Instructions pour la lecture de l’exhortation post-synodale "Amoris lætitia"
par Angelo Bellon O.P.
La question la plus controversée, dans l’exhortation "Amoris lætitia", est celle qui concerne l’accès des divorcés remariés à la communion, qui n’est pourtant jamais expressément mentionnée.
Il faut noter que, surtout dans le chapitre 8, le langage employé est parfois très nuancé et qu’il peut se prêter à des jugements non seulement différents, mais carrément opposés entre eux.
C’est pourquoi, précisément à propos de ce chapitre, je souhaite communiquer quelques réflexions générales avant de procéder à un examen des expressions qui génèrent le plus de discussions.
CRITÈRES GÉNÉRAUX DE LECTURE
1. Le premier critère de lecture est celui de la perspective dans laquelle l’exhortation doit être lue, si l’on ne veut pas la déformer.
Cette perspective a été fournie par Jean-Paul II dans son encyclique "Veritatis splendor", en particulier dans la note n° 100 :
“Le développement de la doctrine morale de l’Église est semblable à celui de la doctrine de la foi. Les paroles qui ont été prononcées par Jean XXIII à l’occasion de l’ouverture du concile Vatican II (11 octobre 1962) s’appliquent également à la doctrine morale : 'Il faut que la doctrine chrétienne dans son intégralité, certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d’une manière qui réponde aux exigences de notre temps. En effet le dépôt même de la foi - autrement dit les vérités qui sont contenues dans notre vénérable doctrine - est une chose et la forme sous laquelle ces vérités sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée, en est une autre'”.
C’est donc ici que l’on trouve le principe herméneutique ou d’interprétation : les documents du magistère, y compris ceux qui sont relatifs à des questions de morale, doivent être interprétés selon l’herméneutique de la continuité et de l’approfondissement. Et non pas selon l’herméneutique de la discontinuité, de la rupture ou du tournant par rapport au magistère de toujours.
Le progrès de la doctrine morale de l’Église a lieu sous l’action du Saint-Esprit qui permet d’accéder graduellement à la connaissance de la vérité tout entière, sans jamais contredire ou renier le magistère précédent.
Il s’agit donc d’un progrès homogène et non pas dialectique.
2. Une fois établi ce préambule fondamental, il faut lire l’exhortation "Amoris lætitia" à la lumière du magistère précédent, parce qu’elle le continue et l’approfondit, ce qu’elle affirme du reste elle-même à plusieurs reprises, comme par exemple lorsqu’elle dit, au n° 79 :
“C’est pourquoi, tout en exprimant clairement la doctrine, il faut éviter des jugements qui ne tiendraient pas compte de la complexité des diverses situations ; il est également nécessaire d’être attentif à la façon dont les personnes vivent et souffrent à cause de leur condition".
Puisque c’est surtout le chapitre 8 de l’exhortation qui a suscité les lectures les plus disparates et les plus contradictoires, il est nécessaire de dire que l’interprétation exacte, celle qui est indiquée par le magistère, est celle qui est donnée "in meliorem partem", si l’on peut s’exprimer ainsi, c’est-à-dire dans la ligne de la continuité.
Ou, plutôt, seule cette lecture permet de comprendre le texte sans ambigüités et sans contradictions.
3. Voilà pourquoi la lecture "in meliorem partem" n’est pas confrontée à des objections qui lui barrent la route, tandis que, de son côté, celle qui est donnée "in pejorem partem", c’est-à-dire selon l’herméneutique de la rupture, ne conduit nulle part, mais au contraire elle se heurte à une myriade d’affirmations du magistère et elle se révèle peu concluante et erronée.
http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1351288?fr=y
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