Il est évidemment surprenant de voir que sous le pontificat "favorable" de Benoît XVI des avancées notables ont été faites du côté traditionaliste mais qu'un piteux échec - largement dû à la pusillanimité et aux mauvais choix de personnes faits par le pape depuis 2005, son absence de "politique" épiscopale sérieuse - s'est produit en 2011-2012.
Surprenant que sous un pontificat inédit, je rejoins Jean-Marie Guénois, où le lobby néo-libéral et néo-moderniste est soutenu - avec retenue au départ, de plus en plus ouvertement depuis 2014 - par le pape au nom d'une illusoire cajolerie du monde libéral radicalement a- ou anti-chrétien, sous ce pontificat qui paraît correspondre aux critiques virulentes adressées à Vatican II et aux papes jusqu'en 2013, critiques très excessives et en grande partie infondées pour Rome de Jean XXIII à Benoît XVI, sous le pontificat rêvé par l'ami Ion Christian Terras, Mme Pedotti et les Jésuites en général, les théologiens kunguiens, les disciples d'Annibale Bugnini, sous ce pontificat pour le coup révolutionnaire, la F.S.S.P.X soit empressée à renouer le contact et rencontre certains secteurs de la Curie romaine.
Il est vrai que le cardinal Müller n'est pas le bras droit du pape, pas même le bras gauche et qu'il est promis à devenir son petit orteil gauche au mieux ou moins encore. Mgr Fellay n'a pas vu le mentor théologique du pape, le cardinal Kasper ; du moins pas officiellement. Ni Mgr Forte. Il n'a pas vu non plus le quasi-premier ministre qu'est le cardinal Maradiagua.
En bref, il parle avec des gens qui n'ont plus aucune influence dans la Curie du pape François. Cela relativise de beaucoup.
Pourtant, je défendrai une position différente de celle de notre ami New Catholic. Il me semble que Mgr Fellay a parfaitement raison de poursuivre, contre vents et marées, la discussion et les contacts avec Rome.
La politique adoptée par Benoît XVI en 2009-2012 a échoué parce qu'elle était mauvaise, irréaliste. Je l'écrivais déjà pour l'échec sous Jean-Paul II de la phase 200-2002. On a fait moins d'erreurs sous Benoît XVI mais l'illusion d'un accord rapide, simple et à portée de main est restée en conduisant au ratage spectaculaire de 2012.
Jamais les discussions ouvertes de façon stable en 2009 n'auraient dû être brutalement arrêtées par Rome pour chercher un compromis bancal et précipité. Les commissions de dialogue avec les Communautés ecclésiales protestantes n'ont pas duré ... deux ans : elles existent toujours après plusieurs décennies. Même l'accueil en apparence simple de la T.A.C. a lamentablement échoué en deux ans.
Le dialogue devrait être institutionnel et tant le cardinal Müller que Mgr Pozzo devraient revenir à cette donnée de base.
Maintenant il se dessine une ligne "bergoglienne" en pointillé connue sous Staline en 1945-1949 sous le nom de "politique du salami". On découpait une tranche après l'autre des adversaires bourgeois en Europe de l'Est sans soviétiser tout de suite entièrement.
- les Franciscains de l'Immaculée ont été la 1ère tranche de salami
leurs Soeurs suivent maintenant
- l'attaque contre les évêques tradi-ratziguériens a commencé : Paraguay et maintenant Italie, attendons la suite
- une tranche d'évêques "wojtyliens" a été découpée à Chicago en plaçant un Mgr Cupich sur le 3è siège américain : la démolition de la politique épiscopale de Jean-Paul II a commencé. A qui le tour se sont sûrement demandés à Rome les épiscopats à dominante wojtylienne, y compris le nôtre même si c'est un wojtylisme tiède en France.
- l'épuration de la Curie est bien avancée : la "tranche" Burke est la prochaine annoncée, après la tranche Piacenza qui fut très vite retirée.
