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Vous avez raison sur le plan des principes
par Vianney 2014-09-16 21:56:31
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Il peut en effet arriver qu’un empêchement absolu rende nul un mariage contracté même en toute bonne foi par les deux partenaires. Ce que je voulais dire, c’est que, s’agissant de Louis XII, on peut écarter la bonne foi. Sur ce point, je cède la parole à l’un des meilleurs biographes de sainte Jeanne de France :

Le roi demandeur invoquait trois raisons pour que fût prononcée la nullité de son mariage : la contrainte implacable qu’il avait subie et sans laquelle il n’aurait jamais épousé Jeanne, sa parenté naturelle et spirituelle avec celle-ci, enfin de prétendues difformités de la reine, entraînant son inhabilité au mariage.

Le deuxième motif relevait de la pure fourberie, et nous n’allons pas nous attarder à en faire état. Toutes dispenses de parenté, nous le savons déjà, avaient été bien et dûment données par Rome et publiées, commentées, enregistrées le 8 septembre 1476 à Montrichard, avant et pendant la cérémonie religieuse. On fit mine, en 1498, d’avoir perdu la mémoire de ces faits. On n’avait d’ailleurs pas perdu les papiers en faisant foi, mais on les cachait. Comment fallut-il à la fin compter avec ceux-ci, nous n’en finirions pas de pourchasser, jusqu’à les prendre la main dans le sac, tous les menteurs, roi compris, qui ont joué leur partie dans cette farce grossière.

La contrainte, en matière de nullité, est le grand moyen. Un mariage fait hors du consentement formel et absolument libre des deux parties ou de l’une d’elles, n’est pas un mariage. Il n’y a pas à l’annuler : il est nul de plein droit, n’ayant jamais existé. La tâche des juges est seulement, quand ils ont constaté cette nullité, de la reconnaître et proclamer publiquement.

Il est vrai que, dans l’espèce, il s’agissait d’une nullité remontant à vingt-deux ans. Or, s’il va de soi qu’un mariage auquel on n’a pas consenti est nul, il reste qu’on peut, au cours de vingt-deux années de cohabitation, même intermittente, avoir un moment, un seul, changé d’avis et fait alors, en toute liberté d’esprit et de cœur, acte d’époux. De ce seul fait, la contrainte, comme on dit en droit canon, est purgée. Il n’y a plus, dès ce moment, mariage nul, mais mariage consenti. C’est ce qui s’est indiscutablement produit, les débats l’ont établi, entre Louis et Jeanne.

Le procès, cela étant, aurait tourné court, au grand désarroi du demandeur, si celui-ci ne s’était alors rabattu sur le troisième argument, celui de l’inhabilité de Jeanne au mariage, en raison de l’imperfection supposée de son corps.

Il s’agissait de décider si Jeanne, qui se disait elle-même « pas aussi belle que beaucoup d’autres femmes », était à ce point contrefaite qu’elle fût hors d’état de mettre des enfants au monde.
Là-dessus, on devine quels abominables et cruels débats purent se dérouler à l’encontre de la pauvre femme, de sa pudeur, de son honneur même. Deux incidents dramatiques vinrent tour à tour corser, puis boucler l’affaire. Le premier est une vieille lettre du roi Louis XI, qui, produite en toute dernière heure, vraiment en coup de théâtre, jeta dans la stupeur et dans une sorte d’effarement tous les gens d’alors, en attendant de scandaliser la postérité jusqu’à nous-mêmes. Nous donnerons tout à l’heure le texte de cette lettre, avec les très bonnes raisons que nous avons de douter aussi bien de sa valeur probante que de son authenticité. L’autre incident fut le refus opposé par Jeanne à la requête des juges voulant la soumettre à une visite corporelle. Plutôt que de subir cet affront supplémentaire, dont la seule idée la couvrait de honte, la reine déclara hautement qu’elle était parfaitement apte, et le savait, à accomplir sa mission d’épouse et à devenir mère, qu’aussi bien le roi le savait aussi, et pour cause, et que, n’ayant, quant à elle, rien dit sous la foi du serment qui ne fût la vérité pure, elle s’en remettait, sur ce point capital, au serment du roi, qui, pas plus qu’elle-même, n’oserait, lui, se parjurer.

Les juges ayant acquiescé, Louis XII fut appelé, jura honteusement tout ce qu’il fallait pour se débarrasser à jamais de la sainte qui venait de lui faire le don suprême et magnifique de sa confiance, et le rideau tomba sur l’une des plus ignominieuses félonies de l’histoire.

Source : Antoine Redier, Jeanne de France, X. Mappus, p. 223-225.

     

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