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Quelques réflexions du bienheureux Cardinal Newman
par Chicoutimi 2015-06-21 04:18:08
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Le Cardinal John Henry Newman, qui fut béatifié par Benoît XVI, peut être considéré à la fois comme un théologien important et comme un guide spirituel sûr. Le philosophe Jean Guitton le qualifiait même de "penseur invisible de Vatican II". Avant sa conversion au catholicisme, Newman avait lancé un vaste mouvement de renouveau au sein de l'anglicanisme : le "Mouvement d'Oxford". En 1845, Newman quitte l'Église anglicane pour rejoindre l'Église catholique. En 1879, le Pape Léon XIII le fait cardinal.

Voici quelques éléments de réflexion du bienheureux Cardinal Newman :

1- La sainteté et le ciel : « Si quelqu’un entrait au ciel sans la sainteté, il n’y serait pas heureux : ce ne serait donc pas lui faire une grâce que de l’y autoriser.

Nous nous faisons volontiers du ciel une image fausse, comme une réplique de la terre : j’entends pas là un endroit où chacun choisit et agit à son gré. […] Nous croyons pouvoir nous réconcilier avec Dieu n’importe quand, à notre gré, comme si rien d’autre n’était exigé des hommes qu’un moment d’attention exceptionnelle à leur devoir religieux, quelque respect à leurs derniers instants pour le service de l’Église, comme les hommes d’affaires mettent en ordre leurs lettres et leurs papiers avant de partir en voyage ou d’établir un bilan. […]

Si donc un homme sans religion (à supposer que ce soit possible) entrait au ciel, il éprouverait à coup sûr une grande déception. Avant, certes, il pouvait s’imaginer qu’il y serait heureux; mais une fois entré, il n’y trouverait rien que ce qu’il avait soigneusement évité sur terre, aucune activité qu’il ne déteste ou ne méprise, rien qui le relie au reste du monde, le mette à l’aise, l’accueille et lui offre le repos. Il se sentirait seul, coupé par la Puissance suprême de tout ce à quoi son cœur reste accroché. Pire encore : il serait en présence de cette Puissance suprême à laquelle sur terre il ne voulait jamais s’arrêter à penser, qu’il verrait désormais comme la force destructrice de tout ce qu’il tient pour précieux et aimable. Oh ! il serait incapable de supporter la vue du Dieu vivant : le visage du Très-Saint ne lui procurerait pas la joie. […] Seuls les saints peuvent regarder le Très-Saint : sans sainteté, l’homme ne supporte pas la vue du Seigneur.

Nous voyons donc que la sainteté, c’est-à-dire le détachement intérieur de ce monde, est indispensable pour que nous entrions au ciel, car le ciel n’est pas le ciel, n’est pas le lieu de la félicité, pour ceux qui ne sont pas saints. […]

Je vais même oser aller plus loin, et dire, parole redoutable mais juste, que si nous voulions imaginer une punition pour une âme mauvaise, réprouvée, peut-être n’y en a-t-il pas de plus grande que de la faire venir au ciel. Le ciel serait l’enfer pour un être sans religion. » (p. 38-40)


2- La conversion et la vraie religion: « Dieu agit avec chacun de nous de manière différente; certains hommes ne parviennent à la conviction que lentement, d’autres rapidement; chez les uns elle est le fruit de beaucoup de réflexions et de raisonnements, chez d’autres d’une illumination soudaine. […] Certains hommes sont convertis par le simple acte d’entrer dans une église catholique; d’autres, par la lecture d’un seul livre; d’autres encore par une seule doctrine. Ils ressentent le poids de leurs péchés, et ils voient que la religion doit venir de Dieu qui, seul, possède le moyen de leur pardonner. Ou bien ils sont touchés et subjugués par la sainteté évidente, la beauté et (j’oserais dire) le parfum de la religion catholique.

Et [Dieu] peut bénir les circonstances les moins propices; Il peut nous faire avancer au moyen de nos erreurs; Il peut transformer nos erreurs en révélation; Il peut nous convertir, s’Il le veut bien, à travers l’obstination ou la volonté égoïste ou la superstition même, qui se mêlent à nos sentiments plus nobles […]. Combien plus peut-Il jeter sur notre chemin une lumière surnaturelle, s’il Lui plaît de le faire, et nous donner une juste perception du sens de l’Écriture, et une saisie de la Tradition, que nous ne pourrions le faire par nos propres forces.

Or, la vraie religion représente le sommet et la perfection des fausses religions : elle réunit en elle tout ce qu’il y a de bon et de vrai, qui subsiste dans chacune individuellement. […] Si bien, en effet, que si un esprit religieux était élevé dans une forme quelconque du paganisme et sincèrement attaché à celle-ci, et se trouvait ensuite exposé à la lumière de la vérité, il serait conduit de l’erreur à la vérité, non en perdant ce qu’il possédait déjà, mais en gagnant ce qu’il ne possédait pas encore, non en étant dévêtu mais en étant « revêtu par-dessus » […]. La vraie conversion possède un caractère positif, non un caractère négatif. » (p. 41-43)

3. Les dogmes et la foi : « Comme Dieu est un, l’impression qu’Il nous donne de Lui-même est une; ce n’est pas une chose constituée de diverses parties; ce n’est pas un système; ce n’est pas non plus quelque chose d’imparfait, qui aurait besoin pour être complet d’une contrepartie. C’est la vision d’un Objet. Lorsque nous prions, nous ne nous adressons pas à un assemblage de notions ou à un credo, mais à un Unique Être personnel; et lorsque nous parlons de Lui, nous parlons d’une Personne, et non d’une Loi ou d’une Manifestation. […] et ainsi les dogmes catholiques ne sont en fin de compte que les symboles d’un Fait divin qui, loin d’être entièrement cerné par ces mêmes propositions, ne serait ni épuisé ni sondé dans ses profondeurs par des milliers d’autres. […]

Mais voici en quoi les credo nous apportent une aide supplémentaire : les déclarations qui y sont faites, les distinctions, mises en garde et autres, appuyées sur l’Écriture et éclairées par elle, appellent, peut-on dire, du ciel l’image de celui qui est à la droite de Dieu […]. » (p. 51-52)

4. La conscience et le Pape : « Si après un dîner, j’étais obligé de porter un toast religieux – ce qui évidemment ne se fait pas – je boirais à la santé du Pape, croyez-le bien, mais à la conscience d’abord, et ensuite au Pape.

