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Soyons à la fois toujours lucides et moins "en souffrance".
par Scrutator Sapientiæ 2014-08-14 22:43:28
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Bonsoir Castille,

Je ne sais plus qui a écrit : "plus on est lucide, plus on est souffre", mais je sais qu'il arrive qu'un excès de souffrance, d'appréhension de l'avenir ou de réprobation du présent (même si cet excès de souffrance est légitime, en première instance), entraîne un manque de lucidité, notamment sur les origines ou les conséquences de ce qui fait souffrir.

1. Au contact de ce qui se déroule aujourd'hui, au sein et autour de l'Eglise et du monde, je vous souhaite d'être à la fois toujours lucide et moins "en souffrance", ou, en tout cas, moins en situation intérieure de désarroi douloureux.

2. Une très grande partie de l'histoire de l'Eglise, que nous le voulions ou non, est placée sous le signe, dans le meilleur des cas, de "l'équilibre dans le déséquilibre".

3. Vous écrivez ceci : " L'équilibre du chrétien ce sont les Écritures et la Tradition. Le catholique ne lit pas QUE LA BIBLE. -même si tout le catholicisme y est déjà présent. En faire fi, c'est dénaturer le catholicisme, c’est le contrefaire. "

4. Ne serait-ce que pour des raisons d'ordre culturel ou matériel, bon nombre de chrétiens catholiques ne bénéficient pas d'un égal accès à l'Ecriture ET à la Tradition, mais cela ne fait pas "à coup sûr" de tous les catholiques qui sont dans cette situation des "déséquilibrés" dans la Foi, me semble-t-il.

5. Dans le même ordre d'idées, je ne vois pas en quoi la Foi d'un catholique qui ne jurerait que par l'Ecriture et par une seule des principales composantes historiques de la Tradition, par exemple, pourquoi pas, la composante monastique, serait plus "équilibrée" que celle d'un catholique qui prendrait lui-aussi appui sur l'Ecriture, mais qui ne "surmajorerait", en particulier, aucune des composantes historiques de la Tradition.

(Et je n'oublie évidemment pas la nécessité de s'en remettre au Magistère, notamment et surtout en ce qu'il a de plus normatif et de plus officiel, l'interview d'un pontife, quel que soit, par ailleurs, son contenu, n'étant pas de même nature qu'une lettre encyclique.)

6. Sans doute le catholique n'a-t-il pas vocation à ne lire que la Bible, mais serais-je uniquement un liseur provocateur, si je vous disais que l'une des raisons pour lesquelles "nous en sommes là où nous en sommes" découle précisément du fait que les catholiques, en général (moi le premier), ne lisent pas assez souvent la Bible, ne la connaissent et ne la comprennent pas assez ?

7. Vous redoutez le pire, pour l'avenir de la doctrine de la Foi catholique, mais cela fait déjà plusieurs décennies que cette doctrine, au sein même de l'Eglise, est plus ou moins considérée comme plus ou moins démodée ou dépassée, édulcorable ou euphémisable, escamotable ou facultative, "contextualisable" ou "pastoralisable".

8. J'en souffre, nous en souffrons, vous en souffrez, mais nous devons prendre notre mal en patience, penser et vivre tout cela le plus chrétiennement possible, et non nécessairement le plus douloureusement possible, mais aussi nous mobiliser et nous organiser, avec les moyens limités qui sont les nôtres, pour que ce qui nous tient si légitimement à coeur puisse avoir un avenir, même fragile ; face à un tel contexte, il n'y a rien de pire que le manque d'activité et l'excès d'isolement.

9. Ce que vous semblez avoir récemment appris sur Saint Augustin ne date pas tout à fait de 2013 ; j'ai déjà lu, à plusieurs reprises,

- que certains concepts augustiniens ont donné lieu, sous la plume du futur évêque d'Hippone, à une "fixation" progressive,

- qu'une partie non négligeable de l'oeuvre de Saint Augustin a été écrite dans un contexte particulier, dans un contexte polémique, ce qui l'a parfois amené à avoir, non des positions doctrinales successives, mais des manières successives de les exprimer.

10. Par ailleurs, je crois que vous vous méprenez, sur l'une des caractéristiques fondamentales du relativisme et du subjectivisme contemporains, en matière religieuse : il me semble vraiment que ce n'est pas tant le règne du doute que celui de l'intention sincère : on considère ainsi souvent que si telle ou telle personne a l'intention sincère de croire que telle ou telle croyance, religion ou tradition, est vraie, son intention sincère ne pouvant être que bonne, cette croyance ne peut être que vraie.

11. Je n'ajoute presque rien d'autre au présent message, mais enfin, tout de même, faisons attention à ce que nous écrivons, notamment quand vous dites : "Pour nous consoler nous n’avons que l’évocation des vicissitudes des chrétiens orientaux ou ailleurs dans le monde" : je sais bien que le sang des martyrs est semence des chrétiens, mais, si j'ose dire, il est des sources de consolation dont je me passerai volontiers.

12. Ecoutez, d'une part, j'espère avoir trouvé les mots, ou en tout cas ne pas m'être trompé de registre de discours, et, d'autre part, je nous souhaite et vous souhaite bon courage, et je nous souhaite et vous souhaite de ne pas penser ni vivre tout cela dans l'isolement.

13. Là, comme çà, maintenant, tout de suite, je suis tenté d'écrire ceci :

"c'est trop long, cette crise de l'Eglise et cette crise de la Foi, et, en un sens, il est "injuste", à l'égard des fidèles catholiques qui s'efforcent encore d'être fidèles au catholicisme, que Dieu permette que cela soit aussi long que cela, et que cela descende aussi bas que cela."

Mais, d'une part, cela fera bientôt 2000 ans que l'Eglise catholique est en crise, en crises successives, et, d'autre part, d'un point de vue surnaturel, théologal, eschatologique, sotériologique, si Dieu permet cette crise, c'est probablement pour une raison qui n'est pas éloignée de celle pour laquelle il permet le mal.

14. Je crois qu'il nous faut vivre tout cela comme une épreuve avant tout spirituelle, même si cette crise porte en elle des aspects et enjeux d'ordre dogmatique et liturgique, doctrinal et pastoral.

Je vous remercie par avance pour votre bienveillance et votre indulgence, au contact de ce qui précède, et je vous souhaite bon courage pour l'avenir, quel qu'il soit.

Scrutator.

     

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