Bonjour Abenader,
1. Je suis de ceux qui pensent que la référence explicite, objective, spécifique, à la loi naturelle, est la seule manière de donner un fondement solide
a) au véritable dialogue interreligieux, et non au consensus pseudo-religieux, plus respectueux de l'esprit du monde que de la loi naturelle, en ce que le consensus pseudo-religieux n'oppose presque rien au relativisme et au subjectivisme,
et
b) à la liberté responsable en matière religieuse, et non à la confusion contemporaine entre liberté et licence,
2. Se pose ici la question du fondement de la loi naturelle et du contenu de la loi naturelle,
- la conscience humaine, éclairée par la raison, mais obscurcie par le péché, ne pouvant être, à mon sens, le seul fondement de la loi naturelle, l'autre fondement étant la composante "sapientielle" de la Parole de Dieu,
- la loi naturelle ne pouvant faire autorité, être instituante, que si elle comporte deux dimensions, une dimension normative et une dimension objective, afin qu'elle soit appréhendable, communicable, compréhensible, explicitable.
3. Mais cette question du fondement et du contenu de la loi naturelle débouche elle-même sur d'autres questions :
- les croyants invités à dialoguer sont-ils vraiment en mesure de converger, en direction d'une conception commune, un tant soit peu précise, de ce fondement et de ce contenu de la loi naturelle, alors que tous les croyants ne se réfèrent pas à une même conception de la conscience humaine ou à une même conception de la Parole de Dieu ?
- si l'Eglise catholique revendique une certaine forme de "chef-de-filat" en matière de dialogue interreligieux, en quoi son attitude, en matière de dialogue interreligieux, se distingue-t-elle d'un "annexionisme axiologique", par "sollicitation", chez les croyants non chrétiens, d'éléments inhérents à sa propre vision, donc d'une manière pas aussi "ouverte" et "pluraliste" qu'elle le prétend ?
4. Et surtout, ne ferait-on pas subir "un changement de paradigme" au dialogue interreligieux, en le faisant passer
- d'un dialogue interreligieux, voire interspirituel, exclusivement entre croyants,
a) par agglomération ou par juxtaposition de différences qui ne sont pas que de forme,
b) par minimisation du fait qu'elles reflètent de véritables divergences de fond,
- à un dialogue éthique, notamment entre croyants, ce dialogue éthique étant orienté en direction d'un horizon placé sous le double signe de la normativation et de l'objectivation, a minima, des grandes lignes de la conception catholique de la loi naturelle ?
5. Le dialogue interreligieux
- reflète-t-il plutôt une "évangélisation" subliminale, au bénéfice et à destination des croyants non chrétiens,
ou
- relève-t-il plutôt d'une "axiologisation" de l'homme et du monde contemporains, notamment mais pas seulement entre croyants,
le "leadership" de l'Eglise catholique et le "partnership" des religions et traditions croyantes non chrétiennes n'étant pas tout à fait de même nature, s'il s'agit d'une évangélisation ou s'il s'agit d'une axiologisation ?
6. En d'autres termes, y a-t-il plutôt une différence de degré, ou plutôt une différence de nature, entre Assise 1986 et Assise 2011 ?
Ce sont là quelques questions que je me pose ; merci beaucoup pour tout élément de réponse.
Bonne journée.
Scrutator.