Bonjour et merci, Aigle.

1. Votre remarque est tout à fait capitale ; nous sommes en présence d'un procédé

- qui tend à accuser d'être fondamentaliste ou à tenir pour un fondamentaliste tout catholique qui confère encore un tant soit peu d'autorité effective, non "miséricordiste", à l'Ecriture,

ou

- qui tend à censurer, par élusion ou par omission, tout verset de l'Ecriture, en particulier, plus ou moins non conforme, ou carrément contraire, à la vision "miséricordiste" de l'Evangile, en général.

2. C'est comme si la valeur informative de l'Evangile était une chose, indicative, et la valeur performative de l'Evangile une autre chose, facultative ; à ce compte là, la référence à une axiologie "évangélique" ne serait plus qu'un ALIBI, pour rendre modulable ou optionnelle l'adhésion effective au contenu de l'Evangile, alors que l'adhésion effective à ce contenu et à ce qu'il signifie est prescrite par l'Evangile lui-même.

3. Je rappelle ce que j'ai déjà fait remarquer, début avril 2013 : au tout début du tome premier de sa catéchèse consacrée au Credo, Jean-Paul II cite Saint Marc, chapitre 16, verset 16 : voici comment Jean-Paul II le cite : "Qui croira et sera baptisé sera sauvé."

4. Or, il se trouve que Jésus-Christ lui-même, au même endroit, dans l'Evangile selon Saint Marc, dit : "Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné."

5. Je ne sais pas dans quelle mesure les auteurs néo-modernistes qui, peut-être bien par réaction, à la suite d'un "long XIX siècle" controversiste et exclusiviste, ont commencé à cheminer en direction d'une anthropologie globalement eudémoniste et d'une ecclésiologie globalement oecuméniste, ont "préparé le terrain" au "miséricordisme", au point de risquer de fragiliser, de minimiser, d'oublier ou d'occulter, entre autres notions et réalités, le péché originel, le jugement dernier, la distinction de nature entre catholicisme et autres confessions chrétiennes, la distinction de nature entre christianisme et religions ou traditions non chrétiens.

6. Je pense dans cet ordre d'idées que les "miséricordistes"

- considèrent que les péchés contre Dieu, les manquements à la Foi, sont infiniment moins graves que les péchés contre l'Homme, les manquements à la Charité, comme si un péché contre Dieu n'était pas aussi un manquement à la Charité, en ce que celle-ci est due avant tout à Dieu, et pas seulement aux êtres humains ;

- considèrent que les oeuvres de miséricorde spirituelle ne doivent pas avoir un caractère exhortatif ou prescripteur, comme si l'exhortation des non chrétiens et des non croyants, à la conversion, en direction du seul vrai Dieu, Père, Fils, Esprit, n'était pas, pour ainsi dire, "évangéliquement correcte".

7. Face à ce que Jésus-Christ lui-même proclame : "Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi", on aurait

- le droit de savoir qu'il l'a vraiment proclamé,

- le droit de croire que ce qu'il a proclamé est réellement vrai, mais aussi celui de croire que ce n'est pas réellement vrai,

- le droit d'adhérer d'une manière pensée et vécue au contenu de cette vérité proclamée par Jésus-Christ sur lui-même, mais aussi celui de ne pas adhérer à ce contenu, à cette vérité.

8. Cela revient à dire, vous y faites vous-même allusion, que la question centrale et cruciale est celle de l'articulation entre l'autorité de la Parole de Dieu et l'autonomie de la personne humaine, dans l'ordre de la Foi, alors que cette question, à ma connaissance, n'a donné lieu à aucun document du Magistère pontifical contemporain qui aurait été doté d'une autorité normative.

Bonne fin d'après-midi et à bientôt.

Scrutator.

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