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L'Eglise et l'Etat sont deux victimes plus ou moins consentantes.
par Scrutator Sapientiæ 2015-01-24 14:27:01
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Bonjour Sancenay,

Ce qui suit ne constitue pas précisément une réponse à votre message ; il n'empêche que c'est lui qui me l'a inspiré, ce dont je vous remercie.

Je considère pour ma part que l'Eglise et l'Etat, sauf exceptions isolées, (et aussitôt ringardisées, stigmatisées) sont deux victimes consentantes

- de la confusion contemporaine entre civilisation et divertissement, entre hédonisme et humanisme, entre liberté, égalité, fraternité, et libertarisme, égalitarisme, fraternitarisme, entre légitimité et permissivité, entre libération libératrice et libération libératoire,

- de la soumission contemporaine à l'adoration de la sensualité et de la technologie, à l'apostasie et à l'idolâtrie, au démocratisme hégémonique, aux religions séculières d'hier (atlantisme et communisme) et d'aujourd'hui (atlantisme et islamisme),

depuis bien plus longtemps qu'on ne le dit communément.

1. A mon avis, c'est depuis 1945 que nous sommes confrontés à l'opinion dominante selon laquelle le pire : le fascisme et le nazisme, a été vaincu, mais est toujours menaçant, cette menace "autoritaire", "conservatrice", ou "réactionnaire", ne pouvant plus provenir que de ceux qui dénoncent ou déplorent, précisément, la confusion contemporaine et la soumission contemporaine auxquelles je fais ci-dessus référence, qu'ils soient plutôt de droite ou plutôt de gauche ne changeant pas grand chose à l'affaire.

2. Or, je ne pense pas que l'autorité de l'Eglise, d'une part, l'autorité de l'Etat, d'autre part, soient consolidées, par le comportement de victimes consentantes qui est le leur, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, face à cette axiologie dominante.

3. Il est évident qu'un système de pensée commun à la très grande majorité des hommes d'Eglise et des hommes d'Etat, dans le cadre duquel

- on prend bien soin de dire que l'autoritarisme, l'identitarisme, le communautarisme portent atteinte à la liberté, à l'égalité, à la fraternité,

- on prend bien soin de taire que le libertarisme, l'égalitarisme, le fraternitarisme, portent, oh combien, eux-aussi, atteinte à la liberté, à l'égalité, à la fraternité,

est biaisé dans ses fondements, viciés dans ses principes.

4. Or, au risque de me répéter, je ne vois pas en quoi l'autorité de l'Eglise, compte tenu de la mission qui est la sienne, sort grandie de sa soumission à ce système de pensée, mais je ne vois pas non plus en quoi l'autorité de l'Etat, compte tenu des missions qui sont les siennes, sort grandie de sa propre soumission à ce même système de pensée ; il n'y a pas, d'un côté, l'Eglise, qui a de moins en moins d'autorité, à cause de la pensée unique, et, de l'autre côté, l'Etat, qui aurait de plus en plus d'autorité, grâce à la même pensée unique ; cela, je me trompe peut-être, mais je n'y crois pas...

5. Si on "interroge" l'axiologie inspiratrice de la législation en vigueur, depuis 1975, sur les questions de société : je pense ici, entre autres, à la législation relative à l'avortement et au divorce, on se rend bien compte que la conception actuelle et dominante de la liberté n'a plus rien à voir avec la conception antérieure et dominée de la liberté.

6. La conception actuelle et dominante de la liberté aboutit à l'exaltation d'un libertarisme tout aussi liberticide que l'autoritarisme, puisqu'il prive l'individu des repères normatifs sans lesquels son rapport aux valeurs, sa vision des valeurs, sont complètement désorientées ou paralysées, et soumises à une praxis qui se prend pour une doxa, hégémonique et irréversible.

7. Je constate qu'il est aujourd'hui presque impossible de disposer du moindre espace d'expression publique pour préciser ou rappeler ce qui précède, au sein de l'Eglise ou au sein de l'Etat, mais je constate également que ce ne sont pas des institutions sûres d'elles-mêmes, mais des institutions qui s'auto-fragilisent depuis longtemps, et pour encore longtemps, à cause de leur conduite de victimes consentantes, qui proscrivent de leurs rangs les opinions dissidentes et dissonantes, sur cette question essentielle.

8. Deux remarques quasiment conclusives : d'une part, rien de qui précède n'est d'inspiration anti-catholique, ni d'inspiration anti-démocratique ; d'autre part, il va de soi que la part de responsabilité des hommes d'Eglise est bien plus accablante, écrasante, importante, que celle des hommes d'Etat, qui n'ont pas la même mission, accomplie ou non, dans la mesure où ce sont les hommes d'Eglise, dans leur très grande majorité, qui ont amplement contribué à la neutralisation, au sein même de l'Eglise, de la capacité de critique chrétienne des fondements et principes effectifs du monde contemporain, en tant que monde et en tant que contemporain.

9. Les hommes d'Eglise ont-ils seulement conscience du fait qu'un texte tel que Gaudium et Spes, surtout dans sa deuxième partie, a constitué, et constitue toujours, une certaine forme de consécration magistérielle, donnée à une pastorale sous-tendue par une mystique globalement suiviste, car placée sous le signe de l'accompagnement humanisateur des aspirations de l'homme et de l'évolution du monde ?

10. Tant que les clercs n'auront pas le courage et la franchise de s'affranchir de cette attitude de victimes consentantes, face à l'axiologie dominante, la barque de Pierre continuera à courir sur son erre, à tout le moins dans le monde européen et occidental.

11. Après tout, avant la fin de l'année 2014, il s'est trouvé au moins un évêque français (Mgr Dagens) pour traiter publiquement d'intégristes les catholiques qui se contentent de prendre appui sur le Catéchisme de l'Eglise catholique de 1992 pour critiquer l'homolâtrie (qui n'est pas l'amour des homo-sexuels, mais l'adoration de l'homo-sexualisme) ; eh bien, j'imagine aisément qu'avant la fin de l'année 2016, il se trouvera au moins un évêque français pour traiter d'intégristes les catholiques qui se contenteront de prendre appui sur Veritatis Splendor ou sur Evangelium Vitae pour critiquer la légalisation et la légitimation du recours à l'euthanasie...

12. Comment voulez-vous éradiquer l'évolutionnisme, l'existentialisme, l'horizontalisme et l'humanitarisme axiologiques qui, depuis l'intérieur, voire le sommet, de l'Eglise catholique, désarment les âmes en douceur, face à aux confusions et aux soumissions ci-dessus décrites, alors que ce qui constitue la genèse de cette maladie est tenu pour un signe de santé, d'adaptation et d'ouverture de l'Eglise sur la créativité et la générosité de l'homme et du monde ?

Bon après-midi et à bientôt.

Scrutator.

     

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