CHAPITRE II
II. Conditions qui augmentent notre mérite
1° Conditions tirées du sujet lui-même
242. 3) Comme la volonté de l'homme est changeante, il est nécessaire d'expliciter et d'actualiser fréquemment nos intentions surnaturelles ; autrement il arriverait qu'un acte commencé pour Dieu, se continuerait sous l'influence de la curiosité, de la sensualité ou de l'amour-propre, et perdrait ainsi une partie de sa valeur : je dis une partie, car ces intentions subsidiaires ne détruisant pas complètement la première, l'acte ne cesse pas d'être surnaturel et méritoire dans son ensemble. Quand un navire, partant de Brest met le cap sur New-York, il ne suffit pas de diriger la proue une fois pour toutes vers cette ville ; comme la marée, les vents et les courants tendent à faire dévier le navire, il faut, par le gouvernail, le ramener sans cesse vers le but. Ainsi de notre volonté ; il ne suffit pas de l’orienter une fois, ni même chaque jour, vers Dieu ; les passions humaines et les influences du dehors la feraient vite dévier de la droite ligne ; il faut souvent, par un acte explicite, la ramener vers Dieu et vers la charité. Alors nos intentions demeurent constamment surnaturelles, parfaites même, et très méritoires, surtout si nous y joignons la ferveur dans l'action.
243. d) L'intensité ou la ferveur avec laquelle on agit. On peut en effet agir, même en faisant le bien, avec nonchalance, avec peu d'effort, ou au contraire avec élan, avec toute l'énergie dont on est capable, en utilisant toute la grâce actuelle mise à notre disposition. Il est évident que le résultat dans ces deux cas sera bien différent. Si l'on n'agit qu'avec nonchalance, on n'acquiert que peu de mérites, et parfois même on se rend coupable de quelque faute vénielle, ce qui par ailleurs ne détruit pas tout le mérite ; si au contraire on prie, on travaille, on se sacrifie de toute son âme, chacune de nos actions mérite une quantité considérable de grâce habituelle. Sans entrer ici dans des hypothèses discutables, on peut dire avec certitude que Dieu rendant au centuple ce qui est fait pour lui, une âme fervente acquiert chaque jour un nombre très considérable de degrés de grâce, et devient ainsi en peu de temps très parfaite, selon la remarque de La Sagesse : « Arrivé en peu de temps à la perfection, il- a fourni une longue carrière (Sap., IV, 13). Quel précieux encouragement à la ferveur, et comme il vaut la peine de renouveler souvent ses efforts, avec énergie et persévérance !
Source : Précis de Théologie Ascétique et Mystique de Tanquerey, Desclée and Co, 1923
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde