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attention au petit bout de la lorgnette : un texte qui mérite réflexion
par Luc Perrin 2014-06-22 14:59:28
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cher New Catholic, je crois que vous tombez ici dans ce travers.

D'abord deux remarques quasi canoniques :

- un document de la C.T.I. n'est PAS un document magistériel : c'est le fruit d'une consultation de cette Commission.
Le jour où le pape s'appuiera sur ce document pour en tirer un motu proprio, une encyclique etc., là nous aurons un texte magistériel.

- d'autre part, la phrase renvoie dans une note à l'expression utilisée par saint Jean XXIII qui, en 1962-1963, pouvait croire à cela puisque la Crise sans précédent est venue après sa mort.

Une double relativisation de cette formule galvaudée dont j'use de comme celle de "Renouveau" et qui désormais fait sourire (jaune) même les plus conciliaires dans un auditoire. Mais il est possible, surtout chez des théologiens, qu'il se trouve encore quelques uns pour y croire vraiment.

Surtout le texte est important et intéressant et se fixer sur ce détail, c'est détourner l'attention du sujet. Très clairement, certains, y compris dans la Rome du pape François, misent sur "l'opinion publique majoritaire" - libérale, pro-mort etc. - pour tenter de la faire passer frauduleusement pour la notion traditionnelle de sensus fidei.

Là est l'enjeu du texte, c'est une bataille sourde mais réelle en vue du Synode de 2014 notamment. Va-t-on effacer en 2014, ou commencer à effacer, ce que Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI ont maintenu avec détermination et énergie ?

Voici ce qu'écrivent les théologiens de la C.T.I. et c'est plutôt du Jean-Paul II que du Hans Küng :

"118. Il est clair que l’on ne saurait identifier purement et simplement le sensus fidei à l’opinion publique ou majoritaire. Ce ne sont en aucune façon les mêmes choses.

i) Tout d’abord, le sensus fidei a un lien évident avec la foi, et la foi est un don que chacun ne possède pas nécessairement ; le sensus fidei ne peut donc certainement pas être assimilé à l’opinion publique dans la société dans son ensemble. Ensuite, alors que la foi chrétienne est bien entendu le facteur premier qui unit les membres de l’Église, bien des influences différentes s’associent pour façonner les points de vue des chrétiens qui vivent dans le monde moderne. Comme le montre de façon implicite la précédente discussion sur les dispositions, le sensus fidei ne peut donc pas non plus s’identifier purement et simplement à l’opinion publique ou majoritaire dans l’Église. La foi, et non l’opinion, est le point de référence auquel il faut nécessairement prêter attention. L’opinion n’est souvent que l’expression, sujette à de fréquents changements et transitoire, des tendances ou des désirs d’un certain groupe ou d’une certaine culture, alors que la foi est l’écho de l’unique Évangile qui est valide pour tous les temps et pour tous les lieux.

ii) Dans l’histoire du peuple de Dieu, ce fut souvent non pas la majorité, mais bien plutôt une minorité qui a vraiment vécu la foi et qui lui a rendu témoignage. L’Ancien Testament connaissait le « reste saint » des croyants, parfois en tout petit nombre comparé aux rois, aux prêtres et à la plupart des Israélites. Le christianisme lui-même a commencé comme une petite minorité, blâmée et persécutée par les autorités publiques. Dans l’histoire de l’Église, les mouvements évangéliques tels les franciscains et les dominicains, ou plus tard les jésuites, commencèrent comme de petits groupes que certains évêques et théologiens regardèrent avec suspicion. Dans beaucoup de pays aujourd’hui, les chrétiens subissent de la part d’autres religions ou d’idéologies séculières une forte pression pour leur faire abandonner la vérité de foi et affaiblir les liens de la communauté ecclésiale. Il est donc particulièrement important de discerner et d’écouter les voix des « petits qui croient » (Mc 9,42)."

Toutefois le n°123 est ouvre la porte à Golias et ses amies... :

"123. Des problèmes surgissent lorsque la majorité des fidèles demeurent indifférents aux décisions doctrinales ou morales qu’a prises le magistère, ou lorsqu’ils les refusent absolument. Ce manque de réception peut être le signe d’une faiblesse dans la foi ou d’un manque de foi de la part du peuple de Dieu, dû à l’adoption insuffisamment critique de la culture contemporaine. Mais dans certains cas, cela peut être le signe que certaines décisions ont été prises par les autorités sans que celles-ci aient pris en compte comme elles l’auraient dû l’expérience et le sensus fidei des fidèles, ou sans que le magistère ait suffisamment consulté les fidèles [137]."

La note 137 renvoie au § 78-80 et le n°80 n'est pas sans toucher directement à des questions qui nous sont très chères, de façon un peu raide à mon sens car l'abus de pouvoir n'y est pas évoqué.

"80. Il arrive pourtant qu’en certaines occasions la réception de l’enseignement du magistère par les fidèles rencontre difficulté et résistance ; il faut alors, en de telles situations, agir de part et d’autre de façon appropriée. Les fidèles doivent réfléchir sur l’enseignement qui a été donné, s’efforçant de leur mieux de le comprendre et de l’accepter. Résister par principe à l’enseignement du magistère est incompatible avec un authentique sensus fidei. Le magistère doit pareillement réfléchir sur l’enseignement qui a été donné et examiner s’il n’y a pas lieu de le clarifier ou de le reformuler afin de communiquer de façon plus efficace son message essentiel. Ces efforts mutuels en temps de difficulté expriment eux-mêmes la communion qui est essentielle à la vie de l’Église, ainsi qu’une aspiration à recevoir la grâce de l’Esprit qui conduit l’Église « dans la vérité tout entière » (Jn 16,13)."


Un texte de réflexion donc, pas magistériel, mais qui est d'une brûlante actualité dans un pontificat flottant précisément sur la question du sensus fidei et de "l'opinion".

     

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 " Vatican II a été une nouvelle Pentecôte" par New Catholic  (2014-06-21 13:43:47)
      je préfère l'original à la copie par jejomau  (2014-06-21 13:49:07)
          Oui, moi aussi par New Catholic  (2014-06-21 13:54:49)
              ah, bien vous voyez par jejomau  (2014-06-21 13:59:37)
      On confond souvent résultat attendu et résultat obtenu. par Scrutator Sapientiæ  (2014-06-21 14:23:59)
          C'est vrai par New Catholic  (2014-06-21 14:47:46)
          la question qui vient spontanément par jejomau  (2014-06-21 15:13:06)
              Une référence au Catéchisme + Une réflexion rapide. par Scrutator Sapientiæ  (2014-06-24 07:37:15)
          Tout à fait d'accord par Aigle  (2014-06-22 10:19:44)
      Les fruits de cette "Pentecôte".... par FilsDeMarie  (2014-06-22 09:24:18)
          oui mais à l'inverse ailleurs ... par Luc Perrin  (2014-06-22 15:18:11)
              Quelle Asie? Quelle Afrique? par New Catholic  (2014-06-22 17:19:17)
                  pas si simpliste car les chiffres sont là par Luc Perrin  (2014-06-22 20:43:00)
                  Pour être sur par New Catholic  (2014-06-22 22:15:40)
      attention au petit bout de la lorgnette : un texte qui mérite réflexion par Luc Perrin  (2014-06-22 14:59:28)
          Si vous aviez lu ici... par New Catholic  (2014-06-22 17:23:23)


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