Je suis né orthodoxe, converti catholique à l'âge adulte. Ma famille est encore en large partie orthodoxe (tradition grecque). Je connais donc un peu la tradition de l'Orient.

Je dois dire, de ce qui m'est permis de connaître et de juger, que c'est Rémi qui a raison sur tous les points et Thomas. Contrairement à ce que soutiennent en partie Glycéra et Gentiloup, les divergences avec les Orthodoxes sont fondamentales. Sans entrer dans les détails, on ne peut confondre Dormition et Assomption, car le dogme proclamé par Pie XII en 1950 déclare de vérité de foi la montée au ciel de Marie corps et âme, incorrupta, à l'image de son divin Fils. La dormition n'accepte que la montée au ciel de l'âme et non du corps de la Vierge, ce qui rend encore plus compréhensible le rejet par les Grecs de l'Immaculée conception pour des raisons théologiques et non uniquement disciplinaires ou canoniques.

Pour ce qui est de la procession du Saint Esprit il est faux d'affirmer que les Orthodoxes croient à sa procession par le Fils mais d'une manière à assurer la primauté du Père, Principe incréé. En vérité, comme l'a si bien montré Saint Thomas d'Aquin à la formule claire et précise du Filioque "...qui ex Patre Filioque procedit", ils opposent la "...qui ex Patre procedit et ad Filio mittuntur", qui veut dire que l'Esprit procède du Père par le Fils, ce qui ne veut rien dire à moins de considérer que le Fils est juste une sorte de "filtre" passif qui ne fait que reflèter la puissance du Père. Saint Thomas (Contra errores Graecorum ad Papa Urbanus VI) y a vu plus largement les prémices d'une erreur théologique majeure qui met en cause la consubstantialité et l'égale dignité du Père et du Fils dans le cadre de la Sainte Trinité. Dans ce même opuscule le Docteur angélique montre, par la bouche même des Pères et des docteurs grecs, combien le Filioque est traditionnel dans l'enseignement de l'Eglise. Un régale !

La perte du repère que constitue la primauté pétrine a fait voler en éclats la conception recte de la catholicité que les Orthodoxes auraient dû avoir. L'épiscopalité et la synodalité ont "nationalisé", voire "territorialisé" ou "localisé" les églises orthodoxes, repliées sur elles-mêmes. Leur communion pneumatique est souvent existante par intermittence. Leurs canonisations sont chaotiques et toujours locales - certains évêques russes ont canonisé des soldats morts en Tchétchénie et mis leur image, en treillis et portant des kalachnikovs, sur des iconostases avec l'auréole qui va avec. Je vous épargne les excommunications que lancent à tout va les épiscopes l'un contre l'autre. La communion fictive qui existe ne vaut même pas pour la galerie. Au lieu de comprendre leur erreur fondamentale, les Orthodoxes persistent à rejeter le principe d'unité de l'Eglise qui donne sa réalité à sa catholicité. A cause de la perte de leur catholicité, un des caractères de l'Eglise, elles en sont réduites à être des gardiennes de nationalismes ou jouets de politiciens qui l'emportent sur la communion qui devrait prévaloir. Ainsi, aucune vraie communion n'existe par exemple entre les églises orthodoxes de Grèce et celle de Macédoine, entre celles de Serbie et d'Albanie, entre les églises russes et baltes, entre certaines églises russophones et le Patriarcat de Moscou. Ces églises n'ont aucune communion visible entre elles car elles se sont coupées de l'Eglise mère et maîtresse, celle de Rome et sont devenues une sorte de rameau sauvage dont les fruits ont une saveur aigre-douce (tantôt délicieuse, tantôt très amère).

D'ailleurs, l'auteur de la Divine Liturgie, Saint Jean Chrysostome, archevêque de Constantinople, persécuté par son propre clergé et exilé par l'empereur est allé mourir à Rome, auprès du successeur de Pierre, réaffirmant sa primauté et son charisme de principe d'unité de l'Eglise. D'ailleurs Gentiloup a tort de dire que sa liturgie serait plus ancienne que le rit romain, dont le canon remonte aux temps apostoliques. Il ne faut pas tomber dans le piège des Orientaux qui font à chaque fois jouer en leur faveur une sorte de présomption d'ancienneté et d'authenticité face à l'Eglise de Rome. Deux exemples : 1) les premières images icôniques, n'ont pas été peintes en Orient, mais bien dans les catacombes romaines : 2) le titre de Patriarche oecuménique (à savoir de toute la terre) que porte indument l'évêque de Constantinople n'a rien de traditionnel. Grégoire le Grand, qui fut apocrisiaire (légat) du Pape à Constantinople, une fois Pape écrivit aux évêques d'Illyrie que ce titre était une usurpation et un signe de mégalomanie scandaleuse qui non seulement était une offense aux vrais patriarcats (Antioche, Alexandrie, Jérusalem) mais les privait de juridiction en Orient par son vocable d'oecuménique.

A mes yeux les Orthodoxes sont complètement dans l'erreur. Contrairement aux Catholiques qui ne voient en eux que des schismatiques, ils considèrent les Catholiques comme de véritables hérétiques. Il suffit de se rendre en pays orthodoxe pour le constater en toute bonne foi. Ils ne se privent pas pour considérer la messe romaine comme montée de toute pièce et invalide, ce qui a choqué même sur le FC, et je parle ici de la messe traditionnelle, lui préférant certaines innovations modernistes.

Mgr Fellay avait absolument raison dans son dernier sermon de le rappeler et de dire que les Orthodoxes restent dans le péché et devant des portes fermées au ciel s'ils ne reconnaissent pas instamment la primauté pétrine. Que les traditionalistes de bonne foi et tous les Catholiques de bonne volonté en prennent de la graine.

UDP

auxy pour qui ubi Petrus ibi Ecclesia...