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Longue interview du cardinal Burke
par Jean Kinzler 2015-10-04 19:54:21
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Jean-Sébastien Ferjou : Eminence, vous venez de publier un livre, "Un Cardinal au cœur de l'Eglise" [aux éditions Artège]. L’année qui vient de s’écouler a été mouvementée pour l'Eglise et pour vous, qui vous êtes retrouvé au cœur de plusieurs polémiques pour avoir exprimé très clairement des réserves au sujet des positions du pape François sur le mariage et la famille. Quel regard posez-vous sur l'année que vous venez de vivre ?
Cardinal Burke : J'ai expérimenté un changement dans ma mission au sein de l'Eglise. Je suis serein, la nouvelle mission que le pape m’a confiée à la tête de l'ordre de Malte est tout aussi importante que le débat sur le mariage et la famille.

Il demeure qu’en tant que cardinal, je suis assurément très engagé dans le débat pour défendre l'enseignement constant de l'Eglise sur le mariage.

C’est un moment difficile dans l’Eglise mais chacun doit faire son devoir. J'espère faire le mien dans la situation actuelle.

Avez-vous été triste de quitter la signature apostolique [la plus haute instance judiciaire en droit canon, l’équivalent de la cour de cassation vaticane ndlr], vous qui êtes juriste ?
Oui. J'ai exprimé justement dans mon livre que cela avait été un changement triste car je suis un juriste et je me trouvais très bien à la signature apostolique. Au sein de cette cellule, il y a une équipe très compétente et bien préparée humainement et spirituellement. Il me semble normal d'être triste de laisser derrière moi une telle ambiance.

Le pape a également décidé que vous ne feriez plus partie de la Congrégation pour (la nomination) des évêques, en vous nommant à la congrégation pour la cause des Saints, s’agit-il à vos yeux d’une manière de vous éloigner des débats actuels de l'Eglise et de ses lieux de pouvoir ?
Je ne sais pas. Chaque cardinal doit servir auprès d'une ou plusieurs congrégations. Je dois désormais servir dans une autre que celle où j’oeuvrais auparavant, c’est ce que je fais. Je fais aussi partie de la congrégation pour le culte divin, du conseil pontifical pour les textes législatifs et du conseil de la secrétairie d’Etat pour les affaires des relations avec les Etats.

Dans le livre, vous évoquez beaucoup votre vision sur la famille, mais vous abordez également d'autres questions comme la bioéthique ou les enjeux auxquels l’Eglise catholique fait face aujourd’hui. Quel est le regard que vous portez sur l'évolution de l'Eglise sous ce pontificat face aux défis du monde contemporain ? Où pensez-vous que l'Eglise aille à l'heure actuelle ?
Je pense que l'Eglise continuera toujours, même dans les temps de contestation, à suivre la parole du Christ, notamment sur la question du mariage et de son indissolubilité. Nous devons absolument avoir une meilleure communication sur l’enseignement de l’Eglise sur le sujet et mieux préparer les personnes qui vont se marier au sacrement du mariage.

Pour moi, il est impossible pour l'Eglise de changer son enseignement sur le mariage, qui est un enseignement fondé sur la parole même du Christ.

On sent à la lecture du livre que vous êtes très attaché -bien évidemment- aux messages de l'Eglise mais très attaché aussi à la stabilité de l’institution qu’elle est également et que vous avez été perturbé par ce qu’on a vu dans la presse américaine qui vous associait à une tentative de « coup d’Etat » contre le Pape. Comment pensez-vous parvenir à défendre à la fois votre message – ce que vous considérez comme le cœur du message de l’Eglise – et la nécessité de respecter l'unité de l'Eglise ?
Il importe pour moi d’assumer ma responsabilité pour défendre l'enseignement de l'Eglise. J'ai fait beaucoup de conférences et j'ai écrit sur le sujet. Je n’ai jamais fait partie de complots ni d’opérations clandestines contre le Pape. C'est une absurdité, créée peut-être pour jeter sur moi une lumière moins positive…

Le pape vient de publier deux textes, deux motu propio sur le mariage [qui visent à simplifier les procédures pour annuler un premier mariage religieux en vue de la célébration d'un second ndlr]. Il a fait le choix d’aborder la question de nullité des mariages catholiques en allant sur un terrain très juridique, plutôt que théologique. Le terrain juridique est le vôtre. Quelle est l'analyse que vous faites des deux décisions qui ont été annoncées le week end dernier ?
En vérité, je n'ai pas eu le temps d'analyser les mots du motu proprio qui ont été publiés pendant un voyage que j’ai fait aux Etats-Unis. Pour l’instant, je n'ai pu lire qu'une seule fois ces textes. Ils sont assez remarquables mais je dois étudier plus la chose avant de pouvoir me prononcer plus avant.

Ces motu proprio interviennent à quelques jours du Synode sur la famille…
Oui, le Pape a voulu faire de la discussion sur les conditions d'accès à la nullité du mariage un enjeu central du travail du synode. Il a décidé, ce qui est sa prérogative, de publier ces textes avant le synode, de manière somme toute assez rapide alors que la commission papale pour le révision du procès pour la déclaration de nullité du mariage est ouverte depuis une année.

Pensez-vous que ces décisions du Pape laissent augurer d'un climat serein pour le synode sur la famille ?
Je ne sais pas dans quel état d’esprit les pères synodaux ont reçu les motu proprio. Je ne suis pas un père synodal, je n'ai pas parlé avec des pères synodaux. Malheureusement, j'étais hors de Rome durant quasi tout le mois de septembre.

>>> Lire également - Synode sur la famille : pourquoi le comportement de monarque de François ne plaît pas à tous les Pères synodaux

Durant l'année dernière, vous avez dit que le Pape était certes le souverain pontife mais qu’il n'avait pas un pouvoir absolu et qu'il n'était pas possible pour lui de changer le dogme de l'Eglise, avez-vous l'impression que les motu proprio sont une manière détournée de revenir sur le dogme ?
Je ne sais pas, ces textes sont la proclamation de principes très significatifs qui ont assurément une portée doctrinale mais encore une fois, je ne suis pas encore prêt à porter un jugement sur leur portée.

Certainement nous pouvons observer que le terrain choisi par le pape n’est pas celui de la doctrine. Cependant, toutes les disciplines de l’Eglise, la discipline juridique comme les autres, existent seulement pour sauvegarder et promouvoir la doctrine.


Suite, avec 3 pages d'interview sur atlantico.fr

     

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