Tout cela est au rythme de Staline qui en 4 ans a éliminé ses adversaires d'Europe de l'Est : il est pensable que le pape veuille faire place nette pour le Synode de 2015 où les "traditionalistes" (selon lui sachant qu'il n'y en avait au sens strict AUCUN au Synode) auront été "tranchés".
Les coups portent prioritairement sur les parties de l'Église post-conciliaire les plus saines, les plus traditionnelles, les plus fidèles à l'herméneutique de réforme dans la continuité. Une fois encore le choix de frapper les FI était emblématique : nous avons été quelques uns à le dire, c'est aujourd'hui l'évidence.
Entre 1965 et 1975, l'autodémolition de l'Église fut très systématique et la Curie, l'épiscopat,les congrégations religieuses furent activement travaillées par les lobbies actuellement en cour comme ils ne l'ont jamais été avant ce pape : Paul VI a condamné les thèses de Schillebeeckx and C°, il ne les a jamais vantées sous une étiquette de "christianisme de la surprise". Quelle "surprise" donc y-a-t-il dans les 10 Commandements, dans les Evangiles qui ne cessent de se rattacher à la Bible hébraïque et de présenter en Jésus celui qui accomplit les prophéties à la virgule près ?
Je suis resté pantois à entendre le Saint-Père faire cette étonnante affirmation et pour le coup, cette lecture inédite des Ecritures. Mais l'inédit en catholicisme, s'il s'éloigne de la Tradition, c'est l'impasse.
La Rome de François, ayant abattu son adversaire à savoir les forces vives du catholicisme post-conciliaire wojtylien-ratzinguérien, pourrait envisager de concéder une réserve d'Indiens assez généreuse à Mgr Fellay.
Du côté FSSPX, on peut aussi penser que dans cet effondrement général qui démarre et devrait s'amplifier, sauf une démission improbable du pape qui vraisemblablement décédera comme pape régnant - il est "rusé" (pape François parlant de lui-même) -, un espace s'ouvre à elle.
Taraudée sur son extrême-extrême droite par l'Union sacerdotale Marcel Lefebvre qui s'organise, concurrencée par les instituts Ecclesia Dei et les créations issues de Summorum Pontificum, la Fraternité de Menzingen est peut-être en meilleure position sous François pour obtenir un statut large et protecteur. Elle deviendrait le "radeau de la Méduse" ou le principal canot de sauvetage du Titanic catholique néo-libéral kaspérite, voué à couler au XXIe comme au XIX-XXe siècle, lors même qu'il se croit à la pointe du "progrès" (cf. l'interview inouïe d'autisme du cardinal Kasper du 15 octobre) et "insubmersible". Ils croient vraiment remporter le ruban bleu du christianisme "moderne" et comme tous ceux qui ont essayé cette voie avant eux, ils échoueront sur l'iceberg tôt ou tard.
Dans ces circonstances, à la veille du naufrage du paquebot néo-libéral, Mgr Fellay peut bien faire acte de charité envers les futurs naufragé(e)s en se rapprochant de la Compagnie propriétaire du Kaspéric et sans monter à bord de ce navire. Il y aura d'autres navires lancés dans les chantiers romains quand le Kasperic aura sombré.
Le pape et le Cardinal hondurien voient dans leur sous-continent la faiblesse voire l'insignifiance du traditionalisme (authentique) dans sa version latine. Un petit apostolat pour la FSSP dans toute la Colombie m'a-t-on expliqué la semaine dernière, l'exemple frappe. En dehors du Brésil et encore, du Mexique mais là ce sont les sédévacantistes qui sont plus présents donc marginalisés, le traditionalisme en Amérique latine, ce sont des confetti.
François et le cardinal Maradiagua pourraient ainsi tenter d'enfoncer un peu plus le pape émérite en réussissant là où il a dramatiquement échoué.
Bien sûr pour Mgr Fellay, il faudra que le statut canonique et les garanties soient en béton armé et en titane car dans un pontificat où la ruse est mise en avant ... il convient de bien étudier les propositions. Une FSSPX romaine pleinement devra être mieux conçue que le Kasperic.