l’Église « pour s’asseoir sur la cathèdre de Moïse et juger, quelquefois avec supériorité et superficialité, les cas difficiles et les familles blessées". (AL, n. 305)
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