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A rapprocher...
par Rodolphe 2016-04-17 15:19:22
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de l'analyse de l'Abbé de Tanouarn ICI qui figure dans un autre fil.

"...Certains adversaires de l’exhortation se sont focalisés sur deux lignes du numéro 305 et sur la note qui suit. Je cite : « Il est possible que dans une situation objective de péché – qui n’est pas subjectivement imputable ou qui ne l’est pas pleinement – l’on puisse vivre dans la grâce de Dieu, qu’on puisse aimer et qu’on puisse également grandir dans la vie de la grâce et dans la charité, en recevant à cet effet l’aide de l’Église ». Et la note poursuit : « Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l’aide des sacrements ». En omettant de lire la précision entre tirets, sur la situation objective de péché qui n’est pas subjectivement imputable, et en confondant « vivre dans la grâce », recevoir des grâces (actuelles) et « être en état de grâce », certains vont jusqu’à dire (je l’ai entendu de mes oreilles par un prêtre au cours d’une conférence donnée au Centre Saint Paul) que le Pape par ces quelques lignes, remet en question toute la théologie catholique de l’état de grâce et du péché mortel. Il ne parle pourtant ni de l’un ni de l’autre.

De l’importance de la subjectivité de chacun

En réalité, le Souverain Pontife veut s’adresser à chaque fidèle comme un sujet libre, qui a sa propre histoire, ses difficultés mais aussi sa lumière propre. Cette importance de la subjectivité de chacun que François entend souligner, comme cela n’avait jamais été fait par un Pape dans l’histoire de l’Église, elle me semble se trouver très clairement dans saint Thomas, même si, pour des raisons pastorales, il est vrai que le pape Jean-Paul II insistait peu sur cette dimension de l’enseignement du Docteur angélique : dans la question 19 de la IaIIae, on découvre par exemple que celui qui croit que forniquer est un bien et qui ne fornique pas commet un péché. Thomas dit la même chose, au même endroit, à propos de la foi au Christ : « Si croire au Christ est proposé par la raison de tel individu comme un mal, cela signifierait que sa volonté se porterait au Christ comme à un mal, alors même que la foi au Christ est par soi un bien et qu’elle est nécessaire au salut ». Thomas cite souvent la formule de l’Ecclésiastique : « Dieu a remis l’homme entre les mains de son conseil ». Il faudrait ajouter que l’homme doit suivre ce conseil, même lorsqu’il s’avère erroné. S’il ne le suit pas, il ne peut pas être dans le bien.

Certes l’article 6 de la même question rappelle la dimension objective de l’ordre moral et ajoute que quelle que soit l’intention d’un individu, s’il choisit le mal (en le prenant pour un bien) il risque de le payer, parce que c’est à la volonté même de Dieu qu’il s’oppose et que rien ne peut être construit sur une telle opposition. Mais il ajoute, conformément aux développements de l’article précédent, que cette erreur que l’individu risque de payer, néanmoins elle l’excuse de toute faute du moment qu’elle touche à telle ou telle circonstance inconnue ; en revanche, note le Docteur angélique, elle ne l’excuse pas si elle s’avère substantielle. Je veux dire que les principaux préceptes de la loi morale sont connus de tous et nul n’est censé les ignorer. L’ignorance substantielle d’un précepte de la loi (en l’occurrence : Tu ne commettras pas d’adultère) ne peut être qu’une ignorance dite pharisaïque ou affectée. Lorsque l’ignorance est franche (portant sur telle ou telle circonstance de la loi) alors elle est pleinement excusante.

On voit bien qu’on ne peut pas lire saint Thomas en choisissant l’article cinq contre l’article six ou l’article six contre l’article cinq. Il est nécessaire d’envisager un double enseignement : d’une part le péché est objectif, le mal est objectif, le péché et le mal sont en cela une seule et même chose (ce que Mgr Lalanne avait paru oublier à propos de la pédophilie dans une émission récente de RCF) et voilà l’article six ; et d’autre part, nous devons avoir égard à la subjectivité pécheresse, soit qu’elle aggrave son propre péché par une intention plus mauvaise que l’acte matériel qui est le sien, soit qu’elle diminue ou même qu’elle excuse la gravité de son crime par une forme d’ignorance non-coupable de sa part, c’est le sens du terrible article cinq.

Le Pape, directeur de conscience universel, en ces temps de crise ecclésiale et de pénurie de prêtres, s’adresse ou veut s’adresser à chacun d’entre nous, car, comme le disait Benoît XVI dans un autre contexte, « nul n’est de trop dans l’Église ». Il prend chacun là où il est et ne songe pas à imposer d’emblée tout un code moral exigeant à ceux qui ne le connaitraient pas. Là encore, Thomas d’Aquin nous donne une grande leçon de souplesse, expliquant dans la IIIa Pars de sa Somme théologique, que tout homme est membre, au moins en puissance, du Corps mystique du Christ qui est l’Église.

C’est dans cette universalité ecclésiale revendiquée, c’est dans un esprit missionnaire (et non dans un confessionnalisme étriqué) qu’il faut lire l’exhortation apostolique sur la Joie de l’amour.".

     

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