...L’histoire du peuple allemand depuis la fin du moyen âge de l’Abbé Hans Janssen.

Cet historien contemporain de Bismarck était parvenu à ébranler les préjugés de quelqu’un d’aussi étranger au catholicisme que F. Nietzsche ! En témoigne cette lettre du philosophe allemand à son ami Heinrich Köselitz, datée du 5 octobre 1879 :

« En ce qui concerne Luther je suis pour longtemps, cher ami, hors d’état d’en chanter honnêtement la louange : c’est le résultat de la lecture d’un formidable recueil de documents à son sujet sur lesquels Jacob Burckhardt a appelé mon attention. Je veux parler du tome II de l’Histoire du Peuple Allemand de Janssen qui est paru cette année (je le possède). Pour une fois on ne trouve pas là les truquages protestants de l’histoire qu’on nous avait appris à croire machinalement. Pour le moment il me semble que c’est une simple question de goût national si nous préférons la personne de Luther à celle d’Ignace de Loyola. Les horribles, orgueilleuses et fielleuses invectives de Luther qui ne se sentait bien que s’il pouvait cracher de rage sur quelqu’un m’ont inspiré trop de dégoût. Sans doute avez-vous raison de parler des “progrès qu’il a fait réaliser à la démocratisation de l’Europe”, mais cet ennemi forcené des paysans (qui ordonnait de les abattre comme des chiens enragés et criait lui-même aux princes qu’on pouvait gagner le ciel en égorgeant et étripant ce bétail) était bien l’un des plus involontaires promoteurs de cette démocratie. »

La revue Didasco (n° 70, novembre-décembre 1992, p. 4) qui cite cet extrait, donne pour référence : Friedrich Nietzsche, Sämtliche Briefe, Kritische Studienausgabe in 8 Bänden, Heerausgegeben von Giorgio Colli und Mazzino Montinari [Deutscher Taschenbuch Verlag de Gruyter], Band 5, S. 451.

V.
 

     

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