La conscience n’est pas un égoïsme calculé, ni un désir d’être cohérent avec soi-même; mais elle est la messagère de Celui qui, dans le monde de la nature comme dans celui de la grâce, nous parle à travers le voile, et nous instruit et nous gouverne par ses représentants. La conscience est le Vicaire originel du Christ. Elle est le prophète qui nous révèle la vérité, le roi qui nous impose ses ordres, le prêtre qui nous anathématise et nous bénit; et même si le sacerdoce éternel de l’Église venait à disparaître, en elle le principe sacerdotal survivrait et se poursuivrait.

La défense de la loi morale et de la conscience est la raison d’être du Pape. Sa mission répond aux plaintes de ceux qui souffrent de l’insuffisance de la lumière naturelle. Et l’insuffisance de cette lumière naturelle est la justification de sa mission. […] Le sens du bien et du mal […] est si subtil, si capricieux, si facilement détourné, obscurci, perverti, il est si délicat à manier, si marqué par l’éducation, par l’orgueil ou par la passion, il est si partial et d’un équilibre si peu assuré que, dans la lutte pour l’existence au milieu des travaux et des conquêtes de l’esprit humain, il devient le plus ardu et le plus obscur des guides. Voilà pourquoi, dans l’intention de Dieu, l’Église, la papauté, la hiérarchie répondent à un besoin profond.

Mais de peur que ma pensée ne soit mal comprise, je tiens à répéter que lorsque je parle de la conscience, j’entends la conscience telle qu’elle est en vérité. Si elle a le droit de s’opposer à l’autorité suprême du pape, lorsque celle-ci n’est pas infaillible, elle doit être autre chose que ce misérable faux-semblant qui, comme je l’ai dit, prend maintenant le nom de conscience. Pour qu’elle puisse être dans tel ou tel cas particulier le guide sacré et souverain qui prévaut sur la voix du pape, il faut que sa décision soit précédée d’une sérieuse réflexion, de la prière et de tous les moyens qui permettent d’arriver à une opinion juste sur le sujet en question. […]

Le chrétien doit vaincre dans sa nature cet esprit vil, étroit, égoïste, et bas qui pousse, dès qu’on entend parler d’un ordre, à se placer en opposition avec le supérieur qui donne cet ordre, à se demander si le supérieur n’outrepasse pas son droit, et à se réjouir d’introduire le scepticisme dans les jugements et dans l’action. Il doit renoncer à toute détermination obstinée d’exercer le droit de penser et de dire tout ce qu’il lui plaît […]. Si cette règle nécessaire était observée, les conflits entre l’autorité du pape et l’autorité de la conscience seraient extrêmement rares. » (p. 63-65)

5. Chacun a une mission : « Dieu m’a créé pour lui rendre quelque service précis : Il m’a confié quelque œuvre qu’Il n’a pas confiée à un autre. J’ai ma mission; je peux bien ne pas la connaître en cette vie, mais elle me sera révélée dans l’autre. De quelque manière, je suis nécessaire à Dieu pour l’exécution de Ses desseins, aussi nécessaire à ma place qu’un Archange à la sienne – quoique, à la vérité, si je fais défaut, Il puisse y appeler un autre que moi, puisqu’Il peut changer les pierres mêmes en enfants d’Abraham.

Cependant, j’ai mon rôle à jouer dans cette grande œuvre : je suis un anneau de la chaîne, un lien d’union entre des personnes. Il ne m’a pas créé pour rien : je ferai le bien, je ferai son œuvre; je serai un ange de paix, un prédicateur de la vérité à la place où Il m’a établi, même en n’y songeant pas, pourvu seulement que je garde Ses commandements et que je Le serve selon ma vocation.

C’est pourquoi je mettrai ma confiance en Lui. Quoi que je sois, où que je sois, je ne serai jamais perdu ni rejeté. Si je suis malade, ma maladie pourra Le servir; troublé, mon trouble pourra Le servir; si je suis dans la peine, ma peine pourra Le servir. Ma maladie, mon trouble ou ma peine peuvent être les moyens nécessaires de quelque grande fin qui me dépasse. Il ne fait rien en vain; Il peut prolonger ma vie ou l’abréger; Il sait ce qu’Il fait. Il peut m’enlever mes amis, m’envoyer parmi des étrangers. Il peut me faire éprouver la désolation ou l’abattement de l’esprit, me cacher l’avenir – et toujours Il sait ce qu’Il fait. […]

Tout être humain qui respire, de haut et de bas rang, instruit et ignorant, jeune et vieux, homme et femme, a une mission, un travail. Nous ne sommes pas envoyés dans ce monde pour rien […]. Dieu voit chacun de nous […]. Il a besoin, Il daigne avoir besoin, de chacun de nous. […] De même que le Christ a Son travail, nous aussi avons le nôtre. » (p. 121-123)

Source : John Henry Newman, Textes choisis par Keith Beaumont (prêtre de l’Oratoire), Éditions Artège, collection "spiritualité en poche", 2010, 146 pages.

     

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