Oulala, je vois que ma petite personne provoque des débats passionnés, croyez-moi cela n'en vaut pas la peine !

Le pire c'est que nous ne sommes pas loin d'être presque tous d'accord mais raison et sentiments se sont un peu trop emmelés les pinceaux ...

Quelques explications :

Savonarole dit qu'écrire ce que l'on pense à mon propos sans se voiler la face est une question de respect. Je dirais moi que c'est une question de justice et de vérité...

Justice effectivement de dire que le Te Deum est bourré d'erreurs d'harmonie, de prosodie, de maladresse d'écriture instrumentale, de modulations non voulues et mal amenées qui ne reviennent même pas à la tonalité d'origine, et que l'interprétation est fausse quasimement de bout en bout pour les parties de choeur ! Ca, je suis la première à la reconnaitre ...

Justice aussi de dire que ce fameux Te Deum n'était pas destiné à ce qu'il est devenu .... petite pièce sans prétention (qui devait même être anonyme si je l'avais pu), écrite au départ juste pour donner un concert devant quelques centaines de personnes au profit de l'abbaye de Lagrasse (à défaut de jouer d'autres grandes pièces mieux chantées par des gens plus doués). Un peu comme si le discours de mariage de votre meilleur ami, plein de sentiments affectueux mais très alambiqué et mal construit, écrit juste pour l'occasion, se retrouvait à la une des quotidiens , sorti de son contexte et décortiqué par l'Académie Française ...

Mais enfin justice aussi de dire que malgré ses énormes défauts reconnus par de bons musiciens, d'autres musiciens non moins chevronnés y ont trouvé malgré tout un certain potentiel, je pense à un chef de chant à l'opéra de Paris, à un professeur de solfège au conservatoire (devenu depuis mon professeur) , au professeur de chant d'une de mes solistes, de réputation internationale (devenue aussi mon professeur depuis), aux violons qui ont joué bénévolement dans le Te Deum qui sont premiers violons à l'orchestre de Radio-France, et sans être complaisants m'ont conseillée fermement de continuer dans cette voie (avec un bon enseignement) , ce que je n'aurais peut-être pas fait sans ces avis d'experts ....

Mais au delà de ces problèmes techniques, n' y-a t-il pas aussi une histoire de goût ? Depuis le berceau mon oreille a été bercée par la musique ancienne et baroque, pas plus loin, car pour papa, historien du droit spécialiste de l'époque médiévale, Mozart c'était déjà le futur !
Depuis j'ai comblé ces lacunes mais mon esprit et mon goût étaient déjà très influencés ...
Ce n'est pas pour rien si Haendel est mon musicien préféré (avec Palestrina et Mendelssohn même si c'est bien difficile de choisir) ...
Peut-être que ceux qui n'aiment pas le Te Deum n'ont pas du tout la même culture musicale ... Certains pourraient me reprocher sans doute d'être proche de cette époque mais de tout façons , on ne nait pas de nulle part, on est toujours influencé positivement ou négativement par ce qui a été fait avant, que ce soit une époque ou une autre ! ?

Il est vrai que c'était très téméraire, sinon même inconscient de se lancer dans ce projet sans formation préalable, mais si j'avais du attendre d'être formée , ce n'était plus pour le renouveau de l'abbaye de Lagrasse (et oui 10 ans après c'est moins efficace!) et puis j'avoue comme mon but n'était pas si ambitieux, je n'ai pas du tout réfléchi à cela ...

Balbula a raison, le fait d'être autodidacte n'est absolument pas une qualité mais bien un défaut .
Je me bats moi même contre ça dans beaucoup de domaines (notamment la technique vocale) car il n'y que la connaissance qui rend libre et qui permet de choisir ... J'ai essayé de dire tout ça dans l' émission de KTO mais ... coupé au montage ...
D'ailleurs pour remédier à ce problème, je prends assidument des cours de chant, de solfège, d'harmonie et d'analyse musicale et là, je vois l'ampleur du désastre !! Mais c'est passionnant et très libérateur ... techniquement parlant (puisque c'est aussi le sujet du débat) la prosodie et le contrepoint commencent à être un peu mieux maitrisés même si l'harmonie et les modulations ont encore besoin de boulot !!

Après, dois-je regretter de m'être lancée comme ça, très naïvement dans ce projet ? Aurais-je mieux fait de m'abstenir ? Dois-je regretter d'avoir à mon petit niveau, essayé d'aider l'abbaye de Lagrasse (les bénéfices des concerts et des ventes de cd sont loin d'être négligeables) ? ...
Personnellement, et malgré tous les tracas que me vaut l'imperfection de l'oeuvre, le fait que je dois défendre quelque chose que je sais bancal, je ne regrette rien ...
Si vous aviez vu comme moi, le regard des choristes pendant les concerts, le regard d'une des solistes complètement paniquée s'accrochant au mien qui ne valait guère mieux , et l'ambiance de ces concerts si intenses, vous auriez senti que plus rien était entre nos mains, et que sans doute quand on essaie de faire quelque chose de bien pour le Bon Dieu, (même si Lui-Même dans sa perfection ne peut qu'aimer les choses ordonnées), même cette pauvre musique, ça ne peut que Le toucher? c'est sans doute cela la Miséricorde par rapport à la Justice ?

Je ne pense pas faire mal en composant, ni faire quelque chose de mal (car je n'encourage pas le fait d'être autodidacte), je sais bien ne pas être le compositeur du siècle (pourtant il n'est pas très long encore!), je suis consciente que l'engouement que les gens ont pour moi est très sentimental et lié tant à l'histoire de Lagrasse qu'à la maladie, mais comme je pense que rien n'arrive par hasard, je me dis aussi que si Notre-Seigneur permet que ça plaise à des gens c'est aussi pour faire passer un message d 'Espérance ou de refus du diagnostic prénatal (Cf l'émission d'hier soir et tous les messages que j'ai reçus cette nuit) ....

Voilà ... beaucoup de bruit pour rien en somme !
Quant aux"unions de prière" de Balbula, je ne pense absolumment pas que son intention était méchante ou hypocrite, je pense qu'elle cherchait à défendre la rigueur, le travail, la vérité dans la correction fraternelle , vertus qui se perdent dans notre monde, mais sans avoir tous les éléments en mains ...

Bien cordialement

Jeanne Barbey